L’AP dit travailler avec Washington à l’après-guerre à Gaza, pour y inclure le Hamas
Le Premier ministre Shtayyeh a dit à Bloomberg qu'Israël ne pourrait pas éradiquer le groupe terroriste : « Le Hamas est au Liban, les dirigeants du Hamas sont au Qatar, ils sont en Cisjordanie »
Selon Bloomberg, Ramallah travaillerait avec l’administration Biden à un projet de gestion de la bande de Gaza après-guerre, et le Premier ministre de l’Autorité palestinienne espère que le Hamas prendra part au processus.
Citant un haut responsable palestinien, Bloomberg a indiqué que des responsables américains se sont récemment entretenus avec le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammed Shtayyeh, au sujet d’un plan pour la bande de Gazaau lendemain de la guerre.
« Nous ne partons pas d’un plan militaire israélien », a déclaré Shtayyeh à Bloomberg. « La population est là. Il faut mettre en place un mécanisme, et c’est ce sur quoi nous travaillons avec la communauté internationale. »
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a, à plusieurs reprises, rejeté l’idée que l’Autorité palestinienne dirige Gaza dans l’après-guerre, l’accusant d’encourager le terrorisme à travers l’enseignement, le versement d’allocations aux terroristes ou l’absence de condamnation des atrocités commises par le Hamas, le 7 octobre dernier.
Israël s’est donné pour mission éradiquer le groupe terroriste suite à ses attaques macabres contre le sud d’Israël, le 7 octobre, lorsque 3 000 terroristes ont franchi la frontière entre Israël et Gaza, pour tuer 1 200 personnes et prendre 240 otages, pour la plupart des civils.
Shtayyeh a dit qu’Israël ne pourrait pas éradiquer le Hamas. « Le Hamas ne se trouve pas seulement à Gaza. Le Hamas est au Liban, tout le monde sait que les dirigeants du Hamas sont au Qatar et qu’ils sont ici aussi, en Cisjordanie », a-t-il déclaré, se disant impatient de travailler avec l’organisation terroriste malgré le massacre du 7 octobre, qu’il a également refusé de condamner.
Un haut conseiller du chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a déclaré mardi au Times of Israël que le chef de l’Autorité palestinienne avait condamné le Hamas à l’occasion de « chaque appel et de chaque réunion » avec les chefs d’Etat étrangers depuis l’attaque choc du groupe contre Israël, mais qu’il ne le ferait pas publiquement tant que durerait la guerre à Gaza.
« Si Israël n’avait pas lancé son agression contre Gaza, le président Abbas aurait publiquement condamné le Hamas à plusieurs reprises, mais maintenant que l’agression a commencé, lui demander – à lui ou à tout dirigeant palestinien – de condamner publiquement le Hamas n’a pas de sens », a déclaré Mahmoud Habbash.
Israël a réagi à l’assaut du 7 octobre par des frappes aériennes contre les infrastructures du Hamas dans la bande de Gaza, suivis d’une offensive terrestre, d’abord dans le nord puis progressivement dans le sud de Gaza. Selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas, plus de 17 000 Palestiniens ont été tués lors de cette offensive de Tsahal. Ces chiffres sont invérifiables, mais ce bilan est relativement conforme aux estimations israéliennes, qui précise que plus de 5 000 victimes étaient membres du Hamas.
L’administration Biden soutient le projet d’Israël d’éliminer le Hamas, mais souhaite que l’Autorité palestinienne prenne sa place afin de placer la Cisjordanie et Gaza sous une seule entité politique et d’ouvrir la voie à une solution à deux États.
Les États-Unis concèdent que cette Autorité palestinienne – qui n’a pas organisé d’élections depuis 17 ans et dont la popularité est en chute libre, pour des histoires de corruption et la présence israélienne croissante en Cisjordanie – devra être « remise au goût du jour » avant de pouvoir assumer la responsabilité de la bande de Gaza.
« Le Hamas avant le 7 octobre, c’est une chose, après, c’en est une autre », a déclaré Shtayyeh. « S’ils sont prêts à conclure un accord et accepter la plate-forme politique de l’OLP, alors nous pourrons discuter. Les Palestiniens ne devraient pas être divisés. »
Toujours selon Bloomberg, l’administration Biden aurait souligné jeudi que l’Autorité palestinienne devait être « revitalisée » dans l’après-guerre avant de revenir gouverner Gaza.
Interrogé sur la question, pour savoir si cela signifiait qu’Abbas, pour la 18e année consécutive au pouvoir en vertu d’un mandat de quatre ans, devrait démissionner, le conseiller adjoint à la sécurité nationale des États-Unis, Jon Finer, a déclaré au Forum sur la sécurité d’Aspen : « pas nécessairement ».
« Il n’y a pas vraiment d’alternative en ce moment, en termes d’entité politique palestinienne organisée et institutionnalisée », a souligné Finer.
Finer a toutefois précisé que Ramallah « coopérait très étroitement avec l’armée israélienne » pour maintenir l’ordre en Cisjordanie, même si elle est extrêmement impopulaire en interne.
L’armée israélienne a interpellé en Cisjordanie plus de 2 000 Palestiniens qui étaient activement recherchés depuis le 7 octobre dernier, 1 100 d’entre eux affiliés au Hamas. Selon le ministère de la Santé de l’Autorité palestinienne, ce ne sont pas moins de 200 Palestiniens de Cisjordanie qui ont été tués par les forces israéliennes et, dans quelques cas, par des résidents d’implantations.
Ce mercredi, Netanyahu a quasiment écarté l’éventualité d’un retour de l’Autorité palestinienne à Gaza. « Ceux qui inculquent le terrorisme à leurs enfants, financent le terrorisme et aident les familles des terroristes ne pourront pas gouverner Gaza après l’élimination du Hamas », a-t-il tweeté, faisant référence aux prestations sociales de l’AP, qui comprennent des allocations aux terroristes palestiniens prisonniers et à leurs proches.
Finer n’a pas semblé déconcerté par les propos de Netanyahu.
« J’aimerais mettre en garde… contre la tentation de prendre une déclaration au pied de la lettre… et d’en faire une déclaration définitive, insusceptible de recours. Si c’était le cas, il n’y aurait pas d’aide humanitaire pour Gaza, aucun détenteur de passeport étranger ne sortirait de Gaza et il n’y aurait pas davantage de trêve pour permettre la libération des otages », a-t-il déclaré à propos des initiatives américaines – couronnées de succès – qui ont fait évoluer les positions des parties prenantes.
Finer a par ailleurs déclaré comprendre que Netanyahu s’opposait en fait au retour à Gaza de l’Autorité palestinienne « telle qu’elle est actuellement ». Les États-Unis s’y opposent également, raison pour laquelle ils appellent à la « revitalisation » de Ramallah, a-t-il déclaré.
Il a néanmoins insisté sur le fait que « l’Autorité palestinienne va devoir jouer un rôle important, non seulement en Cisjordanie, mais aussi à Gaza ».
Jacob Magid a contribué à cet article.