Découverte d’une rarissime inscription d’un psaume byzantin du Nouveau Testament
Les premières fouilles des ruines d'Hyrcanie ont permis de retrouver la forteresse du roi Hérode, où une petite communauté monastique au 5e siècle a attendu le changement de régime
Une inscription rarissime – en grec – d’une partie du Psaume 86 du Nouveau Testament a été découverte par des archéologues de l’Université hébraïque, sur le site de la forteresse Hyrcania, qui date du Second Temple et se trouve au sommet d’un relief inhospitalier du désert de Judée, à environ 17 kilomètres au sud-ouest de Jérusalem.
Peinte en rouge, sous une croix, sur le côté d’une pierre de construction de belle taille, l’inscription en koinè grecque dit : « Jésus-Christ, protège-moi, car je suis pauvre et nécessiteux. Protège ma vie, car je te suis fidèle. » Dans le psaume hébreu original, connu sous le nom de « Prière de David », la première partie dit : « Écoute-moi, Seigneur, et réponds-moi. »
Une communauté de moines chrétiens byzantins fondée au 5e siècle de notre ère est sans doute l’auteure de cette inscription adaptée du Psaume 86.
Le Dr Avner Ecker, de l’Université Bar-Ilan, qui a participé au déchiffrage de l’inscription, explique qu’elle renferme de petites erreurs de grammaire, preuve que « le grec n’était pas la langue maternelle du prêtre, sans doute originaire de la région, locuteur d’une langue sémitique ».
Les fouilles d’Hyrcania menées cette année ont été conduites par le Dr Oren Gutfeld et Michal Haber, de l’Université hébraïque, en collaboration avec l’Université Carson-Newman (Tennessee) et le programme American Veterans Archaeological Recovery, qui utilise l’archéologie pour aider les anciens combattants américains à retrouver une place au sein de la vie civile.
Outre ce psaume, une inscription semblable a été trouvée à proximité, toujours en cours d’analyse. Ce sont probablement les seules inscriptions de psaumes en koinè grecque trouvées sur un support en pierre, au lieu des traditionnels parchemins ou d’autres matériaux, expliquent les archéologues.
Ces fouilles, qui ont eu lieu cette année, sont les premières « fouilles archéologiques scientifiques et universitaires » entreprises à cet endroit, précise l’université. Le site avait, par le passé, reçu la visite d’archéologues européens, la dernière dans les années 1950, d’un archéologue belge accompagné de Bédouins, qui y avait découvert un grand nombre de papyrus. La zone était contrôlée par la Jordanie à l’époque.
La forteresse Hyrcania, qui date de la dynastie hasmonéenne (entre le 2e et le 1er siècle avant notre ère), se trouve au sommet d’une colline de 200 mètres arasée de manière à être constructible, emblématique des forteresses édifiées dans le désert au sommet d’une colline. Le roi Hérode l’a agrandie et rénovée, comme il l’a fait avec Massada et Hérodium.
À la mort d’Hérode, en l’an 4 de notre ère, Hyrcanie est tombée en désuétude, jusqu’à ce que le petit monastère chrétien byzantin soit fondé à la fin du 5e siècle de notre ère. Ce monastère, appelé Kastellion – « Petit château » en grec -, a survécu à la conquête islamique qui a suivi (en 635 de notre ère) et a été occupé jusqu’au début du 9e siècle.
Il a ensuite été abandonné et se trouve pour l’essentiel à l’état de ruines, au sommet des anciennes structures hérodiennes et hasmonéennes.
On a également trouvé lors des fouilles un petit anneau en or, d’un centimètre de diamètre environ, orné d’une turquoise et d’une inscription en arabe disant « Mashallah » (Dieu l’a voulu). Selon toute vraisemblance, cet anneau, daté du califat omeyyade (7e au 8e siècle de notre ère) suite à la conquête islamique, a pu servir de sceau. La turquoise provient sans doute de Perse.
Un moment digne d’Indiana Jones
Gutfeld, qui est l’un des principaux archéologues de la mission, connaît bien ce site. En 2000, il a vécu un « moment digne d’Indiana Jones » en se lançant dans l’exploration de deux « tunnels mystérieux » trouvés au pied de la colline, explique-t-il au Times of Israel. Ces tunnels « artificiels » descendent jusqu’à une profondeur respective de 120 et 80 mètres, jusqu’à une impasse.
Ils ont été découverts pour la première fois en 1960 par un universitaire britannique incapable de les fouiller et contraint de mettre un terme aux fouilles en raison de conditions météorologiques difficiles, rappelle Gutfeld. Ses propres fouilles, après l’an 2000, lui ont permis de retrouver quelques petits artefacts de l’époque du Premier Temple, mais la question des tunnels – leur construction et leur destination – reste ouverte.
Michal Haber, l’autre archéologue de l’Université hébraïque responsable des fouilles, explique que le roi Hérode était connu pour emprisonner ses ennemis, « réels ou imaginaires », en Hyrcanie. L’une des théories est que les tunnels faisaient partie d’un « travail d’esclave » inachevé, ou étaient une sorte de punition sisyphéenne destinée à occuper les prisonniers, dit-elle.
Gutfeld « est revenu vers 2015, 2016 » pour des fouilles plus approfondies et a trouvé le site au sommet de la colline « inviolé ». C’est à ce moment qu’ont été décidées les fouilles qui ont eu lieu cette année, qui, selon lui, n’auraient pas été possibles auparavant compte tenu de la localisation du site, en Cisjordanie. Une autre fouille, d’une durée prévisionnelle de quatre semaines, est prévue début 2024.
Le site renferme également des tombes hérodiennes et byzantines, mais celles-ci ont été « intégralement pillées il y a fort longtemps », explique Gurfeld. Cependant, l’essentiel de la forteresse, en grande partie à l’état de ruines, est relativement intacte. L’inaccessibilité et le climat difficile de l’Hyrcanie – dans les profondeurs du désert, sans eau à proximité – ont probablement contribué à tenir les pillards à distance.
L’Autorité israélienne des Antiquités, en collaboration avec l’Administration civile de Judée-Samarie, a lancé ces dernières années un projet ambitieux visant à répertorier précisément, explorer et sécuriser les nombreux sites archéologiques du désert de Judée. La forteresse d’Hyrcanie en fait partie.
« Nous sommes conscients que ces fouilles vont attirer l’attention des pillards. C’est un problème persistant, qui existait avant nous et existera après nous, qui plaide en faveur de l’organisation de fouilles scientifiques, surtout en un lieu aussi sensible que Hyrcania. Nous tentons comme nous pouvons d’avoir une ou deux longueurs d’avance », concluent Haber et Gutfield par voie de communiqué.
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