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Lapid : Benjamin Netanyahu savait depuis des mois que se profilait « un 7 octobre »

Selon le chef de l'opposition, ce massacre aurait pu être évité, mais le Premier ministre n'aurait pas pris la mesure du danger lorsqu'il a été informé des risques ; le bureau de Netanyahu réfute

Le chef de l'opposition Yaïr Lapid témoignant devant la commission d'enquête citoyenne non officielle sur l'incapacité à prévenir et à répondre au pogrom du 7 octobre perpétré par le Hamas, le 29 août 2024. (Crédit : Capture d'écran)
Le chef de l'opposition Yaïr Lapid témoignant devant la commission d'enquête citoyenne non officielle sur l'incapacité à prévenir et à répondre au pogrom du 7 octobre perpétré par le Hamas, le 29 août 2024. (Crédit : Capture d'écran)

Bien qu’il ait été averti depuis plus d’un an que les politiques de son gouvernement avaient affaibli la capacité de dissuasion d’Israël et que les groupes terroristes pensaient que leur « moment était venu », le Premier ministre Benjamin Netanyahu n’a pas agi et a même semblé « ennuyé et indifférent à la question » lors d’un briefing conjoint sur le sujet, a affirmé jeudi le chef de l’opposition Yaïr Lapid.

S’adressant à une commission d’enquête civile indépendante à Tel Aviv sur l’assaut et les massacres perpétrés par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre, le chef du parti Yesh Atid et ancien Premier ministre a détaillé les nombreuses occasions où des responsables de l’establishment de la Sécurité ont dit à Netanyahu que les politiques menées par son gouvernement avaient érodé la capacité de dissuasion d’Israël et que les ennemis d’Israël y voyaient une faiblesse et une occasion de s’imposer.

Lapid a déclaré qu’il était déterminé à « démystifier l’affirmation » selon laquelle l’échelon politique n’avait pas été informé du fait que le Hamas n’était plus dissuadé d’attaquer Israël. Il a affirmé qu’il avait été mis au courant, tout comme le Premier ministre. Tout en soulignant que « le 7 octobre, il n’y a pas eu d’avertissement tactique et concret concernant le franchissement de la clôture », il a indiqué qu’il y avait eu « des avertissements stratégiques répétés concernant une éruption de violence et la perte de la capacité de dissuasion ».

« Il est faux de dire que l’appareil politique n’a pas été alerté de la catastrophe du 7 octobre. Pendant des mois, le Premier ministre et les ministres ont reçu une série d’avertissements graves et sans précédent, et n’ont rien fait », a déclaré Lapid aux membres de la commission, récemment créée par des groupes représentant les survivants et les victimes du pogrom, à la suite du refus de Netanyahu de mettre en place une enquête officielle d’État.

Lapid s’est souvenu avoir reçu un briefing de sécurité du chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet, Ronen Bar, la veille du vote à la Knesset de la loi du « caractère raisonnable » en juillet 2023, au cours duquel Bar lui avait fourni des « avertissements sans précédent » sur « les conséquences du ‘coup d’État’ sur la sécurité et les dissensions internes qu’il provoquait ».

Le projet de loi du « caractère raisonnable » faisait partie de la refonte judiciaire largement controversée que le gouvernement avait proposée l’année dernière et qui avait été qualifiée par certains opposants comme une tentative de coup d’État.

Le chef de l’opposition Yaïr Lapid témoignant devant la commission d’enquête citoyenne non officielle sur l’incapacité à prévenir et à répondre au pogrom du 7 octobre perpétré par le Hamas, le 29 août 2024. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)

« À partir du milieu de l’année 2023, de plus en plus de voix se sont élevées au sein des groupes terroristes pour dire que le moment qu’ils attendaient était arrivé, et ces voix sont apparues dans les évaluations des agences de renseignement et dans les discussions au sein de l’armée israélienne, du Shin Bet et [l’agence de renseignement] du Mossad », a déclaré Lapid.

Le leader de l’opposition s’est souvenu avoir demandé à Bar « si ces avertissements avaient également été présentés au Premier ministre et aux ministres du cabinet, et la réponse avait été : ‘Bien sûr qu’ils l’ont été’ ».

« Le président [Isaac] Herzog a également reçu des mises à jour concernant le risque croissant pour la sécurité et l’a exprimé lors de ses entretiens avec le Premier ministre », a poursuivi Lapid, ajoutant que le ministre de la Défense Yoav Gallant avait « essayé de parvenir à un accord avec nous » sur la législation relative à la refonte du système judiciaire en raison de ses préoccupations concernant le préjudice causé à la sécurité nationale par la forte polarisation de la société sur cette question.

Gallant s’était déclaré peu favorable à la refonte suite aux menaces des réservistes selon lesquelles ils ne pourraient pas servir dans un Israël non démocratique, ce qui l’avait incité à avertir que les réformes proposées représentaient « une menace claire, immédiate et tangible pour la sécurité de l’État ».

En mars dernier, Netanyahu avait annoncé qu’il renvoyait Gallant pour avoir lancé cet avertissement publiquement ; il avait annulé le renvoi du ministre de la Défense deux semaines plus tard, sous l’effet d’une forte pression de l’opinion publique.

Selon Lapid, jeudi, le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi, a cherché à rencontrer Netanyahu au sujet des répercussions sur la sécurité nationale de la division en Israël concernant la refonte du système judiciaire, mais il s’était heurté à un refus. Halevi avait donc décidé d’écrire à Netanyahu pour lui faire part des dangers.

Bien qu’il n’ait pas lu la missive de Halevi, Lapid a déclaré que « la seule raison d’envoyer une telle lettre serait de documenter un avertissement de sécurité resté sans réponse ».

Lapid a également cité un briefing conjoint du 21 août 2023 avec le secrétaire militaire de Netanyahu, le général de brigade Avi Gil, dans lequel le haut fonctionnaire de la Défense avait dit à Netanyahu et à Lapid que l’Iran et les groupes terroristes au Liban, en Cisjordanie et à Gaza « ont tous identifié une faiblesse, une division interne, des tensions et une perte de préparation de l’armée, ainsi qu’une crise naissante avec les Américains ».

Yaïr Lapid (à gauche), Avi Gil (au centre) et Benjamin Netanyahu lors d’une réunion aux quartiers généraux de l’armée de la Kirya, à Tel Aviv, le 9 avril 2023. (Crédit : Document du gouvernement)

La présentation de Gil, qui synthétise des informations provenant de tout l’establishment de la Défense, indiquait que les ennemis d’Israël voyaient une occasion de lui nuire, selon Lapid.

Bien qu’il considère cet avertissement comme dramatique, Lapid a déclaré que « le Premier ministre – et je ne donne ici que mon ressenti personnel, qui peut donc être contesté – a semblé ennuyé et indifférent à la question, et n’a fait aucun commentaire à ce sujet ».

Lapid a rappelé son briefing conjoint avec Netanyahu lors d’une interview accordée au Times of Israel la semaine dernière, dans laquelle il a déclaré que « tous les signes, toutes les balises rouges, tous les avertissements étaient là mais que Netanyahu les a tous ignorés ».

Lors de son témoignage jeudi, Lapid a maintenu que si « la discussion sur les motivations ou l’état mental du Premier ministre Netanyahu ne me regarde pas », il estime que « la définition du rôle du Premier ministre et du cabinet – peut-être la définition la plus critique de ce rôle – est le devoir de tout arrêter face à ce type et à cette qualité de renseignements et d’informations, et de mobiliser l’ensemble de l’appareil pour mettre fin à la menace ».

Des Palestiniens du côté israélien de la barrière frontalière de Gaza lors de l’invasion et du pogrom menés par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre 2023. (Crédit : Mohammed Fayq Abu Mostafa/REUTERS)

Dans les semaines qui ont suivi le briefing de Gil, a poursuivi Lapid, il a consulté des documents confidentiels fournis à la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset qui indiquaient que la capacité de dissuasion s’était bel et bien érodée. Il a vu des documents hautement confidentiels, mis à sa disposition en sa qualité d’ancien Premier ministre.

L’un des avertissements, qu’il a présenté à la commission moins d’un mois avant l’assaut du Hamas, « était sans équivoque : la capacité de dissuasion d’Israël s’est considérablement érodée ; nos ennemis pensent qu’ils ont une rare occasion de nous faire du mal », s’est souvenu Lapid, ajoutant que cela montrait qu’Israël avait atteint « le plus haut niveau de danger ».

Les informations qu’il a vues étaient suffisamment sérieuses pour inciter Lapid à tenir une conférence de presse le 20 septembre, au cours de laquelle il a mis en garde contre l’imminence d’une « confrontation sur plusieurs fronts », a expliqué Lapid à la commission d’enquête. Il a cité des extraits de cette conférence de presse, notamment ses remarques sur « une confrontation sur plusieurs fronts », et sur le fait que « les événements récents à la frontière de Gaza sont précisément du type de ceux qui, dans le passé, ont conduit à des cycles de combat ».

Netanyahu, a-t-il accusé jeudi, « savait que la capacité de dissuasion était affaiblie et que les groupes terroristes observaient [les failles dans] la société israélienne ». Le Premier ministre était également conscient du fait qu’il avait nommé des ministres « qui ne devraient pas s’approcher de la sécurité sacrée d’Israël », à savoir les ministres d’extrême-droite des Finances, Bezalel Smotrich, et de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir.

Netanyahu savait que l’Iran, le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah, le Hamas et le Jihad islamique palestinien voyaient « une opportunité », a déclaré Lapid.

« Il savait qu’il était de la responsabilité du gouvernement d’agir en fonction des avertissements et il ne l’a pas fait. »

Bien qu’il ait réservé la plupart de ses critiques au gouvernement actuel, Lapid a également eu des mots durs pour l’establishment de la Défense, déclarant « qu’au lieu d’agir, il a attendu les instructions de l’échelon politique », une approche qu’il a jugée « inexcusable ».

Néanmoins, Lapid a souligné que la responsabilité de l’armée dans le désastre « n’annule pas la responsabilité de l’échelon politique » dans la pire erreur de l’histoire israélienne, qu’il a qualifiée « d’évitable ».

Des réservistes de l’armée israélienne protestant contre le projet du gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de réformer le système judiciaire, sur une autoroute reliant Tel Aviv à Jérusalem, le 9 février 2023. (Crédit : Ohad Zwigenberg/AP)

« On m’a souvent demandé si je pensais que la catastrophe du 7 octobre aurait pu se produire sous ma garde, lorsque j’étais Premier ministre. La réponse est non », a-t-il affirmé. « Même en tant que chef de l’opposition, je n’ai pas ignoré [les avertissements] et, face à des avertissements moins importants, je m’étais lancé en août 2022 dans une opération proactive visant à éliminer les commandants du Jihad islamique palestinien dans la bande de Gaza. »

Lapid a noté que le Hamas avait utilisé des véhicules commerciaux et des fusils d’assaut Kalachnikov largement disponibles pour mener son attaque, affirmant que « le changement spectaculaire n’était pas dans les capacités, mais dans l’opportunité » et qu’il n’y a « aucun doute qu’une armée préparée et un échelon politique vigilant auraient pu empêcher » le 7 octobre.

« Le Hezbollah a beaucoup plus de capacités dans le nord en termes d’armes et de préparation que le Hamas. La discussion sur le renforcement des capacités fait partie de la tentative de rejeter la responsabilité du manque de préparation », a-t-il déclaré.

Tout en soulignant l’échec des agences de renseignement et le redéploiement d’un grand nombre de soldats en Cisjordanie avant le 7 octobre, Lapid a rejeté la responsabilité principale sur Netanyahu, qui, selon lui, a élaboré « un concept de gestion des conflits » dans lequel nous « partons du postulat que le conflit peut être éternellement maîtrisé, et l’un des moyens d’y parvenir est de transformer le Hamas en une force opposée à l’Autorité palestinienne, afin de maintenir un équilibre des pouvoirs entre eux ».

« Sa conception erronée était qu’il serait capable de diriger et de gérer un groupe terroriste islamique pour ses objectifs politiques et stratégiques sans aucune conséquence », a allégué Lapid, qualifiant cette erreur de « la plus grave erreur politique et sécuritaire de l’histoire du pays » et « d’une sorte de vœu pieux ».

Répondant à une question sur la politique de Netanyahu consistant à laisser des valises qataries contenant des millions en espèces entrer à Gaza par les points de passage israéliens depuis 2018, Lapid a déclaré que son gouvernement éphémère avait « arrêté les sacs d’argent » et, à la place, « transféré l’argent à l’ONU, et l’ONU avait acheté des bons d’alimentation ».

« Quelqu’un m’a demandé il n’y a pas longtemps lors d’une émission télévisée ce que j’aurais fait si j’avais été Premier ministre le 7 octobre ; j’ai dit que j’aurais démissionné le 8 octobre », a-t-il affirmé.

« Il n’existe aucun pays au monde où le Premier ministre, le chef de l’État, est responsable de la plus grande catastrophe civile de l’histoire du pays, et de la plus grande catastrophe sécuritaire de l’histoire du pays, et où il est également accusé de corruption criminelle, et où il est toujours Premier ministre. »

Le chef d’Yisrael Beytenu et ancien ministre de la Défense, Avigdor Liberman, témoignant devant une commission civile indépendante chargée d’enquêter sur les événements ayant conduit au pogrom du 7 octobre, le 18 août 2024. (Crédit : Commission civile d’enquête)

Netanyahu n’a pas reconnu publiquement sa responsabilité personnelle directe dans les massacres du 7 octobre et a refusé la création d’une commission d’enquête nationale sur la catastrophe.

Le bureau du Premier ministre a publié une réponse cinglante au témoignage de Lapid, l’accusant de « mentir à nouveau » et affirmant que Netanyahu « n’avait reçu aucun avertissement concernant la guerre à Gaza – ni un mois avant, ni même une heure avant le 7 octobre. C’est le contraire qui est vrai et les protocoles le prouvent ».

« Lapid, qui a fait venir des travailleurs de Gaza et a donné du gaz gratuit à [Hassan] Nasrallah, chef du Hezbollah, tout en promettant que cela empêcherait la guerre, est le dernier à pouvoir prêcher en matière de sécurité », a-t-il ajouté, faisant référence à un accord maritime avec le Liban signé par Lapid en 2022 sous l’égide des États-Unis.

Le témoignage de Lapid a suivi celui de l’ancien Premier ministre Ehud Olmert, qui a accusé Netanyahu de faire taire les voix dissidentes au sein de l’establishment de la Sécurité, et celui de l’ancien ministre de la Défense Avigdor Liberman, qui a rappelé qu’il avait mis en garde contre une attaque du Hamas similaire à celle qui s’est produite en octobre dernier dès 2016.

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