Israël en guerre - Jour 368

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Reportage

L’AP demande des mesures « irréversibles » dans le cadre de l’accord israélo-saoudien

Ramallah propose des mesures qu'Israël ne peut annuler ; mais Washington demande à l'AP de modérer ses demandes et de les adresser directement à Jérusalem

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

L'ambassadeur saoudien Nayef Al-Sudairi (G) présente ses lettres de créance au conseiller diplomatique de l'Autorité palestinienne Majdi al-Khalidi à l'ambassade palestinienne en Jordanie le 12 août 2023. (Crédit : Wafa)
L'ambassadeur saoudien Nayef Al-Sudairi (G) présente ses lettres de créance au conseiller diplomatique de l'Autorité palestinienne Majdi al-Khalidi à l'ambassade palestinienne en Jordanie le 12 août 2023. (Crédit : Wafa)

WASHINGTON – L’Autorité palestinienne (AP) réclame des mesures « irréversibles » pour faire avancer sa revendication d’un État dans le cadre des négociations d’un accord de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite, ont déclaré au Times of Israel un responsable américain, un responsable palestinien et un diplomate arabe de haut rang.

Les mesures proposées comprennent le soutien des États-Unis à la reconnaissance du statut d’État palestinien aux Nations unies, la réouverture par les États-Unis de leur consulat à Jérusalem, qui a toujours été au service des Palestiniens, l’abandon de la législation du Congrès qualifiant l’AP d’organisation terroriste, le transfert du territoire de la Cisjordanie du contrôle israélien au contrôle palestinien et la démolition des avant-postes illégaux en Cisjordanie.

Les trois responsables ont distingué ce type de mesures d’autres proposées dans le passé et considérées par Ramallah comme réversibles, telles que le gel temporaire des implantations israéliennes, la reprise par Israël des négociations de paix avec l’AP ou l’augmentation par Israël du nombre de permis de travail accordés aux Palestiniens.

Les mesures irréversibles font partie d’une liste que l’AP a transmise aux États-Unis et à l’Arabie saoudite, ont indiqué les responsables, ajoutant que les mesures seront discutées plus en détail lors d’une visite du ministre des Affaires civiles de l’AP, Hussein al-Sheikh, à Riyad la semaine prochaine.

Al-Sheikh a discuté de ces mesures avec la secrétaire adjointe américaine aux affaires du Proche-Orient, Barbara Leaf, lors d’une réunion qui s’est tenue dimanche, et aurait reçu une réponse glaciale, selon un responsable palestinien.

Les représentants de Joe Biden ont rejeté les demandes palestiniennes adressées aux États-Unis, en invoquant la législation du Congrès qui obligerait les États-Unis à cesser de financer les Nations unies si les Palestiniens obtenaient le statut de membre à part entière de l’organisation.

Le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed bin Salman, à gauche, rencontre le secrétaire d’État américain Antony Blinken à Djeddah le 7 juin 2023. (Crédit : Amer Hilabi/Pool Photo via AP)

Pour ce qui en est du consulat à Jérusalem – qui servait de mission de facto aux Palestiniens avant que l’ancien président Donald Trump ne le ferme en 2019 – les responsables américains ont fait valoir qu’un certain degré d’approbation israélienne était nécessaire, et que le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu avait refusé d’en envisager l’idée.

La suppression de la loi de 1987 qui considère l’Organisation de libération de la Palestine et ses affiliés comme des organisations terroristes n’a pas non plus été retenue par l’administration Biden, compte tenu des ramifications politiques dans un Washington toujours divisé.

Les États-Unis ont encouragé l’AP à modifier ses exigences et à les adresser plutôt à Israël, en avançant l’idée d’un transfert de la zone C de la Cisjordanie, qui est sous contrôle israélien, vers la zone B ou la zone A, où Ramallah a plus d’autorité, comme une solution plus réaliste, d’après le responsable palestinien.

L’actuel gouvernement israélien a, quant à lui, intensifié la démolition de constructions palestiniennes dans la zone C, dans le cadre de ce qu’il a décrit comme une « bataille » pour ce territoire. La cession de ce même territoire à l’AP se heurtera donc probablement à une résistance massive de la part des partenaires d’extrême-droite de la coalition de Netanyahu.

Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a déclaré lundi qu’Israël « ne fera aucune concession aux Palestiniens. C’est de la fiction ».

Le responsable palestinien qui a parlé au Times of Israel a exprimé sa frustration face à la réaction américaine aux propositions de Ramallah.

Le leader du parti HaTzionout HaDatit, le député Bezalel Smotrich, au centre, et des membres de son parti, dans l’implantation d’Efrat en Cisjordanie, le 26 octobre 2022. (Crédit : Gershon Elinson/Flash90)

« Ils sont prêts à discuter de gestes significatifs pour l’Arabie saoudite, mais leur unique réponse à nos propositions est : ‘ce n’est pas possible' ».

De fait, les hauts responsables de l’administration Biden semblent envisager les demandes saoudiennes de normalisation des relations avec Israël, notamment un traité de sécurité mutuelle similaire à celui de l’OTAN qui obligerait les États-Unis à se porter à la défense de Riyad en cas d’attaque, un programme nucléaire civil soutenu par les États-Unis en Arabie saoudite et l’autorisation pour le royaume du Golfe d’acheter des armes plus perfectionnées à Washington.

Une autre source palestinienne au fait du dossier a fait remarquer que l’AP avait pris soin de ne pas qualifier sa liste de « demandes » afin d’éviter d’être considérée comme directement complice d’un éventuel accord de normalisation.

La source a également indiqué que Ramallah avait modifié son approche concernant les accords de normalisation potentiels entre Israël et ses voisins arabes, ne boycottant plus complètement le processus et ne condamnant plus publiquement les pays qui établissent des relations diplomatiques avec Israël.

L’AP cherche plutôt à peser sur le processus en distinguant les divers liens bilatéraux qu’elle entretient avec des pays comme l’Arabie saoudite du dossier de la normalisation, dans le but de les renforcer tous deux dans le cadre du processus.

Majdi al-Khalidi, conseiller diplomatique du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. (Crédit : Wafa)

Ryad aurait proposé de renouveler son aide à l’AP, afin d’encourager Ramallah à soutenir les efforts de normalisation avec Israël.

Le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman a déclaré en avril au président de l’AP, Mahmoud Abbas, que Ryad était prêt à reprendre le programme d’aide, selon le Wall Street Journal mardi. L’aide avait été complètement gelée en 2016 sur fond d’allégations de corruption au sein de l’AP et de son refus d’organiser des élections présidentielles depuis 2005.

L’AP a également demandé à l’Arabie saoudite d’établir un consulat à Jérusalem-Est, a déclaré le responsable palestinien. Ryad aurait accepté un compromis avec Ramallah en nommant son ambassadeur en Jordanie ambassadeur non résident en Palestine et consul général à Jérusalem au début du mois.

Il convient de noter que cette mesure n’a pas été coordonnée avec l’administration Biden, a souligné le responsable palestinien.

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