Le chef du Shin Bet accuse une députée du Likud de nuire à la sécurité nationale
Le Mossad reproche à Tally Gotliv de "répandre des mensonges sans fondement" qui maintient ses accusations concernant la rencontre entre David Barnea et Shikma Bressler
Le chef du Shin Bet, Ronen Bar, a accusé mercredi une députée du parti au pouvoir, le Likud, de porter délibérément atteinte à la sécurité nationale, en soutenant une fois de plus une théorie du complot contre les opposants à la refonte du système judiciaire par le gouvernement.
Dans des messages publiés sur les réseaux sociaux mercredi, la députée Tally Gotliv a réitéré son allégation infondée, formulée dans les jours précédant l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre, selon laquelle le chef du Mossad David Barnea aurait rencontré Shikma Bressler, une dirigeante du mouvement de protestation contre cette refonte.
Cette allégation a été vigoureusement démentie à l’époque par le Mossad, qui a publié mercredi une nouvelle réponse à Gotliv.
« Le chef du Mossad n’a jamais rencontré, convoqué ni parlé avec Shikma Bressler », a affirmé l’agence d’espionnage dans un communiqué publié par le bureau du Premier ministre. « C’est la deuxième fois que la députée Gotliv répand des mensonges sans fondement. »
Les derniers messages de Gotliv comprenaient une capture d’écran d’un article provenant d’un site marginal connu pour ses tendances complotistes, dont le titre affirmait que Barnea « avait reçu un message des Américains indiquant qu’ils avaient intercepté des conversations entre le mari de Shikma Bressler du Shin Bet et Yahya Sinwar » quatre jours avant les massacres perpétrés par le Hamas. Sinwar est le principal dirigeant du Hamas à Gaza.
Malgré le démenti du Mossad, Gotliv a réitéré son accusation.
« Je suis une députée et je suis attachée à la nation et à la vérité », a-t-elle écrit sur X, anciennement Twitter.
À la suite de cet échange, Bar a publié une lettre au ton très ferme contre Gotliv, affirmant qu’elle avait publié les données personnelles d’employés des services de sécurité, mettant ainsi en danger leur vie et celle de leur famille. Il a ajouté que l’un des membres des services de sécurité était toujours en service, tandis que l’autre avait pris sa retraite, et a noté que l’article dans lequel ils étaient nommés comprenait la phrase : « cet article a été publié par une personne jouissant de l’immunité parlementaire. »
« La sécurité nationale ne peut pas être utilisée comme un outil dans une tentative stupide d’attirer l’attention du public », a écrit Bar, affirmant que Gotliv avait enfreint le droit pénal et le droit civil avec ses publications.
Il a également accusé la députée du Likud d’avoir « sciemment et intentionnellement » porté atteinte à la sécurité nationale et a déclaré qu’en raison de ses actions, les services de sécurité avaient été contraints de consacrer davantage de temps et de ressources à la protection de leurs membres.
« Alors que la députée de la Knesset Gotliv publie des informations sur l’identité des membres du personnel de sécurité, les ennemis de l’État d’Israël essaient de découvrir leur identité, afin de leur nuire ainsi qu’aux membres de leur famille », a déclaré le chef du Shin Bet.
Bar a également rappelé que Gotliv est membre de la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset, ce qui l’expose à des « informations classifiées et sensibles », et a appelé à une action rapide pour empêcher que « ces actes » ne se reproduisent.
La lettre de Bar était adressée au président de la Knesset, Amir Ohana, au président de la commission des Affaires étrangères et de la Défense, Yuli Edelstein, à la procureure générale, Gali Baharav-Miara, et au général de brigade Avi Gil, secrétaire militaire du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
En réponse à Bar, Gotliv a écrit sur X que le chef du Shin Bet « ne me fait pas peur » et a allégué qu’il essayait de l’intimider.
La première fois que la législatrice du Likud a évoqué la thèse conspirationniste d’une rencontre entre Barnea et Bressler, remonte au 3 octobre dernier.
« C’est une bonne chose que je bénéficie de l’immunité et que les ordonnances judiciaires ne s’appliquent pas à moi », avait écrit Gotliv à l’époque, en demandant : « Quelqu’un peut-il expliquer cette réunion ? Elle n’est pas anodine, sinon elle ne ferait pas l’objet d’un embargo. »
À l’époque, le Mossad avait également démenti cette affirmation en la qualifiant de « fake news« .
Depuis son entrée à la Knesset à la suite des élections de novembre 2022, Gotliv s’est forgée une réputation autour de ses déclarations incendiaires, accusant par exemple l’armée israélienne et le Shin Bet de « travailler pour les terroristes« .
Outre le fait que ses remarques posent régulièrement problème à Netanyahu, qui dirige le Likud, Gotliv a été responsable de la perte embarrassante d’un vote de coalition l’été dernier, après avoir refusé de suivre la ligne du parti.
Le Mossad a démenti les informations qui le liaient aux manifestations de masse contre les projets du gouvernement visant à affaiblir le système judiciaire, notamment les documents des services de renseignement américains divulgués en avril qui prétendaient montrer que de hauts responsables de l’agence d’espionnage avaient contribué à attiser les protestations. À l’époque, l’agence de renseignement avait qualifié ces informations de « complètement fausses et absurdes ».