Le Hamas reste fort et nuit encore psychologiquement à Israël
L'empathie et le soutien apportés à Israël après une funeste journée se dissipent dans le cadre d'une guerre que nous ne voulons pas définir comme existentielle - mais qui y ressemble de plus en plus
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Au 19e jour de la guerre, 19 jours après que le Hamas a commis d’indicibles crimes sur le territoire israélien, contre le peuple israélien, massacrant de manière barbare 1 400 personnes au sein même de notre État souverain, le pays peut se permettre de ressentir de la satisfaction face à sa position. Et c’est une situation diabolique.
L’armée israélienne a bombardé des cibles du Hamas, causant à l’évidence la désolation sur le terrain et plusieurs fois par jour, le porte-parole de Tsahal fait part, à la télévision, des frappes qui ont été menées, des noms des commandants du Hamas qui ont été neutralisés.
Mais le Hamas – qui reste, c’est manifeste, encore beaucoup trop opérationnel en termes d’armée militaire et de force terroriste – continue à mener une guerre sur le terrain et une guerre psychologique, et les personnalités de premier plan de l’organisation ne semblent pas encore avoir été neutralisées pour leur part.
Mardi soir, le groupe terroriste, qui voulait tenter d’attaquer deux villes frontalières, a envoyé des hommes dans cet objectif. Il conserve la capacité de lancer des barrages de roquettes, en prenant notamment l’initiative de s’attaquer au secteur de l’aéroport. Et son vaste réseau de tunnels souterrains est encore, apparemment tout du moins, largement intact. Yocheved Lifshitz, libérée lundi après 17 jours de captivité entre les mains du Hamas, a évoqué « une toile d’araignée » et dans sa conférence de presse où elle a indéniablement fait preuve de sincérité, le lendemain, elle a évoqué des sols mouillés et des l’humidité, mais elle n’a pas parlé de plafonds effondrés et autres dégâts qu’elle aurait pu constater de visu alors qu’elle errait dans les tunnels en compagnie des autres otages.
Avec ses alliés du Hezbollah, sur la frontière nord, le Hamas a forcé environ 130 000 Israéliens à évacuer leurs habitations dans le nord et dans le sud du pays – réduisant encore les secteurs de notre petit État où, selon le gouvernement, les citoyens peuvent vivre en sécurité, avec moultes conséquences au niveau individuel et au niveau logistique. Des dizaines de milliers de plus d’habitants, qui vivent dans des zones où aucun ordre d’évacuation n’a encore été donné, ont quitté leurs maisons de leur propre gré, cherchant un refuge plus sûr dans le centre du pays.
Les tirs de roquette, sans relâche, forcent des dizaines de milliers de personnes, parfois même plus, à courir vers les abris antiaériens encore et encore.
L’économie – avec son fer de lance, le secteur technologique, qui avait d’ores et déjà été profondément miné par des mois de querelles intérieures face au projet controversé de refonte du système judiciaire avancé par le gouvernement, et qui est dorénavant suspendu – pique encore du nez, et les perspectives de crédit du pays, à l’international, plongent. Il n’y a pas un secteur qui soit épargné. Les volontaires se précipitent pour sauver l’agriculture israélienne avec le départ des travailleurs étrangers. Des centaines de milliers de réservistes israéliens ne travaillent plus dans le cadre de la mobilisation sans précédent qui a suivi les atrocités du 7 octobre.
Le Hamas, c’est prévisible, voudra tirer le maximum de poids et d’influence des 220 otages à peu-près qu’il retient en captivité – ensorcelant le monde après avoir libéré seulement quatre otages jusqu’à présent et se présentant comme humain – de manière efficace mais Ô combien mensongère ! Dans le cas de la formidable Yocheved Lishiftz, de surcroît, les autorités israéliennes ont montré qu’elles étaient incapables de prendre conscience que présenter, lors d’une conférence de presse en direct, une activiste de la paix d’un âge certain venant d’être libérée, une femme dont l’époux est encore détenu en otage, ne permettrait pas de mieux faire comprendre au monde la cruauté cynique du groupe terroriste et ses ambitions génocidaires. Lors de cette intervention où elle racontait sa vérité, pourquoi n’y avait-il pas un représentant du gouvernement, une présence solidaire, capable de contextualiser son récit ?
La manne que représentent les otages kidnappés le 7 octobre, de plus, a prouvé qu’elle était en capacité d’empêcher le lancement « imminent », répète-t-on à l’envi, de l’incursion terrestre, alors que les États-Unis et les autres nations comptant des citoyens parmi les prisonniers du Hamas s’efforcent d’éviter un conflit plus large à Gaza qui pourrait entraîner la mort de leurs ressortissants. Les Israéliens, bien entendu, ne sont pas moins désespérés d’obtenir la libération des otages – mais ils sont également prêts à tout pour assister enfin à l’anéantissement du Hamas et pour retrouver un semblant de certitude existentielle, la certitude qui ne seront pas assassinés dans leurs habitations par des terroristes qui vivent à seulement quelques pas d’eux.
Jour après jour, alors que la monstruosité de ce que nous avons subi s’efface rapidement de la mémoire de ceux qui, à l’étranger, pensent qu’ils ne sont pas partie prenante dans le bien-être et dans la survie d’Israël, l’attention et l’empathie à l’égard d’Israël, dans le monde, se détournent de plus en plus des Israéliens massacrés pour se porter sur les Gazaouis sous les bombes.
Les Israéliens prouvent, comme à leur habitude, leur résilience – même face à cette catastrophe sans précédent, avec d’innombrables récits d’héroïsme et de perte qui continuent à émerger. Deux cent mille Israéliens sont revenus au sein de l’État juif depuis le 7 octobre. Les soldats, qu’ils soient de métier ou réservistes, affichent une motivation énorme alors même que le gouvernement s’avère être encore largement dysfonctionnel.
Mais à l’international, la compréhension du contexte de la guerre lancée par Israël contre le Hamas régresse rapidement. Israël ne se bat pas par esprit de représailles ou en raison d’une quelconque soif de vengeance, mais afin de garantir que le gouvernement terroriste de Gaza ne survivra pas, qu’il ne pourra plus jamais commettre ses actes barbares, pour dissuader nos autres ennemis puissants et pour permettre aux Israéliens de retrouver la conviction que oui, nous pouvons vivre ici, et que nous pouvons le faire dans des conditions proches de la sécurité.
Et pourtant, ni la présentation aux journalistes internationaux d’images insoutenables illustrant les tueries massives, les atrocités et le plaisir évident qui a été pris par les terroristes en les commettant ne peut compenser le temps qui s’est simplement écoulé depuis le 7 octobre.
Et il y a aussi, bien sûr, ces nombreuses personnes, dans le monde entier, qui ont perdu leur boussole morale – ou qui n’en ont jamais eu – s’agissant de Juifs assassinés et qui ne la retrouvent que lorsque les Juifs et leur État tentent de se défendre.
19 jours après que des terroristes du Hamas ont pris d’assaut notre frontière excessivement sous-protégée, semant la désolation en Israël, laissant cours à leur allégresse alors qu’ils assassinaient brutalement les nôtres, le soutien et l’empathie apportés à Israël, aux heures les plus sombres de son Histoire, se dissipent. Et – ce qui est incroyable – le Hamas reste fort et c’est même lui qui a l’avantage.
La seule raison pour laquelle nous ne hurlons pas tous notre indignation face à l’hypocrisie internationale, que nous ne laissons pas déborder nos inquiétudes face à l’hostilité croissante à l’égard des Juifs, sur tout le globe, c’est que nous sommes encore profondément dans cette guerre – une guerre que nous nous refusons de définir comme existentielle mais qui y ressemble de plus en plus. Mais avons-nous seulement réellement commencé à riposter ? C’est difficile à dire.
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David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel