Halevi exhorte les jeunes anti-refonte réfractaires au service militaire à s’enrôler
Le chef d'état-major réaffirme son opposition au projet de loi visant à exempter les haredim de la conscription : "notre position est claire, la conscription pour tous"
Emanuel Fabian est le correspondant militaire du Times of Israël.
Le chef d’état-major de l’armée israélienne a répondu mercredi à des centaines d’adolescents qui ont annoncé qu’ils ne s’enrôleraient pas dans l’armée pour protester contre le projet de refonte du système judiciaire du gouvernement et la domination militaire qu’Israël exerce depuis des décennies sur la Cisjordanie.
« Pour les jeunes qui envisagent de ne pas s’enrôler, les choses sont claires : Nous vivrons toujours ici, dans l’État d’Israël. C’est pourquoi nous devons le défendre », a déclaré le chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzi Halevi, lors d’une cérémonie.
« Tous ceux qui envisagent de ne pas s’engager doivent se demander ce qui se passerait si tout le monde se comportait comme eux », a poursuivi Halevi. « En ces jours de controverse, aussi difficiles soient-ils, il ne faut pas perdre le cap. L’armée israélienne est l’endroit où il faut être ».
Quelque 200 élèves de terminale et anciens élèves ont publié une lettre dimanche au célèbre lycée Herzliya Hebrew Gymnasium de Tel Aviv, dans laquelle ils déclaraient qu’ils ne serviraient pas dans l’armée israélienne.
« Nous devons mettre un terme à la refonte judiciaire et cesser de participer à une armée qui sert les implantations et l’occupation », a déclaré Tal Mitnick, 17 ans, l’une des organisatrices de l’initiative « Les jeunes contre la dictature », dans une déclaration vidéo diffusée avant l’événement.
Le directeur de l’école, Zeev Degani, a annoncé sa démission après que le conseil scolaire a déclaré qu’il avait annulé l’événement. La lettre a tout de même été rendue publique.
La mention de la refonte judiciaire dans la lettre est intervenue dans un contexte de protestations massives et d’avertissements de milliers de réservistes qui ont annoncé qu’ils cesseraient de se présenter pour effectuer leur service volontaire, accusant les plans du gouvernement d’affaiblir le système judiciaire de faire d’Israël un pays non démocratique.
Plusieurs petits groupes d’élèves de Terminale ont déjà refusé de servir dans l’armée israélienne pour protester contre la politique du pays à l’égard des Palestiniens. Israël autorise des exemptions de service militaire pour un certain nombre de raisons, notamment des problèmes de santé mentale et médicaux et des objections religieuses, ainsi que pour les Arabes israéliens, mais rarement pour les objecteurs de conscience. Le refus de servir est l’une des questions qui divisent le plus Israël.
Halevi a également déclaré qu’Israël devait maintenir le modèle dit de « l’armée du peuple », dans lequel tous les Israéliens sont censés servir dans l’armée, alors que le gouvernement envisage d’abaisser l’âge auquel les hommes ultra-orthodoxes peuvent obtenir des exemptions permanentes de l’incorporation dans l’armée.
« Il s’agit d’un modèle qui nécessite de recruter dans le plus grand nombre possible de secteurs de la population israélienne. Avec les ajustements nécessaires, il y a une place et un moyen de mettre en œuvre ce modèle dans la société israélienne en développement », a-t-il déclaré.
« Notre position est claire : le recrutement pour tous », a ajouté Halevi.
Halevi avait fait des commentaires similaires en avril, alors que le gouvernement commençait à avancer des plans qui, dans les grandes lignes, exempterait les ultra-orthodoxes du service militaire.
La proposition provisoire du gouvernement abaisserait l’âge de l’exemption définitive de l’armée de 26 ans actuellement à 23 ou 21 ans.
Si les soldats sont généralement incorporés à partir de l’âge de 18 ans, de nombreux étudiants de yeshiva demandent des reports d’incorporation et restent dans des programmes d’études religieuses plus longtemps qu’ils ne le feraient normalement afin d’éviter la conscription, et ce, jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de l’exemption définitive. En abaissant l’âge de l’exemption permanente, le gouvernement espère inciter ces hommes haredi à quitter la yeshiva et à entrer dans la vie active à un âge plus jeune.
La population haredi d’Israël s’oppose massivement à l’accomplissement d’un service civil ou militaire national obligatoire, considérant qu’il s’agit d’un moyen pour les laïcs d’attirer potentiellement ses membres. Certains éléments plus extrémistes de la communauté haredi ont violemment protesté contre la conscription militaire.
Selon les médias israéliens, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a promis aux partis ultra-orthodoxes qu’un mémorandum législatif pour le projet de loi serait présenté lors de la prochaine session d’hiver de la Knesset, en octobre.
Le parti Yahadout HaTorah aurait informé le secrétaire du cabinet, Yossi Fuchs, que sans ce projet de loi, le gouvernement s’effondrerait.
Le chef de Yahadout HaTorah, Yitzhak Goldknopf, a déclaré mercredi au site d’information Kikar Hashabbat que les partis ultra-orthodoxes avaient commis une erreur en n’insistant pas sur l’adoption de la loi sur l’enrôlement avant la formation de l’actuel gouvernement en décembre.
Il a déclaré que l’instruction des rabbins de Yahadout HaTorah, selon laquelle « sans projet de loi, il n’y a pas de gouvernement », est toujours en vigueur, rejetant tout assouplissement de la législation prévue.
Le journaliste a alors posé la question suivante : « Cela signifie-t-il que sans projet de loi, il n’y a pas de gouvernement ? »
« C’est possible, oui, il semble que ce soit le cas », a répondu Goldknopf.
« C’est un engagement du Likud envers nous que rien d’autre ne passera avant le projet de loi », a-t-il dit en présentant un document signé par Fuchs.
Pressé par son interlocuteur, Goldknopf a déclaré que tous les partis haredi avaient dit à Netanyahu qu’ils voteraient contre tout projet de refonte du système judiciaire tant que le projet de loi n’aurait pas été adopté.
Le ministre de la Défense, Yoav Gallant, est depuis longtemps favorable à l’abaissement de l’âge de l’exemption à 23 ans, mais à condition qu’un autre projet de loi soit adopté. Celui-ci accorderait des avantages supplémentaires aux soldats et aux anciens combattants, en accordant aux soldats de combat et aux autres personnes occupant des fonctions essentielles une augmentation de salaire significative, tandis que les soldats occupant des fonctions non essentielles accompliraient moins de temps de service.
Citant une source anonyme familière avec les discussions, la chaîne publique Kan a rapporté mercredi que le ministère des Finances n’avait aucun moyen de financer un tel plan.
En 2017, la Haute Cour de justice a invalidé une loi sur la conscription qui accordait des exemptions générales aux érudits religieux à temps plein. Une série de délais prolongés pour légiférer une nouvelle loi sur l’enrôlement a expiré à la fin du mois de juillet. En juin, Gallant avait ordonné à Tsahal de ne pas enrôler les hommes ultra-orthodoxes avant le 31 mars 2024. D’ici là, la coalition espère qu’un projet de loi exemptant les ultra-orthodoxes sera adopté.