Israël en guerre - Jour 568

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Un document du ministère de la Défense aurait proposé au Hamas la quasi-souveraineté à Gaza en 2023 – N12

Rédigé par le chef du COGAT, ce document top secret recommandait une proposition égyptienne de trêve à long-terme ; le chef d'état-major de Tsahal avait conseillé de le promouvoir

Le chef du Hamas dans la bande de Gaza, Yahya Sinwar, s'exprime lors d'un événement à Gaza City, le 30 avril 2022. (Crédit : Mahmud Hams/AFP)
Le chef du Hamas dans la bande de Gaza, Yahya Sinwar, s'exprime lors d'un événement à Gaza City, le 30 avril 2022. (Crédit : Mahmud Hams/AFP)

L’unité du ministère de la Défense qui est chargée de superviser la bande de Gaza avait élaboré un document quatre mois avant le pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre 2023, – un document qui recommandait l’établissement d’une éventuelle trêve à long-terme (hudna) avec le groupe terroriste à Gaza, selon un reportage télévisé qui a été diffusé samedi dans la soirée. Dans ce contexte, Israël aurait reconnu l’autorité du Hamas au sein de l’enclave, accordant à cette dernière un statut qui se serait apparenté à la souveraineté.

Ce document top secret, qui était intitulé « Programme pour une trêve à long-terme dans la bande de Gaza », avait été rédigé par le général de division Ghassan Alian, à la tête du COGAT (Bureau du coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires), et il avait été remis à de hauts responsables de la sécurité en date du 11 juin 2023, a indiqué la chaîne d’information N12.

Selon la chaîne, le plan avait été discuté le lendemain à l’occasion d’une réunion organisée par Herzi Halevi, qui était alors le chef d’état-major de l’armée israélienne. La recommandation qui avait été faite par Halevi avait été de faire avancer cette idée avec pour objectif « de donner une meilleure orientation à la bande de Gaza ».

La possibilité de mettre en place une trêve à long-terme avec le Hamas était ainsi encore considérée comme viable seulement quelques jours avant l’attaque sanglante du Hamas, a fait remarquer le reportage qui a affirmé que le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense de l’époque, Yoav Gallant, avaient envoyé une délégation du COGAT et du Shin Bet au Caire dix jours avant le massacre pour voir s’il était envisageable de promouvoir un tel projet.

La proposition de trêve qui avait été présentée dans le document d’Alian, en date du 11 juin 2023, avait été initiée par l’Égypte, a noté N12. Les efforts livrés par Israël pour la faire avancer soulignent à quel point le Hamas avait su tromper l’État juif en lui faisant croire que le groupe terroriste recherchait le calme et la souveraineté à long-terme au sein de l’enclave côtière alors même qu’il se préparait méticuleusement au massacre du 7 octobre.

De plus, le reportage qui a été diffusé à la télévision a indiqué que la politique israélienne au niveau pratique – avec notamment le soutien qui a été apporté par la hiérarchie politique à des années de financements qataris, en espèces, en direction de la bande et à des paiements importants qui avaient été faits à l’UNRWA (l’agence controversée des Nations unies pour les réfugiés palestiniens) et qui ont également compris d’importantes liquidités – avait été au cœur de la machine de guerre du Hamas. Dans la période qui avait précédé le 7 octobre, selon le reportage télévisé, Israël avait même autorisé l’importation de pneus de motos à Gaza, permettant aussi l’entrée de métal, un métal qui avait été utilisé par le Hamas pour fabriquer des roquettes et les produits chimiques qui devaient servir à les lancer.

La proposition de trêve qui était détaillée dans le document du 11 juin 2023 « appelait essentiellement à reconnaître l’autorité du Hamas à Gaza, [et] à lui accorder la souveraineté – avec presque le statut d’un État », a expliqué le reportage télévisé.

Le général de division Ghassan Aliane, chef de la coordination des activités du gouvernement israélien dans les territoires (COGAT) arrivant à la Cour suprême de Jérusalem pour une audience sur l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, le 21 juillet 2024. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le document d’Alian avait été envoyé aux chefs du Shin Bet, du Mossad, au chef d’état-major de Tsahal et à d’autres hauts-responsables de Tsahal, ainsi qu’au patron direct du chef du COGAT à l’époque, Gallant.

Selon le reportage, le document établissait que les circonstances et la situation sur le terrain « ont créé l’opportunité de faire avancer l’idée d’une hudna par le biais de nos partenaires : les Égyptiens et les Qataris ».

« Ces conditions garantissent la stabilité à long-terme et elles limitent le renforcement du Hamas dans la bande de Gaza. Il est évident que le Hamas s’intéresse à la promotion d’un accord portant sur d’éventuels arrangements, une initiative qui renforcerait les éléments les plus modérés au sein de la direction du Hamas à Gaza ».

Le reportage télévisé a noté que Yahya Sinwar, instigateur du 7 octobre, avait déclaré en 2006, dans le cadre d’une interview accordée à la chaîne d’information N12 alors qu’il était incarcéré dans une prison israélienne, qu’il était intéressé par une trêve à long-terme, ce qui « permettrait le maintien du calme pour notre génération et peut-être même pour la suivante » – des propos qui soulignent, avec le recul, la stratégie de duplicité de longue date qui aura précédé le pogrom de 2023.

La chaîne a également diffusé un enregistrement de Halevi datant du début du mois – où il reconnaît devant les résidents du kibboutz Nir Oz que le Hamas a « réussi à nous duper » avant l’attaque sanglante « en nous faisant croire qu’il cherchait à instaurer un calme à long-terme ». Le Hamas avait contacté le COGAT et la division de Gaza au sein de l’armée israélienne pour demander que les enfants de Gaza atteints d’un cancer soient soignés au sein de l’État juif – « ce qui constituait un signe ostensible de désir de coopération dans le but de nous endormir et de préparer le terrain », a ajouté Halevi.

Le reportage a fait savoir qu’au mois de mai 2023, Sinwar avait même décidé de la date précise du 7 octobre pour son invasion. À peu près au même moment où le chef du Hamas, à Gaza, avait pris cette décision, l’Égypte avait présenté la proposition de trêve à long-terme à une délégation israélienne au Caire – une délégation qui comprenait des représentants du Shin Bet et de Tsahal, et qui était placée sous la direction d’Alian. Au retour des Israéliens, le COGAT avait formé une équipe composée de membres du Shin Bet et de la division du sud de Tsahal pour travailler sur l’idée, ce qui avait permis d’élaborer le document qui avait été présenté par Alian, le mois suivant.

Selon N12, le Hamas maintenait à l’époque un dialogue avec Israël et il prétendait être uniquement intéressé par l’amélioration de la situation économique de Gaza.

« Le Hamas est profondément préoccupé par l’idée d’une escalade vers un autre conflit à l’heure actuelle », a dit la chaîne d’information, reprenant les termes du document. « Il est très préoccupé par cette situation et c’est notamment le cas de ses dirigeants et de l’aile militaire du groupe ».

Dans son document, le COGAT faisait également une distinction entre le Hamas, qui, selon lui, faisait preuve d’un leadership responsable et qui cherchait à obtenir la souveraineté pour la bande de Gaza, et le groupe terroriste palestinien du Jihad islamique, de moindre envergure. « Le Jihad islamique conteste la nouvelle politique du Hamas à l’égard d’Israël », était-il écrit dans le document.

Évoquant les implications de la trêve, le document parlait de « l’acceptation dans la pratique du pouvoir du Hamas, avec l’autorisation donnée d’asseoir son influence sur le front palestinien et un élargissement de ses liens avec les acteurs régionaux ».

Le document recommandait de « vérifier avec les Égyptiens la viabilité d’une trêve à long-terme », soulignant que « la logique de la trêve est basée sur la mise en place d’une initiative égyptienne, et non d’une initiative israélienne ».

Halevi avait réuni des hauts responsables de Tsahal, dont le chef d’état-major adjoint et le chef de l’armée de l’air, pour une discussion, le 12 juin, qui était consacrée au « régime de sécurité à Gaza ». Le document soumis par Alian avait été débattu à cette occasion.

Selon le reportage, la recommandation faite par Halevi à la fin de cette discussion avait été d’œuvrer avec les médiateurs en vue de l’amélioration de la situation à Gaza sous la forme d’une « hudna« .

Au mois de juillet 2023, le cabinet avait organisé sa première réunion sur le sujet de Gaza depuis son entrée en fonction au mois de décembre précédent. Placé sous la direction de Netanyahu, le cabinet avait accepté de « faire avancer l’accord civil avec le Hamas, tout en insistant sur le maintien des exigences d’Israël à cet égard, en coordination avec les étapes définies par le COGAT », a signalé la chaîne N12 sans entrer dans les détails.

Elle a indiqué que le Conseil national de sécurité avait également présenté des projets lors de la réunion, notamment « un effort qui vise à maintenir le calme à long-terme en examinant des solutions à long-terme en vue d’une stabilité prolongée ».

Le reportage a noté que les chefs politiques et que les responsables de la sécurité en Israël avaient enregistré les déclarations du Hamas sur son désir de maintien du calme, faisant le choix d’ignorer tous les messages contraires que le groupe diffusait dans les médias arabes, où il lançait des appels au Jihad constants. La chaîne a cité un discours qui avait été prononcé par Sinwar au mois de mai 2022, discours où il appelait les Palestiniens à attaquer les Israéliens avec toutes les armes qu’ils étaient susceptibles d’avoir à leur disposition – fusils, haches ou hachoirs – ainsi qu’une série télévisée qui avait été diffusée sur Hamas TV la même année, qui montrait une invasion du sol israélien.

La chaîne a aussi déclaré que Netanyahu avait non seulement encouragé les financements qataris pour Gaza, mais qu’il était également intervenu pour maintenir l’acheminement de fonds en direction de l’UNRWA – des fonds qui avaient notamment été versés en espèces – après que le président Donald Trump a cessé de financer l’organisme de l’ONU en 2018. Tsahal a fait savoir, au mois de mars 2024, que plus de 450 agents du Hamas et du Jihad islamique travaillaient pour l’UNRWA.

De gauche à droite : Le ministre de la Défense Yoav Gallant, le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le chef d’état-major de l’armée israélienne Herzi Halevi et le directeur de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet Ronen Bar dans la salle d’opérations spéciales supervisant une mission de libération d’otages dans la bande de Gaza, le 8 juin 2024. (Crédit : Agence de sécurité intérieure du Shin Bet)

Selon le reportage, la proposition de trêve d’Alian avait reflété la politique adoptée par Israël à la veille du 7 octobre – mais elle n’a toutefois été mentionnée dans aucune des enquêtes consacrées au 7 octobre qui ont pu être menées par l’armée jusqu’à présent.

La chaîne n’a pas précisé si l’enquête consacrée au pogrom qui a été lancée par le COGAT faisait référence au document, mais elle a néanmoins noté que ni Halevi, ni son successeur, Eyal Zamir, n’avaient demandé à consulter l’enquête du COGAT à ce jour.

Elle a également expliqué que si le chef du COGAT devait être interrogé au sujet de ce document, des questions devraient également être posées à Gallant et à Netanyahu. « De telles investigations montreraient que le gouvernement a initié et imaginé l’idée d’une accalmie potentielle à long-terme avec le Hamas, conjointement avec le COGAT ».

Dans une réponse au reportage, le COGAT a déclaré à la chaîne que le document d’Alian « présentait une proposition égyptienne datant du mois de juin 2023, et non une initiative israélienne ». Il a ajouté que les discussions à ce sujet « se sont déroulées conformément à la politique mise en place par les dirigeants israéliens ».

Gallant, de son côté, a répété qu’il appelait à la formation d’une commission d’enquête d’État sur le pogrom du 7 octobre, commission dont le travail couvrirait au moins la dernière décennie. Il s’est dit prêt à être interrogé dans ce cadre.

Le Shin Bet, Tsahal et le bureau de Netanyahu n’ont pas répondu aux questions posées par la chaîne N12.

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