Ministre de la Défense : Israël voit l’Iran repenser sa stratégie en Syrie
Naftali Bennett affirme que les efforts de Téhéran pour établir une présence militaire permanente au nord d'Israël "s'affaiblissent" ; Jérusalem va intensifier sa lutte en ce sens
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
Le ministre de la Défense Naftali Bennett a affirmé mardi qu’Israël commençait à percevoir des signes que l’Iran reconsidérait ses efforts pour établir une présence militaire permanente en Syrie.
« Je peux vous dire que nous voyons les premières indications d’un affaiblissement de l’Iran et que nous envisageons une nouvelle approche en Syrie », a-t-il déclaré, lors de la conférence sur la technologie militaire New-Tech 2020 à Tel Aviv.
Pour Naftali Bennett, ce changement de direction potentiel est dû aux efforts d’Israël pour contrer la stratégie de l’Iran, bien que d’autres responsables de la défense et analystes aient dit que cela résultait probablement de la mort du commandant de la force Al-Qods du corps des Gardiens de la Révolution islamique, Qassem Soleimani, lors d’une attaque aérienne américaine le mois dernier. Il était en grande partie responsable du développement et de l’exécution de la politique iranienne en Syrie.
« [Les Iraniens] envoient des forces afin d’y établir une présence pour nous épuiser, mais nous transformons cet inconvénient en avantage. Nous avons des renseignements et une supériorité opérationnelle, et nous le disons clairement aux Iraniens : sortez de Syrie. Il n’y a rien pour vous ici », a mis en garde le ministre de la Défense.
Bennett a fait savoir qu’Israël prévoyait d’intensifier la pression sur l’Iran.
« Nous passons d’une position défensive à une position offensive – pour affaiblir, épuiser, fatiguer et user la tête de la pieuvre afin d’affaiblir ses bras », a déclaré Bennett, utilisant une analogie qu’il emploie souvent, comparant l’Iran à une pieuvre, avec ses milices en guise de bras.
Le ministre de la Défense a estimé que la République islamique était maintenant particulièrement vulnérable, alors que les Iraniens continuent de protester contre l’aventurisme du gouvernement à l’étranger et que la situation économique intérieure se détériore en raison des sanctions financières américaines.
Des manifestations agitent les rues iraniennes, le peuple dit aux ayatollahs : « arrêtez de gaspiller l’argent et notre sang dans cet aventurisme », a commenté Bennett.
Les propos du ministre de la Défense sont survenus quelques heures après la diffusion d’images satellites montrant les dégâts importants causés à des entrepôts et des immeubles de bureaux de l’aéroport international de Damas, suite à des frappes aériennes de jeudi dernier qui ont été attribuées à Israël.
Les photographies, publiées par la société privée d’analyse d’images satellite ImageSat, ont montré que plusieurs entrepôts, apparemment utilisés pour stocker des armes qui ont été acheminées en Syrie depuis l’Iran, ont été détruits lors des frappes ainsi que des bâtiments utilisés comme quartier général pour les opérations sur le site.
De plus, un hangar a été endommagé lors de l’attaque, ce que la Syrie a imputé à Israël. ImageSat a déclaré que l’abri était « probablement utilisé pour stocker des munitions ou [des missiles surface-air] ».
Aux environs de 23h45 jeudi dernier, des missiles ont frappé cinq dépôts d’armes près de l’aéroport international de Damas, y compris une position militaire au sud de la capitale syrienne, avait rapporté la chaîne d’information al-Arabiya, citant des sources non identifiées.
L’attaque a eu lieu quelques heures après l’arrivée à l’aéroport d’un chargement – apparemment de munitions – en provenance de Téhéran, selon les données de vol.
Quatre membres des Gardiens de la Révolution islamique et trois soldats syriens ont été tués lors des frappes, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme basé en Grande-Bretagne.
La Syrie et l’observatoire ont tous deux imputé cette frappe à Israël. L’armée israélienne n’a fait aucun commentaire sur la question, conformément à sa politique de longue date consistant à ne pas confirmer ni infirmer de telles opérations à l’étranger.
Interrogé lors d’une interview à Radio Haïfa vendredi matin sur l’implication présumée d’Israël, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré : « Je ne commente pas les opérations. »
« Je ne sais pas ce qui s’est passé. Peut-être que c’était l’armée de l’Air belge », a-t-il lancé en plaisantant.
Les frappes nocturnes ont eu lieu un peu plus d’une semaine après une série de frappes sur plusieurs cibles près de Damas qui auraient tué 23 combattants pro-iraniens. L’armée n’a pas reconnu avoir effectué ces frappes, mais les médias d’État syriens ont blâmé Israël, et quelques jours plus tard, Bennett semble s’en être attribué le mérite, affirmant qu’Israël avait mené une attaque contre l’Iran la semaine précédente et notant : « Les médias étrangers ont rapporté cette semaine que 23 Syriens et Iraniens avaient été tués là-bas. Ce sont des chiffres importants et nous en ferons de plus en plus. »
Israël soutient depuis longtemps qu’il ne tolérera pas les efforts de l’Iran – un proche allié du dictateur syrien Bachar al-Assad – pour établir une présence militaire permanente en Syrie et qu’il prendra des mesures pour contrecarrer ce projet. L’État juif accuse Téhéran de chercher à établir une présence militaire en Syrie qui pourrait être utilisée comme rampe de lancement pour des attaques contre lui.
Bien que les responsables israéliens s’abstiennent généralement d’assumer la responsabilité de certaines frappes en Syrie, ils ont reconnu avoir mené des centaines, voire des milliers de raids dans le pays depuis le début de la guerre civile syrienne en 2011.
Ces raids ont été en grande majorité dirigés contre l’Iran et ses mandataires, notamment le groupe terroriste libanais du Hezbollah, bien que l’armée israélienne ait également effectué des frappes sur les défenses aériennes syriennes lorsque ses batteries ont tiré sur des avions israéliens.