Service militaire : l’exemption des haredim coûtera cher à Israël, avertit le Trésor
Selon les Finances, le coût annuel des réservistes est de 8 milliards de dollars et pourrait être allégé en incorporant davantage d'ultra-orthodoxes dans les unités de combat
Les responsables du Trésor se sont formellement opposés à une proposition de loi gouvernementale réglementant les exemptions de conscription pour les ultra-orthodoxes, avertissant qu’elle « aurait des effets économiques négatifs de grande portée » pour le pays, selon un document de synthèse obtenu par le Times of Israel.
Selon une analyse interne de l’impact économique de la législation publiée par le département du budget du ministère des Finances, le projet de loi, visant à dispenser les hommes ultra-orthodoxes de service militaire, présente des « défauts importants » et échouerait à réduire le fardeau pesant sur les réservistes israéliens.
La chaîne d’information N12 a été la première à rapporter la position du Trésor dimanche soir.
Déjà avant le déclenchement de la guerre du 7 octobre 2023, l’absence de participation des membres de la communauté ultra-orthodoxe au marché du travail coûtait déjà des dizaines de milliards de shekels par an à l’économie. Selon le rapport, l’exemption militaire aggrave ce coût en imposant un fardeau supplémentaire aux réservistes, qui devrait se chiffrer à plusieurs milliards supplémentaires à l’avenir.
Citant les estimations de l’establishment de la Défense, la division du budget du ministère des Finances a déclaré que « les besoins sécuritaires actuels imposent une lourde charge » aux réservistes, obligeant des centaines de milliers d’entre eux à servir jusqu’à 60 jours, pour un coût annuel d’environ 30 milliards de shekels.
Recruter seulement 1 000 Haredim supplémentaires pour le service de combat chaque année permettrait d’offrir environ deux semaines de congé supplémentaires par an aux réservistes, selon un rapport qui qualifie les ultra-orthodoxes de meilleure ressource militaire inexploitée en Israël. Cependant, ces bénéfices ne s’appliqueraient pas si ces recrues se limitaient à des rôles non militaires dans le cadre du service national alternatif.
« Il existe un besoin économique certain d’augmenter le nombre de recrues de Tsahal issues de cette population de la manière la plus large possible », indique le rapport.
Il souligne également que « le service national ou ZAKA n’allège pas le fardeau du service de réserve militaire », faisant référence au groupe ultra-orthodoxe de recherche et de sauvetage.
Les dirigeants religieux et politiques haredim continuent de s’opposer fermement à tout effort visant à contraindre les membres de leur communauté à servir dans l’armée. Les exemptions dont bénéficie cette communauté depuis des décennies ont été remises en question en juin, lorsque la Haute Cour de justice a statué qu’il n’existait aucune base juridique pour maintenir un tel régime.
Les critiques dénoncent depuis longtemps ces exemptions, estimant qu’elles imposent un fardeau disproportionné au reste de la population. Ce sentiment s’est intensifié après le pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre en cours sur plusieurs fronts. Celle-ci a déjà fait plus de 780 morts parmi les soldats, tandis qu’environ 300 000 citoyens ont été mobilisés pour effectuer leur service de réserve.
Le fardeau de la guerre a contraint les réservistes à passer de longs mois en service, les empêchant de travailler. En temps normal, les réservistes sont tenus de servir un mois par an.
Un projet de loi soutenu par le gouvernement, visant à réviser la conscription des ultra-orthodoxes, est actuellement bloqué à la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset. Le président de cette commission, Yuli Edelstein (Likud), a déclaré que la loi ne serait adoptée que si un « large consensus » était atteint parmi les législateurs.
S’adressant à la commission la semaine dernière, le ministre de la Défense, Israel Katz, a plaidé pour que les objectifs annuels de recrutement soient fixés à un niveau qu’il a qualifié de raisonnable. Il a suggéré que la moitié des appelés éligibles pourraient être mobilisés, tandis que les autres poursuivraient leurs études dans les yeshivot.
Cependant, un rapport du ministère des Finances a rejeté cette approche, affirmant que permettre à certains de rester exemptés pour des études de Torah à temps plein compromettrait les efforts de recrutement.
« L’établissement d’objectifs généraux de recrutement conduirait à une réalité où, dans la pratique, aucun individu n’est contraint de s’enrôler, puisque l’obligation collective ne s’appliquerait à personne de manière spécifique », a poursuivi le ministère, qui insiste au contraire sur la nécessité de « l’application immédiate de sanctions économiques pour garantir la réussite du plan ».
Selon le ministère, la manière la plus efficace d’encourager l’enrôlement serait de restreindre les avantages financiers et sociaux accordés aux haredim engagés dans des études à temps plein dans les yeshivot. Cela inclurait la réduction des allocations familiales, des subventions pour la garde des enfants, des prestations du bitouah leoumi [la Caisse d’assurance nationale], des avantages fiscaux à l’achat d’une maison et des réductions de taxes municipales. Il serait également envisagé d’interdire l’obtention d’un permis de conduire ou la possibilité de voyager à l’étranger.
Le report ou l’annulation de ces sanctions « nuirait considérablement » aux efforts de conscriptions, a souligné le ministère. Cette déclaration intervient moins de deux mois après qu’un projet de loi visant à contourner une décision de la Haute Cour a été retiré de l’ordre du jour de la Knesset. Ce projet visait à autoriser les subventions publiques pour les garderies d’enfants dont les pères ultra-orthodoxes échappent à la conscription militaire.
L’armée a annoncé qu’elle avait actuellement besoin d’environ 10 000 nouveaux soldats, dont 75 % seraient affectés à des missions de combat, en raison de la guerre sur plusieurs fronts. Depuis le début du conflit, des mandataires soutenus par l’Iran au Liban, en Irak et au Yémen tirent quotidiennement sur Israël pour, disent-ils, afficher leur soutien à Gaza.
Le mois dernier, l’armée israélienne a envoyé 1 000 ordres de recrutement à des haredim, le premier lot sur les 7 000 prévus. Cette initiative a provoqué des protestations, des manifestants haredim bloquant l’autoroute Route 4 dans le centre d’Israël pour exprimer leur opposition.
Un porte-parole du ministre des Finances, Bezalel Smotrich, n’a pas répondu à une demande de commentaire.
L’équipe du Times of Israël a contribué à cet article.