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Le deuil à distance, Israël marque Yom Hazikaron dans l’ombre du coronavirus

La police a pour mission de décourager les familles de se rendre dans les cimetières ; les sirènes ont retenti à 11h en mémoire de soldats tombés et des victimes du terrorisme

Une femme israélienne observe la rue depuis la fenêtre de sa maison dans un bâtiment décoré par des drapeaux nationaux dans la ville du sud d'Ashkelon, le 27 avril 2020. (MENAHEM KAHANA / AFP)
Une femme israélienne observe la rue depuis la fenêtre de sa maison dans un bâtiment décoré par des drapeaux nationaux dans la ville du sud d'Ashkelon, le 27 avril 2020. (MENAHEM KAHANA / AFP)

Mardi, les Israéliens marquaient Yom HaZikaron dans le contexte de l’épidémie de COVID-19. Les cimetières militaires étaient fermés pour la première fois dans l’histoire du pays et les cérémonies officielles se tenaient sans public. On a demandé aux familles endeuillées de se souvenir de leurs proches depuis chez elles, seules.

Yom HaZikaron a commencé lundi soir. Une sirène d’alerte aérienne résonné à 20h pour marquer une minute de silence en l’honneur des soldats tombés au combat et des victimes du terrorisme. Les voitures se sont arrêtées sur les routes et de nombreux Israéliens sont sortis sur leurs balcons et dans leurs cours pour incliner leurs têtes en signe de respect.

A 11h mardi, les sirènes ont retenti pour la deuxième fois pendant deux minutes à travers le pays. L’Etat juif arrive à un autre moment chargé en émotions avec Yom HaAtsmaout qui va commencer mardi soir et sera également marqué de manière restreinte.

Avec plus de 23 000 victimes de guerre ou de batailles et plus de 4 000 victimes terroristes, peu de citoyens israéliens n’ont pas été touchés par la violence. Les cimetières sont normalement remplis avec les familles et les amis qui rendent hommage à leurs êtres chers disparus. Le gouvernement, l’armée et des groupes privés organisent des cérémonies sobres en l’honneur de soldats tombés au combat.

Pourtant, alors que le gouvernement a imposé des restrictions par crainte d’une recrudescence de l’épidémie de coronavirus, les familles, les amis, les camarades des soldats défunts et des victimes du terrorisme ont été contraints de modifier radicalement leurs habitudes de recueillement cette année.

Lundi après-midi, les cimetières militaires du pays ont été fermés afin d’empêcher les familles de s’y rendre pour Yom Hazikaron – même si un petit nombre de personnes a quand même tenté de le faire mardi matin.

La police a été déployée pour bloquer l’accès aux routes et aux entrées des cimetières militaires et des sites de mémoire. Les officiers ont reçu l’instruction de seulement décourager les familles, sans empêcher physiquement les gens d’aller sur les tombes de leurs proches.

Alors que les familles et amis endeuillés n’ont pas pu se rendre sur les tombes de soldats défunts pour Yom HaZikaron, des soldats israéliens sont allés sur chaque tombe. Ils y ont placé un petit drapeau israélien marqué d’un ruban noir, une fleur et une bougie du souvenir sur chaque tombe militaire dans le pays.

Des soldats et policiers israéliens déposent des fleurs et des drapeaux israéliens sur les tombes de soldats décédés au cimetière militaire de Kiryat Shaul, le 27 avril 2020. (Tomer Neuberg/Flash90)

Les rassemblements de plusieurs personnes étaient interdits partout, tout comme les déplacements d’une ville à l’autre. L’objectif était d’empêcher les familles et les amis de se réunir pour commémorer leurs proches.

A la place, des particuliers – mais aussi des grandes organisations comme l’Agence juive, le Centre de soldats seuls, Yad Lebanim et d’autres – ont organisé des cérémonies à distance. Les participants pouvaient les suivre via des réseaux sociaux ou l’application de visio-conférence Zoom.

Tandis que les deux cérémonies annuelles nationales de commémoration – une pour les soldats tombés, et l’autre pour les victimes du terrorisme – étaient maintenues, elles devaient se dérouler sans public. Les officiels israéliens présents devaient porter des masques.

Dans une nouvelle initiative cette année, des avions de l’Armée de l’Air devaient survoler les deux cérémonies comme pour « saluer » les soldats tombés. Symboliquement, un avion allait manquer à la formation, a expliqué l’armée.

Le nombre de victimes israéliennes de la guerre, qui comprend les soldats, les policiers, les officiers du Shin Bet et du Mossad tués en service, se situe à 23 816, selon les chiffres publiés par le ministère de la Défense vendredi. On commémore également les 4 166 autres victimes du terrorisme. Les deux chiffres remontent à 1860, avant la formation de l’Etat d’Israël.

Depuis Yom Hazikaron de l’année dernière, 75 nouveaux noms de soldats et de membres de forces de sécurité ont été ajoutés à la liste des victimes. Quarante-deux étaient des soldats et des policiers israéliens, et 33 étaient des vétérans handicapés qui sont décédés à la suite de complications de blessures subies pendant leur service.

Les chiffres incluent tous les soldats, policiers ou agents des services de renseignement qui sont morts pendant leur service l’année dernière, y compris les victimes d’accidents, de suicides et de maladie.

Rina Shnerb, 17 ans, a été tuée dans un attentat terroriste en Cisjordanie le 23 août 2019. (Autorisation de la famille)

Il y a eu une seule victime du terrorisme depuis le dernier Yom HaZikaron. Rina Shnerb, âgée de 17 ans, a été tuée lors d’une attaque à la bombe alors qu’elle faisait une randonnée avec sa famille en Cisjordanie.

Mardi matin, avant les cérémonies nationales, le service de sécurité de Shin Bet a tenu son propre service mémoriel, en le diffusant en ligne pour ses agents.

« Ce jour spécial dispose également de l’objectif supplémentaire important pour nous de renforcer notre devoir. Notre devoir de continuer à suivre l’exemple de ceux qui ont sacrifié leurs vies pour protéger notre pays. Notre devoir de mémoire comme une valeur organisationnelle, l’éthique de notre société et de la démocratie israélienne », a déclaré Nadav Argaman, le chef du Shin Bet, dont l’organisation est principalement responsable du contre-terrorisme.

Lundi soir, le pays a commencé Yom HaZikaron avec sa cérémonie annuelle organisée au mur Occidental dans la Vieille Ville, qui a eu lieu cette année sans public.

Dans son discours télévisé, la voix du président Reuven Rivlin s’est brisée quand il s’est adressé aux familles endeuillées absentes.

« Cette année, vous êtes seuls dans vos chambres, en écoutant les échos de leurs voix. Nous ne pouvons pas venir à vos maisons, nous ne pouvons pas être à vos côtés dans les cimetières militaires. Nous ne pouvons pas vous embrasser », a-t-il dit.

La sirène « a brisé le silence et nos coeurs », a-t-il ajouté.

S’exprimant après Rivlin, le chef de l’Armée israélienne Aviv Kohavi a souligné la difficulté de commémorer Yom HaZikaron en période de coronavirus.

https://www.facebook.com/watch/?v=586086495595789

« Familles endeuillées, même maintenant et malgré la distance, tout Israël est à vous côtés, à travers tous types d’écrans. Chaque personne chez elle s’arrête, compatit et consacre du temps à la mémoire de vos fils et filles », a déclaré Kohavi.

« Ces sont des moments compliqués, avec la crainte et la préoccupation d’un danger persistant. Une période de crise est comme une période de guerre, elle met de côté les éléments mineurs et triviaux et fait ressortir les choses importantes, éthiques et la dimension sacrée de la vie ».

Dans son discours, Kohavi a également prévenu les ennemis d’Israël que l’armée serait aussi présente pour les combattre.

« Contre les ennemis et les armées de terreur qui n’ont de cesse de faire du mal aux citoyens de l’Etat d’Israël – Tsahal est là : prête, puissante et agressive. Nous serons là pour chaque mission, préparés et déterminés, et nous voyons la victoire comme la seule manière de parvenir à notre but », a déclaré le chef de l’armée.

Des soldats portant des masques sont au garde à vous à la cérémonie nationale d’ouverture pour Yom HaZikaron en l’honneur des soldats tombés et des victimes du terrorisme, au mur Occidental, le 27 avril 2020. (Amos Ben Gershom / GPO)

Après la cérémonie de lundi soir, de nombreux Israéliens sont sortis sur leurs balcons pour entonner l’Hatikva, l’hymne national, dans un moment d’unité nationale.

Mardi soir, à la fin de Yom HaZikaron, les événements et les célébrations pour Yom HaAtsamout seront lancés, avec la cérémonie annuelle d’allumage de la torche sur le mont Herzl à Jérusalem. L’édition de cette année aura lieu sans public. Afin d’éviter les rassemblements pour Yom HaAtsamout, le gouvernement a ordonné un confinement national, similaire à celui imposé avant la fête de Pessah plus tôt ce mois, pour contraindre la population à rester chez elle.

Cela tranchera nettement avec la façon dont la plupart des Israéliens célèbrent la fête, avec des barbecues familiaux et des sorties sur les plages et dans les parcs du pays.

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