Israël en guerre - Jour 495

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Le film « 5 septembre » raconte l’attentat de Munich de 1972, sous l’angle des médias

Le nouveau film porte un autre regard que celui du "Munich" de Spielberg sur le massacre des athlètes israéliens aux JO et se focalise sur la couverture médiatique des événements

Sean Penn, John Ira Palmer, John Wildermuth, Tim Fehlbaum et Jake Kasdan parlent, sur scène, lors d’une séance de questions-réponses à propos du film « 5 septembre » dans les locaux de l’Agence Creative Artists, le 8 décembre 2024, à Los Angeles en Californie. (Phillip Faraone / Getty Images via AFP)
Sean Penn, John Ira Palmer, John Wildermuth, Tim Fehlbaum et Jake Kasdan parlent, sur scène, lors d’une séance de questions-réponses à propos du film « 5 septembre » dans les locaux de l’Agence Creative Artists, le 8 décembre 2024, à Los Angeles en Californie. (Phillip Faraone / Getty Images via AFP)

JTA – Dans « September 5 [NDLT : 5 septembre] », le nouveau film consacré à l’enlèvement et au meurtre de 11 athlètes et entraîneurs israéliens aux Jeux olympiques de Munich, en 1972, il y a comme des échos du pogrom commis par le Hamas en Israël le 7 octobre, plus de 51 ans plus tard.

Dans les deux cas, on a affaire à des tragédies historiques autour de l’assassinat d’Israéliens par des terroristes palestiniens, à des prises d’otages – de ressortissants américains, pour certains d’entre eux – et à une inscription dans le temps autour d’une date qui se suffit à elle-même.

Mais « September 5 » – qui sort en France début février et suscite déjà des espoirs de récompenses – n’est en rien une réaction au 7 octobre. Au moment de l’attaque de 2023, lorsque les terroristes du Hamas ont envahi le sud d’Israël pour y tuer près de 1 200 personnes et faire 251 otages, le film avait en effet déjà été tourné et était en phase de post-production.

« Cela aura sans doute un effet sur la façon dont le public va recevoir le film, mais notre film parle clairement d’un événement historique précis, et même d’un moment de l’histoire des médias, d’une sorte de tournant », explique Tim Fehlbaum, le réalisateur du film, dans le cadre d’une interview.

« J’espère que ce prisme historique va donner envie au public de réfléchir à la façon dont nous consommons aujourd’hui l’information, comme à notre environnement médiatique complexe. »

En effet, « September 5 » donne surtout à voir une chose que l’événement a en commun avec le pogrom du 7 octobre, à savoir la diffusion en direct d’exactions terroristes.

L’un des terroristes palestiniens de l’opération « Septembre noir » (Crédit photo : AP Photo/Kurt Strumpf, File)

Ce jour-là, des membres de l’organisation terroriste palestinienne Septembre noir ont tué deux Israéliens dans leur dortoir du village olympique et pris les neuf autres en otages. En raison d’un terrible cafouillage de la part des autorités ouest-allemandes, les otages ont été exécutés à l’aéroport tout proche.

Toute cette saga tragique s’est déroulée en direct à la télévision : ABC Sports, qui couvrait les Jeux, a tenu l’antenne quasiment toute la journée.

Le film ne s’intéresse pas au conflit israélo-palestinien ni à ce que les athlètes, ou ceux qui ont tenté de leur venir en aide, ont vécu ce jour-là, mais à l’équipe d’ABC dépêchée en Allemagne de l’Ouest pour couvrir les Jeux Olympiques et qui s’est retrouvée au cœur de cette tourmente mortifère.

Le film évoque les décisions ultra-rapides que les journalistes et producteurs – comme Peter Jennings, qui fait une apparition dans le film et dont le rôle est interprété dans certaines scènes par Benjamin Walker – ont dû prendre tout en continuant de couvrir au pied levé la prise d’otages.

À un moment est évoquée la question de l’utilisation par les journalistes du qualificatif « terroristes » pour parler des attaquants de Septembre noir. À un autre, un jeune producteur demande : « Peut-on décemment montrer quelqu’un en train de se faire tirer dessus en direct à la télévision ? »

A un autre moment encore, la police allemande tente d’empêcher les équipes de tourner, de crainte de révéler la position de ses tireurs d’élite.

L’histoire est racontée avec une tension peu commune, en ayant recours à des équipements de télévision d’époque – ou tout du moins les plus fidèles possibles à l’époque – ce qui n’a pas été chose facile.

La délégation israélienne lors de l’ouverture des Jeux olympiques de Munich en 1972. (Capture d’écran)

« C’est en faisant des recherches pour le film que nous avons pris conscience du grand rôle joué par les médias ce jour-là », confie Fehlbaum. « Nous avons par la suite eu la chance de parler avec Geoffrey Mason, témoin oculaire des événements qui se trouvait en régie, ce jour-là. C’est en parlant avec lui que nous avons décidé de raconter toute l’histoire depuis ce point de vue. »

C’est l’acteur juif John Magaro qui joue le rôle de Mason, à l’époque tout jeune producteur – non juif – d’ABC, et aujourd’hui seul survivant de l’équipe. (C’est lui qui pose la question de la pertinence de diffuser les images d’une fusillade en direct à la télévision.) L’autre personnage important est Marvin Bader (Ben Chaplin), producteur expérimenté d’ABC Sports, qui était juif et dont la douleur est évidente dans sa manière de couvrir la crise.

« C’est Geoffrey Mason qui nous a appris tout ça et lui-même le tenait des conversations qu’il avait eues avec Marvin, au sujet de ses origines et de la relative proximité dans le temps de la Seconde Guerre mondiale au moment de la couverture des Jeux olympiques de Munich », poursuit Fehlbaum.

Deux hélicoptères de la police des frontières ouest-allemande qui transportaient des terroristes armés et leurs neuf otages olympiques israéliens, à la base aérienne de Fuerstenfeldbruck, à trente kilomètres à l’ouest de Munich, en Allemagne, le 7 septembre 1972. (Crédit : AP Photo/Archives)

En dépit de son nom de famille à consonance ashkénaze, Fehlbaum, qui est originaire de Suisse, n’est pas d’origine juive. Mais le réalisateur a étudié le cinéma à Munich, et dans cette ville, assure-t-il, « la tragédie est encore bien présente ».

L’un des arguments majeurs du film tient dans le fait que ces Jeux olympiques, les premiers organisés en Allemagne depuis ceux de Hitler, en 1936, avaient vocation à « accueillir le monde entier dans une Allemagne nouvelle », pour reprendre l’expression d’un haut-responsable allemand, à une époque où le monde avait encore bien présents à l’esprit la Seconde Guerre mondiale et la Shoah.

Mark Spitz, un nageur juif américain, y a remporté sept médailles d’or et l’on voit dans le film les producteurs s’interroger sur la pertinence de lui demander ce que ça lui fait de « remporter l’or sur les terres d’Hitler ». Au milieu des innombrables images d’archives qui émaillent le film, on voit celle de l’une des victoires de Spitz, sans oublier un reportage sur les athlètes israéliens, dont le lutteur américano-israélien David Berger, que l’on suit lors de sa visite à Dachau quelques jours avant d’être abattu.

C’est Peter Sarsgaard qui joue le rôle du célèbre directeur d’ABC Sports, Roone Arledge, alors que le présentateur d’ABC, Jim McKay, à la manoeuvre pour couvrir les événements de ce jour-là, n’apparaît que dans des images d’archives.

« September 5 » est, au bas mot, le troisième grand film consacré à la crise des otages et « One Day in September », le documentaire oscarisé de Kevin Macdonald, en 1999, a eu une influence déterminante sur le dernier en date, souligne Fehlbaum.

L’autre grand film consacré au massacre – « Munich » de Steven Spielberg en 2005 – est très différent, principalement axé sur les conséquences de la tragédie et une version romancée de la vengeance d’Israël, qui déçoit l’un des agents impliqués – Avner, interprété par Eric Bana.

« Steven Spielberg a évidemment eu une immense influence sur moi, pas seulement avec ‘Munich’ mais tous ses films », conclut Fehlbaum. « Nous avons bien sûr regardé Munich sous toutes les coutures mais… notre film a une perspective très différente sur cette tragédie. »

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