Halevi aux familles endeuillées : « Nous aurions pu être meilleurs » le 7 octobre
Dans l'enregistrement d'une conversation avec des proches de soldats tués lors d'une attaque du Hamas, l'ancien chef d'état-major affirme qu'il existait des signes avant-coureurs de l'assaut qui auraient pu être détectés

L’ancien chef d’état-major de l’armée israélienne, Herzi Halevi, qui a démissionné à la suite de l’attaque dévastatrice du 7 octobre 2023 menée par le Hamas dans le sud d’Israël, a déclaré aux familles endeuillées que Tsahal aurait pu être mieux préparée à faire face à l’assaut si elle avait correctement évalué les informations des services de renseignement.
Dans l’enregistrement d’une conversation non datée, diffusé mardi par la chaîne N12, on entend Halevi répondre à des allégations selon lesquelles les services de renseignement avaient, des années auparavant, signalé la possibilité d’une attaque majeure du Hamas.
S’adressant aux familles des soldats tués au poste militaire de Kissufim, Halevi a insisté sur le fait qu’il n’y avait pas eu d’alerte claire d’une attaque majeure la nuit précédant l’attaque et a déclaré que l’armée avait été prise par surprise.
Halevi, qui a démissionné le 6 mars dernier, a continué à assumer ouvertement la responsabilité de l’incapacité à empêcher l’attaque.
« Tsahal a échoué, et moi, en tant que commandant, j’ai échoué », a-t-il déclaré.
« Il y a des points sur lesquels nous savons que nous aurions pu être meilleurs, mais je veux que vous le sachiez : Nous n’essayons pas de vous tromper ou de blanchir les choses ; nous disons la douloureuse vérité », a déclaré Halevi aux familles au sujet des enquêtes internes menées par l’armée sur le désastre.

Le 7 octobre, le Hamas a envoyé plus de 5 000 terroristes faire irruption à la frontière depuis la bande de Gaza et à envahir le sud d’Israël, tuant 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et emmenant 251 otages à Gaza. Cette attaque a été le coup d’envoie de la guerre en cours dans la bande de Gaza.
Un parent de soldat tué a accusé la direction de l’armée d’être déconnectée de la base, se référant à des rapports selon lesquels les soldats de surveillance avaient depuis des mois fait part de leurs inquiétudes concernant les mouvements et les exercices du Hamas le long de la frontière, mais que leurs avertissements avaient été ignorés.
A LIRE : Les quatre volets de l’enquête : les perceptions de Tsahal sur Gaza, les renseignements militaires, le processus décisionnel à la veille du 7 octobre, et le commandement, le contrôle et les ordres donnés pendant les combats.
« Nous ne sommes pas déconnectés », a répondu Halevi, qui a décrit l’assaut du Hamas comme « une vaste attaque surprise ».
Le parent a objecté qu’il ne s’agissait pas d’une surprise, et a semblé faire référence à des évaluations antérieures des services de renseignement qui avaient évoqué un assaut possible très similaire à celui qui s’est finalement déroulé.
« Il y a des choses qui auraient pu être découvertes », a concédé Halevi, tout en soulignant que les forces armées présentes le long de la frontière étaient préparées à un scénario catastrophe bien plus limité que celui qui s’est finalement produit. « Cela a eu un impact sur les forces [en présence], la quantité de forces aériennes en attente, et beaucoup d’autres choses qui auraient pu être utiles ici », a-t-il déclaré.
« Oui, il y a eu une surprise. La tromperie du Hamas a ajouté aux choses. »

Halevi a parlé des « signes suspects » d’activité à Gaza au cours de la nuit précédant l’attaque.
Mais les vérifications de ces signes ont été rassurantes, a-t-il dit, et dans l’ensemble, les choses semblaient normales. Les analystes sont arrivés à la conclusion qu’il n’y avait rien à craindre dans l’immédiat.
« Rétrospectivement, lorsque nous avons examiné les choses, il était possible de le faire de manière plus approfondie et peut-être d’arriver à un résultat différent », a-t-il déclaré.
Halevi a également évoqué un incident au cours duquel une soldate chevronnée de l’unité de collecte de renseignements 8200 a été avertie d’un projet d’invasion d’Israël par le Hamas et l’a signalé à son commandant direct. L’officier a transmis l’information au chef de la direction du renseignement militaire, qui a rejeté l’idée et ne l’a pas approfondie.
« Là aussi, lorsque nous avons vérifié, rétrospectivement, nous avons constaté que les choses auraient pu être mieux faites. Il s’agissait d’un autre point sur la page qui n’était pas relié à une ligne », a déclaré Halevi, qui a ajouté que des leçons avaient été tirées de l’expérience.
Il a déclaré avoir parlé à plusieurs reprises avec la soldate à l’origine du signalement, la décrivant comme « très professionnelle, très sûre d’elle, pas facile à faire taire ».
« Même elle, à mon grand regret, ne nous a pas dit : il y aura la guerre demain, ou la semaine prochaine. »
L’ancien commandant a également évoqué le document « Les murs de Jéricho », un rapport présenté par l’unité 8200 en avril 2022, exposant les plans du Hamas pour ce qui serait finalement réalisé lors de l’invasion et du massacre du 7 octobre dans le sud d’Israël.
Halevi a déclaré que des informations concernant une telle attaque étaient parvenues à Israël à deux reprises, des années auparavant. Il a ajouté que tous ceux qui ont examiné ces informations sont arrivés à la conclusion qu’il s’agissait d’un objectif idéologique du Hamas, quelque chose que le groupe terroriste ne faisait que rêver de faire.

L’un des parents a affirmé que le chef de l’agence de sécurité du Shin Bet, Ronen Bar, lui avait dit, lors d’une conversation privée, qu’à 1h30 du matin, le 7 octobre, il avait averti toutes les entités concernées qu’il y aurait une attaque importante en provenance de Gaza.
« Je vous le dis très clairement et simplement, je ne sais pas ce que Ronen veut dire, mais aucun avertissement d’une attaque importante n’a été reçu », a déclaré Halevi. « Absolument pas. »
Bar a lui aussi présenté sa démission, qui prendra effet le 15 juin, en tant que chef du Shin Bet, en réponse aux échecs de son agence concernant l’attaque du Hamas du 7 octobre,
L’armée a déclaré, en réponse au reportage de N12, qu’elle menait des enquêtes « approfondies et décisives » sur le 7 octobre et qu’elle « s’efforçait de les présenter aux familles endeuillées et aux communautés frontalières ».
« Il s’agit de réunions douloureuses et compliquées, qui revêtent une très grande importance pour toutes les personnes présentes », a déclaré l’armée, ajoutant que les enquêtes sont menées par « devoir envers les familles endeuillées, les otages et l’ensemble de la population ».