Netanyahu refuse encore de dire s’il se conformera à la décision de la Cour
Le Premier ministre promet que le pays ne sombrera pas dans une guerre civile à cause de la refonte judiciaire, alors qu'il se confie auprès des médias US, tout en ignorant la presse du pays
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a une nouvelle fois refusé de dire si le gouvernement s’engagera à se conformer à une éventuelle invalidation par la Haute Cour de la loi du « caractère raisonnable » adoptée par la Knesset la semaine dernière, qui réduit le contrôle judiciaire sur les décisions des représentants élus.
Interrogé par NBC News dans une interview diffusée lundi, le Premier ministre n’a pas répondu directement à la question de savoir s’il se conformerait à une telle décision potentielle.
« Je pense que nous devons suivre deux règles. La première est que les gouvernements israéliens respectent les décisions de la Cour suprême. D’autre part, la Cour suprême respecte les Lois fondamentales [telles que la loi adoptée la semaine dernière], qui sont ce qui se rapproche le plus d’une constitution », a déclaré Netanyahu.
« Je pense que nous devrions conserver ces deux principes, et j’espère que nous y parviendrons. »
Pressé par l’intervieweur de préciser qu’il s’engagerait à suivre une telle décision, le Premier ministre a de nouveau esquivé la question.
« Rappelez-vous ce que j’ai dit. J’espère qu’ils ne l’annuleront pas, parce que je pense que nous devons respecter les deux règles », a déclaré Netanyahu.
« C’est une chose particulière. En termes américains, ce serait comme si la Cour suprême, qui est chargée de veiller au respect de la constitution, annulait un amendement constitutionnel pour cause d’inconstitutionnalité. C’est une sorte de retournement de situation qui n’a pas de sens. J’espère que cela ne se produira pas », a-t-il déclaré.
Contrairement aux États-Unis, Israël n’a pas de constitution ni de corps législatif indépendant de la branche exécutive du gouvernement, de sorte que la Cour suprême est pratiquement le seul organe de contrôle de l’exécutif. En outre, les amendements à la Constitution américaine doivent être adoptés par un vote des 2/3 de la Chambre des représentants et du Sénat, alors que la récente législation israélienne a été adoptée par 64 voix pour et 0 contre, l’ensemble des 56 membres de l’opposition ayant boycotté le vote en signe de protestation.
WATCH: Israeli Prime Minister Netanyahu tells @rafsanchez "there won't be civil war" after passing the first part of his controversial judicial overhaul.
Netanyahu: "When the dust settles, people will see that Israel's democracy has been strengthened and not weakened." pic.twitter.com/ubgBVpeA6U
— Meet the Press (@MeetThePress) July 31, 2023
Dans l’interview accordée à la chaîne NBC, Netanyahu a également déclaré qu’en dépit des manifestations de masse et des bouleversements sociétaux provoqués par le paquet de réformes litigieux de son gouvernement radical visant à affaiblir considérablement le pouvoir judiciaire, il ne pensait pas que le pays sombrerait dans la guerre civile.
« Il n’y aura pas de guerre civile, je vous le garantis », a déclaré Netanyahu. « Mais je pense qu’il est important de corriger les déséquilibres de la démocratie israélienne, où le pouvoir judiciaire s’est attribué presque tous les pouvoirs de l’exécutif et du législatif. »
« Je pense que lorsque la poussière retombera, les gens verront que la démocratie israélienne sera renforcée et non affaiblie », a-t-il ajouté. « Je pense que les craintes des gens, qui ont été attisées et renforcées, s’apaiseront et qu’ils verront qu’Israël est tout aussi démocratique qu’avant, et même plus démocratique. »
Le chef du parti HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, le président Isaac Herzog et de nombreux responsables de la sécurité ont averti que le pays pourrait sombrer dans la guerre civile à cause de cette loi. Un sondage réalisé la semaine dernière par la Treizième chaîne a révélé que 56 % des Israéliens craignaient une guerre civile.
Le Premier ministre est au cœur d’une campagne éclair d’interviews avec les médias internationaux, alors qu’il continue d’éviter de s’asseoir avec les principaux organes de presse israéliens.
La semaine dernière, lors d’une interview accordée à CNN, Netanyahu a également refusé de dire s’il se conformerait à une éventuelle décision de justice contre la législation, déclarant qu’il s’agirait d’un « territoire inconnu ».
Un jour plus tard, le Bureau du Premier ministre a publié une clarification dans laquelle il a déclaré que « les gouvernements d’Israël respectent toujours les décisions de justice ».
Mais la déclaration ne s’engageait toujours pas clairement à le faire dans ce cas. Il a nuancé son apparente assurance en notant que, dans le même temps, « la Cour s’est toujours considérée comme obligée par les Lois fondamentales, auxquelles elle confère le statut d’une constitution ».
« Comme la majorité des Israéliens, le Premier ministre estime que ces deux principes doivent être maintenus », précise le communiqué.
La législation très controversée du gouvernement, adoptée la semaine dernière, qui empêche le contrôle judiciaire des décisions gouvernementales et ministérielles sur la base de leur « caractère raisonnable », est un amendement à la Loi fondamentale d’Israël : Le pouvoir judiciaire.
La Cour suprême n’a en effet jamais annulé les modifications apportées à une Loi fondamentale, mais jamais un texte législatif relatif à la Loi fondamentale n’a suscité autant de remous et de divisions au sein de l’opinion publique que la loi votée lundi.
Les opposants à la loi ont déclaré que l’adoption d’un texte législatif aussi important à une faible majorité (64 des 120 membres de la Knesset) et à un rythme aussi effréné – qui n’a pas laissé beaucoup de temps pour les délibérations ou un examen approfondi – pourrait et devrait amener la Cour à envisager de prendre des mesures dans ce cas.
La Haute Cour de justice entendra les huit recours contre la loi le 12 septembre, convoquant pour la première fois un panel de 15 juges pour les audiences.
La présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, a déclaré lundi qu’elle avait décidé que tous les juges de la Cour présideraient l’audience extrêmement importante et potentiellement explosive sur la loi du « caractère raisonnable ».