Un étudiant juif de Columbia se dit harcelé par de violents manifestants anti-Israël
Selon Noah Lederman, l'atmosphère toxique du campus lui a valu d'être plaqué contre un mur lors d'une manifestation co-organisée et approuvée par des organisations étudiantes

NEW YORK – Noah Lederman, étudiant de l’Université Columbia, confie ne pas encore mettre de mots sur ce qu’il a ressenti lorsqu’un manifestant anti-Israël l’a plaqué contre un mur de briques, puis lui a dit de « continuer à courir ».
« Tout l’après-midi m’a semblé totalement dystopique. Il y a eu de nombreuses manifestations sur le campus depuis le 7 octobre. Je m’y suis habitué ; je connais tous les slogans. Mais celle-ci semblait différente », explique Lederman, étudiant juif de première année originaire du comté d’Orange, en Californie.
« Il y avait des policiers partout et des haut-parleurs qui disaient aux manifestants de ne pas bloquer les rues. Il y avait des hélicoptères dans le ciel gris. Je ne saurais dire à quel point j’ai eu peur. »
L’incident s’est produit en fin d’après-midi, le 2 février dernier, après que plus de 500 manifestants pro-Palestiniens se sont rassemblés pour la manifestation « Tous pour la Palestine ».
Cette manifestation était organisée par Within Our Lifetime, groupe violemment anti-Israël qui a exprimé son soutien au massacre du 7 octobre mené par le Hamas qui a coûté la vie à 1 200 personnes brutalement assassinées dans le sud d’Israël, en majorité des civils, et fait 253 otages séquestrés dans la bande de Gaza. Columbia University Apartheid Divest avait co-organisé cette manifestation, soutenue par plus de 80 organisations du campus.
Lederman avait décidé de prendre part à une petite contre-manifestation en soutien à Israël pour accompagner un ami.
« J’ai l’impression qu’il est de mon devoir de défendre mes frères et sœurs en Israël. En outre, je détesterais être seul lors d’une manifestation », confie-t-il au Times of Israel, dans les locaux du Columbia Hillel.

Lederman explique avoir décidé de quitter les lieux lorsque les manifestants pro-palestiniens scandant des slogans et brandissant des banderoles ont commencé à marcher vers le sud, sur Broadway. Il a trouvé refuge dans la librairie Book Culture de la 115e rue, où il a retrouvé son colocataire. Les deux jeunes hommes ont ensuite mis le cap vers le nord, dont ils pensaient que ce serait le moyen le plus sûr de rallier leur dortoir.
« Je pensais que tout irait bien. Je me dirigeais vers mon dortoir et les manifestants, dans une autre direction. Nous étions en plein jour. Les manifestations semblent toujours violentes, mais jamais physiquement », explique Lederman.
Arrivés au niveau de la 120e rue, ils aperçoivent un groupe de manifestants qui semble marcher dans leur direction. Lederman, vêtu d’un T-shirt aux couleurs du drapeau israélien et d’une kippa, confie avoir baissé la tête et avoir pressé le pas au moment de croiser le groupe.
C’est à ce moment-là qu’un homme portant un keffieh, le foulard traditionnel pour hommes devenu un symbole du nationalisme palestinien, aurait repéré le t-shirt de Lederman et donné l’ordre aux manifestants de se déployer. Avant que Lederman comprenne ce qui lui arrivait, dit-il, il s’est senti poussé contre le mur, incapable de bouger.
« Le temps m’a paru une éternité, mais quand j’ai vu les images des caméras de sécurité, je me suis aperçu que cela n’avait duré que quelques secondes. Tout cela me paraît un peu flou : je suis encore dans la phase de digestion de ce qui s’est passé. Il y avait tellement de haine, c’était effrayant », confie-t-il.
Il a réussi à se libérer de l’emprise et prendre la fuite. Dans sa course, se rappelle Lederman, l’homme lui a crié : « Continue de courir. »

Lederman a signalé l’incident à la police et au département de la sécurité publique de l’université. Selon Columbia, c’est à la police new-yorkaise de mener l’enquête puisque l’incident présumé s’est produit en dehors du campus.
Lederman se dit moins inquiet des motivations de l’homme qui l’a agressé que de l’ambiance générale qui a permis à un tel incident de se produire, signe, pour lui, de l’atmosphère toxique qui règne sur le campus de Columbia depuis le 7 octobre.
« Columbia a laissé les choses se répandre… La tolérance à l’égard de la violence engendre la violence », résume-t-il. « L’atmosphère qui règne sur le campus fait que ces manifestants se sentent intouchables. Je veux que l’université rende des comptes. »
Columbia est l’un des très nombreux établissements à faire l’objet d’une enquête du Bureau des droits civils du ministère de l’Éducation des États-Unis pour harcèlement antisémite présumé sur leur campus de la part d’organisations étudiantes dûment enregistrées. Le fait que ce service mène l’enquête suppose l’existence d’indices d’infractions à la loi sur les droits civils.
En vertu du titre VI de la loi de 1964 sur les droits civils, les universités destinataires de fonds publics fédéraux doivent protéger les étudiants contre toute discrimination fondée sur la race, la couleur ou l’origine. Cela inclut les juifs, les musulmans et d’autres groupes ethniques ou religieux ayant une « ascendance commune ». L’université risque de ne plus bénéficier de fonds publics fédéraux en cas d’infraction avérée aux droits civils.
Au-delà du seul incident qui le concerne, Lederman se dit favorable à ce que le campus mette en place des enseignements sur la question.
« Nous avons ici d’excellents chercheurs, des esprits brillants… Il suffit de mettre sur pied un comité composé des meilleurs spécialistes des droits de l’homme, du droit et de l’histoire, quelque chose d’ouvert et d’attrayant pour tous les étudiants », conclut-il. « Car la première cause de la haine, c’est l’ignorance. »