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Analyse

En nommant Ohana comme ministre, Netanyahu assure son contrôle du Likud

En attribuant les portefeuilles du Cabinet, le Premier ministre affaiblit-il délibérément les hauts dirigeants du Likud qui peuvent représenter une menace politique ?

Shalom Yerushalmi

Shalom Yerushalmi est analyste politique pour Zman Israël, le site en hébreu du Times of Israël sur l'actualité israélienne.

Dans le sens des aiguilles d'une montre à partir du haut à gauche : Yisrael Katz, Yuli Edelstein, Gideon Saar et Gilad Erdan, membres du Likud. (Flash90)
Dans le sens des aiguilles d'une montre à partir du haut à gauche : Yisrael Katz, Yuli Edelstein, Gideon Saar et Gilad Erdan, membres du Likud. (Flash90)

Avec la nomination d’Amir Ohana, allié du Likud – le premier député de droite ouvertement homosexuel dans un parti de droite – comme ministre de la Justice, le Premier ministre et président du Likud continue à affaiblir la génération des politiciens prêts à le remplacer.

Benjamin Netanyahu a fait appel à Amir Ohana malgré les nombreux autres personnalités de haut rang en lice pour le poste. Bien que beaucoup ne s’en rendent peut-être pas compte, il s’agit d’une perpétuation de la stratégie de longue date du Premier ministre, qui consiste à faire tomber – seul ou avec l’aide d’autres – une longue lignée de hauts responsables du Likud qui représentaient une menace pour lui.

Des dizaines de noms sont restés sur le bas-côté de la route alors qu’ils étaient considérés comme dignes de remplacer Netanyahu à la tête du Likud – tellement nombreux, en fait, qu’il n’y a pas assez de place pour les lister tous. Parmi eux figurent David Levy, Moshe Katzav, David Magen, Benny Begin, Silvan Shalom, Roni Milo, Dan Meridor, Moshe Kahlon, et même Moshe Feiglin.

Le seul à avoir vraiment réussi à le concurrencer, et même à le battre, c’est l’ancien Premier ministre décédé en 2014, Ariel Sharon.

Le nouveau ministre de la Justice Amir Ohana fait rire le Premier ministre Benjamin Netanyahu lors d’une réunion du Likud. (Hadas Porush/ Flash90)

A présent, Netanyahu fait fi d’un nouveau groupe de responsables politiques qui s’approchent un peu trop près du but : Yuli Edelstein, arrivé à la première place aux primaires du Likud, Yisrael Katz, qui a terminé deuxième, ainsi que Gilad Erdan et Gideon Saar, respectivement arrivés troisième et quatrième.

Le fait que le Premier ministre n’ait pas réussi à former une coalition gouvernementale le mois dernier complique encore davantage la situation, car personne ne peut être certain de la façon dont les choses vont se dérouler après les nouvelles élections du 17 septembre.

Voici comment, en jonglant avec les nominations politiques, Netanyahu s’efforce de lier les mains de chacun de ses quatre principaux rivaux du Likud.

Yisrael Katz

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (à gauche) et le ministre des Transports Yisrael Katz au cours d’une session plénière de la Knesset, le 8 février 2016. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

Récemment nommé ministre des Affaires étrangères, Katz a apparemment bénéficié d’une promotion, mais il doit maintenant faire ses adieux au portefeuille des Transports qui, depuis dix ans, en a fait le plus fort du Likud, après Netanyahu. Netanyahu avait essayé à plusieurs reprises de séparer Yisrael Katz du portefeuille des Transports sans succès, précisément à cause de la puissance que Katz a engrangée.

Bien que Yisrael Katz dispose maintenant du portefeuille des Affaires étrangères, et pourrait obtenir le titre de vice-Premier ministre, il ne semble pas que Netanyahu envisage d’attribuer le ministère des Transports à un collègue du Likud, mais à un membre de l’Union des partis de droite. Cela diminuera la force politique de Katz.

Katz doit espérer que le parti Kakhol lavan reste uni après les élections de septembre et continuera à s’abstenir de rejoindre un gouvernement dirigé par Netanyahu, car le Premier ministre serait, selon toute probabilité, heureux de lui confier le portefeuille des Affaires étrangères, espérant ainsi attirer des partenaires potentiels dans sa coalition.

Yuli Edelstein

Le Président Reuven Rivlin et le Président de la Knesset Yuli Edelstein dans la salle des séances plénières lors de la cérémonie d’assermentation des membres de la Knesset lors de l’ouverture de la nouvelle session après les élections, le 30 avril 2019. (Noam Revkin Fenton/Flash90)

Lors de la récente crise politique au sein du Likud, alors que Netanyahu s’efforçait sans succès de former une coalition, une brève campagne de mutinerie contre le Premier ministre est née en marge du parti, pour s’opposer aux élections anticipées et charger Yuli Edelstein de former un nouveau gouvernement. L’idée a été rapidement abandonnée.

Yuli Edelstein restera en revanche président de la Knesset et, sauf changement radical, se présentera à la présidence – une position largement symbolique et inoffensive – dans deux ans.

Netanyahu ne considère pas ce dernier comme dangereux pour sa position politique et, à l’approche des élections, lui a même donné un rôle dans sa guerre ouverte contre le parti Yisrael Beytenu d’Avigdor Liberman, qui menace de prendre une grande part du vote russe.

Gilad Erdan

Le chef de la police israélienne Roni Alsheish (à gauche) et le ministre de la Sécurité intérieure Gilad Erdan au siège de la police, à Jérusalem, le 3 décembre 2015. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

Pendant de nombreuses années, Gilad Erdan a été l’un des visages les plus populaires du Likud, bien qu’il ne soit pas particulièrement apprécié par Netanyahu – et n’est plus le bienvenu à la table familiale, pour ainsi dire.

Cela s’explique par le fait que le Premier ministre fait l’objet d’une enquête pour fraude dans de nombreuses affaires en cours. Netanyahu peut percevoir Erdan comme moins que loyal, car il a pris le parti de la police quand Netanyahu a attaqué leur intégrité, et s’est publiquement opposé à une législation qui réécrirait les lois fondamentales d’Israël et garantirait l’immunité au chef du gouvernement.

Les proches collaborateurs de Netanyahu s’attendent de façon irréaliste à ce que Gilad Erdan se serve de son rôle actuel de ministre de la Sécurité intérieure pour mettre un frein aux enquêtes contre Netanyahu.

Pendant ce temps, Gilad Erdan se distancie du portefeuille de la Sécurité publique, et on dit que Netanyahu le pousse à assumer le rôle d’ambassadeur auprès de l’ONU – poste que Gilad Erdan a refusé deux fois ces dernières années.

Gideon Saar et Moshe Kahlon

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (C) et l’ex-ministre de l’Intérieur Gideon Saar (à gauche) à la Knesset, le 9 juillet 2013. (Flash 90)

Gideon Saar, qui est également considéré comme un candidat alternatif, est presque officiellement mis à l’écart. Il ne sera pas dans le gouvernement – ni dans le gouvernement actuel, ni dans celui que Netanyahu prévoit de former après les élections.

Une autre figure importante a aussi été discrètement éliminée. Moshe Kahlon, autrefois l’un des grands détracteurs de Netanyahu, avait quitté le Likud, mais y est revenu récemment après avoir été réabsorbé dans le parti au pouvoir avec ses amis de Koulanou. Il sera un ministre des Finances inoffensif.

Un piège dans le piège

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu serre la main de Meir Porush (à gauche) du parti Yahadout HaTorah à la Knesset, le 29 avril 2015, après que les deux parties ont signé un accord de coalition. A la droite de Netanyahu se trouve Yaakov Litzman, leader de Yahadout HaTorah. (Avec l’aimable autorisation du Likud)

Le gouvernement compte trois portefeuilles puissants. Ils permettent à leurs détenteurs de maintenir leur pouvoir politique en accordant des budgets et des nominations politiques presque illimités de part et d’autre. Il s’agit du portefeuille des Transports, celui du Logement et de la construction et celui de l’Intérieur.

Le Likud ne détient pas ces portefeuilles, et il n’est pas certain qu’il les détiendra après les élections de septembre, Netanyahu préférant disposer de partenaires heureux dans sa coalition que des ministres forts dans son parti. De plus, le Premier ministre a confié le portefeuille de la Justice, qui a un poids particulier, au nouveau venu Ami Ohana. C’est ainsi qu’il écarte en douceur les membres de la « vieille génération » du Likud.

Les hauts responsables du Likud sont conscients que Netanyahu les met à l’écart.

« Nous sommes dans un piège dans le piège », a déclaré à Zman Yisrael, le site en hébreu du Times of Israel, un proche associé d’un ministre du Likud. « On ne peut pas sortir non plus. Nous sommes allés à ces [deuxièmes] élections à cause du piège dans lequel se trouve Netanyahu – il ne peut former un gouvernement en raison de sa situation juridique, alors nous allons tous aux élections. »

« Aujourd’hui, nous sommes confrontés à des élections et nous ne pouvons pas nous prononcer contre ses décisions », a-t-il expliqué. « Si vous demandez au peuple, tout le monde se rend compte, et peut-être même espère, que Netanyahu va accepter un plaider coupable qui va le mettre hors jeu. Et ensuite nous commencerons un tout nouveau jeu. »

Cet article a été adapté de la version hébraïque du Times of Israel, Zman Yisrael.

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