Pour décapiter le Hezbollah, Israël doit détruire les laboratoires d’armement iraniens en Syrie – expert
L'Alma Center préconise de tarir l'approvisionnement en armes du groupe terroriste chiite et avertissent qu'ils pourraient mettre la main sur l'arsenal chimique d'Assad
Début septembre, l’armée israélienne aurait effectué un raid sur une installation d’armement dans la région de Masyaf, dans le nord-ouest de la Syrie, faisant au moins 14 morts et 43 blessés.
Selon les médias internationaux et des informations israéliennes non confirmées, l’opération était particulièrement audacieuse. Des sources de sécurité citées par Eva Koulouriotis, spécialiste grecque du Moyen-Orient, affirment que les hélicoptères israéliens n’ont pas atterri mais sont restés en vol stationnaire au-dessus de la cible, tandis que les forces spéciales descendaient en rappel le long de cordes, atterrissaient sur le sol, saisissaient des équipements et des documents et détruisaient la structure.
Le site avait été pris pour cible à de multiples reprises par le passé. La zone de Masyaf abrite des installations du Centre d’études et de recherches scientifiques (CERS), qui possède des antennes dans toute la Syrie.
Selon des experts israéliens, le réseau du CERS a été transformé en une structure armée aux mains du régime iranien. La région de Masyaf, en particulier, abrite six sites de l’Institut 4 000 du CERS, qui se concentre sur le développement et la production de projectiles de précision à moyenne portée utilisés par le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah.
Dans un document de synthèse publié en mars, l’Alma Research and Education Center, une organisation israélienne à but non lucratif financée par des dons privés qui se concentre sur la sécurité à la frontière nord d’Israël, a recommandé de mener une frappe à grande échelle sur toutes les installations du CERS en Syrie. Dans une récente interview accordée au Times of Israel, Tal Beeri, le directeur du département de recherche d’Alma, qui a servi pendant des décennies dans les unités de renseignement de Tsahal, a réitéré ce conseil, au vu de l’opération terrestre lancée par Israël au Liban et de l’escalade des tensions avec Téhéran.
Le CERS sert officiellement d’appareil national de l’industrie militaire syrienne et emploie environ 20 000 personnes parmi les chercheurs, les ingénieurs et les officiers militaires dans au moins 18 installations réparties dans tout le pays, selon l’Alma Center.
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Last Thursday night, around 11:00, residents of western and central Syria heard the sounds of a large number of huge explosions in the direction of the Masyaf area near the Syrian-Lebanese border. These explosions were not the… pic.twitter.com/sWuks7K0PI— Eva J. Koulouriotis | إيفا كولوريوتي (@evacool_) September 11, 2024
L’institut spécialisé CERS 4 000 produit des drones, des bombes et des carburants, et travaille également à l’amélioration des capacités armées d’autres milices terroristes soutenues par l’Iran en Syrie et au Liban, a écrit Alma dans un récent rapport.
Ces dernières années, le régime iranien aurait étendu son contrôle sur le CERS et l’Institut 4 000 en particulier, dans le double but de développer un meilleur arsenal pour ses mandataires et de raccourcir considérablement la chaîne d’approvisionnement en armes du Hezbollah.
« La livraison de missiles par voie terrestre depuis l’Iran à travers l’Irak et la Syrie peut prendre des jours, et les livraisons sont exposées à des frappes aériennes israéliennes en cours de route », a expliqué Beeri. « Par voie maritime, l’expédition prend onze jours, et par voie aérienne, les quantités pouvant être envoyées sont limitées. »
« Le CERS est devenu un atout stratégique pour Téhéran, car il permet d’économiser les efforts logistiques liés au transfert d’armes depuis l’Iran. En outre, l’Iran le considère comme un ‘moteur de croissance’ pour le développement et la production d’armes telles que des missiles de précision et des drones pour le Hezbollah et les milices en Syrie », a poursuivi Beeri.
La prise de position du document de synthèse publié en mars recommandait de procéder à une frappe de grande envergure sur toutes les installations du CERS basées en Syrie, car une telle attaque « affecterait grandement les efforts du Hezbollah pour récupérer, réarmer et restaurer ses capacités armées », a déclaré Beeri.
En outre, elle enverrait un signal fort à la République islamique, alors que les tensions s’intensifient entre Jérusalem et Téhéran à la suite du lancement massif, le 1er octobre, d’environ 200 missiles balistiques iraniens sur Israël.
Beeri a indiqué qu’il n’était pas clair pourquoi une telle attaque préventive à grande échelle sur les sites du CERS n’avait pas encore été menée, ajoutant que certaines des installations sont situées sous terre.
Le raid de septembre sur le centre CERS de Masyaf, que beaucoup imputent à Israël, a probablement été « conséquent », même si l’on n’en connaît pas la portée exacte, a noté Beeri. Mais toutes les frappes contre le réseau de recherche et de développement d’armes ont été des « tentatives de contenir l’incendie, et non de l’éteindre ».
« Les frappes n’ont pas entaché la détermination de Téhéran », a-t-il ajouté.
Le site principal de l’Institut 4 000 dans la région de Masyaf avait déjà été gravement endommagé lors d’une frappe aérienne imputée à Israël en août 2022. Les médias syriens avaient rapporté que des avions de lutte contre les incendies avaient été mobilisés pour éteindre les feux dans la zone, qui brûlaient toujours près de deux jours après l’attaque, ce qui laisse supposer la présence de produits chimiques inflammables.
Syria: photo taken few minutes ago. Major blasts still heard in outskirts of Masyaf ~one hour after Israeli bombardment. pic.twitter.com/K7VPw0hosJ
— QalaatM (@QalaatM) August 25, 2022
Déterminé à poursuivre son utilisation de la structure, le régime iranien a presque immédiatement entrepris la reconstruction du site, en engageant des entreprises de construction liées à son bras armé, le Corps des Gardiens de la Révolution islamique (CGRI), selon l’Alma Center.
Les armes chimiques d’Assad entre les mains du Hezbollah
Les armes chimiques font partie intégrante de l’arsenal du régime du dictateur syrien Bashar el-Assad, même si le pays s’est engagé à les détruire en 2013 en adhérant à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.
Selon des rapports internationaux, l’armée d’Assad les a utilisés contre ses opposants dans les années qui ont suivi son prétendu désarmement, et pas plus tard qu’en 2018 à Douma, dans la banlieue de Damas. Certaines de ses opérations anti-insurrectionnelles ont impliqué l’utilisation du gaz neurotoxique mortel Sarin.
« Nous ne pouvons pas exclure un scénario dans lequel ces substances tomberaient entre les mains du Hezbollah. Ce n’est pas très probable, mais c’est possible », a déclaré Beeri. L’Alma Center a publié un rapport sur ce scénario en août.
L’utilisation de ces substances par le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah n’est pas considérée comme probable au stade actuel, car leur manipulation et leur stockage nécessitent des installations et un savoir-faire spécifiques.
« Nous savons avec certitude que la Syrie en possède, mais nous ne savons pas ce qu’il en est du Hezbollah », a indiqué Beeri.
Toutefois, si le groupe terroriste libanais était déterminé à mener une guerre chimique contre Israël, il aurait d’autres options.
« Le chlore, par exemple, est une substance très primitive, couramment utilisée à des fins civiles et industrielles. Il peut être facilement obtenu, stocké et inséré dans la tête des obus de mortier et des roquettes, et il est mortel. Même [le groupe terroriste sunnite État islamique] EI en Syrie l’a utilisé contre les forces d’Assad », a ajouté Beeri.
Routes de contrebande vers le Liban
Un autre moyen pour Israël d’empêcher les projectiles fabriqués en Syrie de tomber aux mains du Hezbollah est de couper la chaîne d’approvisionnement qui mène au Liban.
À cet effet, Tsahal a récemment mené des frappes aériennes contre les postes-frontières entre les deux pays, notamment celui de Masnaa, situé sur l’autoroute entre Beyrouth et Damas, afin d’empêcher les camions de l’emprunter tout en permettant aux personnes déplacées fuyant le Liban pour se rendre en Syrie de le faire.
Le 4 octobre, l’armée israélienne a également pris pour cible un tunnel de plus de trois kilomètres de long qui passait sous la frontière et était utilisé pour faire passer des armes au Hezbollah.
Néanmoins, le groupe terroriste chiite libanais dispose toujours
« d’énormes quantités d’armes », stockées en divers endroits du Liban, a souligné Beeri.
« Même le [groupe terroriste palestinien du] Hamas, un an après le début de la guerre, parvient encore à lancer des missiles de manière sporadique. Même avec Tsahal à l’intérieur de la bande de Gaza, il parvient encore à produire de petites quantités de projectiles », a-t-il déclaré.
Le Hezbollah est entré en guerre avec des stocks d’armes bien plus importants que ceux du Hamas, répartis sur une zone bien plus vaste que la bande de Gaza, et sera en mesure de mener une guerre d’usure contre Israël pendant longtemps.
« Nous savons que, même après le début de la guerre, le Hezbollah a continué à recevoir des armes iraniennes. Il a tiré des missiles Almas flambant neufs fabriqués en 2023 », a ajouté l’expert.
« Nous devons interrompre la chaîne d’approvisionnement afin de commencer à assécher l’arsenal du Hezbollah, mais il s’agit d’un effort à très long-terme », a-t-il estimé.
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