Gantz, dont la proposition a été écartée, boycotte la réunion sur la conscription des haredim
Netanyahu souhaite la prorogation de l’exemption des étudiants de yeshiva tandis que les partis ultra-orthodoxes élaborent une proposition
Le ministre membre du cabinet de guerre, Benny Gantz, a annoncé jeudi son intention de boycotter la réunion sur la conscription militaire des ultra-orthodoxes organisée par le Premier ministre Netanyahu, suite au refus du gouvernement d’évoquer sérieusement la proposition de son parti sur la question.
La réunion de jeudi soir entre le Premier ministre, le ministre de la Défense Yoav Gallant, le chef du Shas Aryeh Deri et d’autres membres du gouvernement devait se tenir au lendemain d’une autre réunion en la matière, au cours de laquelle Netanyahu a décidé de demander à la Cour suprême d’accorder un nouveau délai au gouvernement pour justifier la légalité de son refus d’appeler les Haredim sous les drapeaux.
Cela fait des dizaines d’années que les hommes haredim en âge de servir échappent à la conscription en s’inscrivant dans des yeshivot et ce, jusqu’à atteindre l’âge légal de l’exemption militaire par le jeu des reports répétés, d’une année sur l’autre.
Selon les médias israéliens, Netanyahu souhaiterait reporter l’appel sous les drapeaux des membres de la communauté ultra-orthodoxe jusqu’à début juillet, le temps pour la coalition, de rédiger une nouvelle loi sur la conscription.
Par voie de communiqué, le parti Kakhol lavan de Gantz a fait savoir qu’il participerait à toute discussion de fond en la matière, mais qu’il « ne serait pas un partenaire fantoche, au détriment des besoins sécuritaires du pays ».
Le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu a refusé d’évoquer le projet d’appel sous les drapeaux de Gantz et Gadi Eisenkot, lui aussi du parti Kakhol lavan, ou d’autres solutions à la crise de la conscription, a ajouté le parti.
Le projet de Gantz et Eisenkot – qui prévoit une augmentation pluriannuelle progressive de la contribution au service militaire des populations haredim sans donner de chiffres précis – est jusqu’à présent le seul présenté publiquement par des membres de la coalition de Netanyahu.
Il a été « présenté aux représentants des différents partis » mais le gouvernement n’est, pour l’heure, pas parvenu à « tenir une discussion sérieuse » et « aucune alternative » n’a été proposée, explique Kakhol lavan.
Depuis le début de la guerre à Gaza, le gouvernement a mobilisé 287 000 réservistes, avancé l’appel sous les drapeaux de près de 1 300 élèves des académies militaires préparatoires et fait en sorte d’augmenter très sensiblement la durée des périodes de service des conscrits et des réservistes.
Le projet, présenté par les autorités de la Défense le mois dernier, a suscité une vive réaction parmi les députés, indépendamment de leur sensibilité politique, et donné lieu à plusieurs tentatives pour mettre fin aux exemptions de facto au profit des haredim.
Selon la Direction du personnel de Tsahal, près de 66 000 jeunes hommes issus de la communauté haredi ont été exemptés de service militaire l’an dernier, un record absolu.
Aucun des gouvernements successifs de Netanyahu n’est parvenu à faire émerger un consensus sur la question depuis que la Cour Suprême a, en 2017, établi que l’exemption générale de service militaire pour les étudiants ultra-orthodoxes des yeshivot était discriminatoire et inconstitutionnelle, enjoignant aux autorités de trouver une solution en la matière.
La loi autorisant l’exemption a expiré en juin 2023, et le règlement provisoire qui l’a prorogée expire, lui, fin mars, date après laquelle l’armée ne pourra plus exempter les jeunes hommes haredim et sera tenue de les appeler sous les drapeaux.
Le ministre de la Défense, Yoav Gallant, a annoncé mercredi dernier son opposition à la reconduction de l’exemption et son intention d’apporter son soutien à un projet de loi approuvé par les ministres centristes Gantz et Eisenkot, qui ont rejoint le gouvernement pour les besoins de la guerre.
La position de M. Gallant a été perçue comme un obstacle à l’adoption par la coalition d’un projet de loi favorable aux haredim sans pour autant tendre la main aux opposants aux exemptions à grande échelle.
La perspective de l’appel sous les drapeaux de nombreux étudiants de yeshiva effraie les dirigeants ultra-orthodoxes, qui voient dans le service militaire une menace pour leur identité religieuse et leur communauté.
Opposé à l’appel sous les drapeaux des hommes de sa communauté, le grand rabbin séfarade Yitzhak Yosef a récemment déclaré que si les étudiants de yeshiva venaient à être appelés sous les drapeaux, les haredim « iraient à l’étranger », un représentant du parti Yahadout HaTorah ayant pour sa part mis en garde contre le risque de renversement de la coalition en pareille circonstance.
Selon le site d’information ultra-orthodoxe Kikar HaShabbat, des représentants de Yahadout HaTorah et du Shas tentent de mettre sur pieds un projet de loi alternatif afin d’éviter tout changement important dans le système actuel.
Ce projet, qui n’est pas encore finalisé, établirait des quotas de conscription pour les haredim qui étudient à temps plein, ceux pour lesquels « les études sont la profession » demeureraient exemptés, et des unités séparées seraient créées pour les militaires ultra-orthodoxes.
« Pour autant que je sache, il n’y a pas de proposition précise », a déclaré au Times of Israël le député de Yahadout HaTorah Moshe Roth, hier jeudi.
« L’idée de quotas et d’unités séparées n’est pas nouvelle. La question a déjà été évoquée. On peut raisonnablement penser que ce sera la base d’un accord de long terme. »
Un certain nombre de politiciens ultra-orthodoxes, comme le chef de Yahadout HaTorah et ministre du Logement, Yitzhak Goldknopf, se sont récemment dits prêts à évoquer la question de l’appel sous les drapeaux des jeunes hommes haredim qui n’étudient pas.
Interrogé sur la différence entre cette position et le statu quo actuel en vertu duquel ceux qui n’étudient pas sont légalement obligés de faire leur service militaire, Roth a expliqué au Times of Israël, la semaine dernière, qu’il y avait actuellement « beaucoup de jeunes gens inscrits dans des yeshivot » alors même qu’ils ne sont plus étudiants et que « si l’armée [les voulait], ils pourraient être au cœur du compromis ».
Selon une information non sourcée diffusée par la Douzième chaine, cette semaine, le Premier ministre aurait indiqué aux partis haredim qu’il « veillerait à faire le nécessaire, rétroactivement », si la Cour Suprême concluait à l’illégalité de la politique gouvernementale actuelle d’exemption des Haredim – auquel cas les Haredim qui ne servent pas seraient considérés comme en infraction envers la loi, ce qui aurait pour conséquence de les priver – eux et les yeshivot concernées – de tous fonds publics.