« Est-ce l’ONU qui a mon fils ? » demande la mère d’un otage assassiné alors que l’UNRWA est critiquée
Le Forum des otages et des proches de disparus a diffusé la vidéo de l'enlèvement du corps par un employé de l'agence ; des militants dénoncent un système qui a permis à ses membres de participer au 7 octobre
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

Le Forum des otages et des proches de disparus a tenu une conférence de presse, mercredi soir, pour diffuser une vidéo du 7 octobre donnant à voir un employé de l’UNRWA, au volant d’une jeep blanche de l’ONU, en train d’enlever le corps de l’Israélien Jonathan Samerano, tué par des terroristes du Hamas.
Sur les images d’une caméra de surveillance, on voit un SUV blanc entrer à l’intérieur du kibboutz Beeri, l’une des communautés les plus durement touchées le 7 octobre, s’arrêter devant trois corps gisant sur la route et sur le trottoir, à côté d’une glacière renversée. Deux hommes en sortent et traînent le corps de Samerano, qu’ils chargent à l’arrière du véhicule.
« Est-ce l’ONU qui détient mon fils ? », a demandé Ayelet Samerano, la mère de Jonathan, lors de la conférence de presse. « Savent-ils où il est ? Rendez-le-moi – y a-t-il d’autres otages détenus par des employés de l’ONU ? Au moment même où nous parlons ? Où est mon fils ? »
Âgé de 21 ans, Samerano était un jeune DJ « plein de vie, toujours souriant, toujours en train de plaisanter », a rappelé sa mère en sanglots. « Ses seules armes étaient son sourire, son bonheur et son charme. »
Samerano se trouvait à la rave dans le désert Supernova, le 7 octobre, attaquée par des terroristes. Il s’était réfugié dans le kibboutz Beeri au moment de l’attaque du Hamas mais il a été tué lorsque des terroristes ont assailli la communauté. Sa dépouille a ensuite été prise en otage.

C’est la chaîne Telegram « South First Responders » qui a diffusé la première cette vidéo, dès le 10 octobre, soit trois jours seulement après l’attaque brutale du Hamas.
L’homme que l’on voit sortir du véhicule pour s’emparer de la dépouille de Samerano a été identifié vendredi par le ministre de la Défense Yoav Gallant : il s’agit selon lui de Faisal Ali Mussalem al-Naami, travailleur social de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) dans la bande de Gaza.
Al-Naami est impliqué dans l’enlèvement de Samerano, a déclaré Shelly Aviv Yeini, cheffe de l’équipe juridique du Forum.
« La prise d’otages est un crime de guerre », a-t-elle expliqué, ajoutant que le Forum exigeait une enquête approfondie sur la question. « Nous demandons à l’UNRWA non seulement d’enquêter, mais aussi de communiquer en toute transparence avec les familles et le Forum. »

Jonathan Fowler, le porte-parole de l’UNRWA, a réagi à la vidéo en disant qu’il « n’est pas possible pour l’UNRWA de vérifier les images ou les photographies et de déterminer qui est cette personne. Aucune preuve ne nous a été présentée par les autorités israéliennes. »
« Mais dans la mesure où une enquête est menée par les plus hautes autorités de l’ONU, nous invitons tout pays, parti ou institution disposant d’informations – à commencer par des informations disponibles dans le domaine public – à les faire connaitre au Bureau des services de contrôle interne, au siège de l’ONU, pour faire avancer cette enquête », a-t-il déclaré.
L’ex-diplomate israélien Daniel Shek, à la tête de l’équipe diplomatique du Forum, a déclaré, lors de la conférence de presse, que tout au long de ses 30 ans de carrière, il avait vu que l’UNRWA « [accomplissait] un travail humanitaire incroyable », mais qu’il y avait toujours eu des problèmes d’inconduite au sein de l’organisation onusienne.
« Une vidéo comme celle-ci efface tout le bien que vous avez fait », a déclaré Shek en s’adressant aux dirigeants de l’agence, « ou devrait le faire. »

Shek a ajouté que ce n’était pas le rôle du Forum des otages et des proches de disparus – organisation bénévole créée dans les 72 heures qui ont suivi les attaques du 7 octobre pour aider les familles des otages – d’enquêter sur l’UNRWA et sa gestion, mais à l’organisation de « faire le ménage dans ses rangs ou de partir ».
« Ce sont les deux options », a-t-il ajouté. « Je ne veux pas croire que des gens comme cet homme qui a kidnappé Yonatan – et nous savons qu’il y en a d’autres – [je] ne veux pas imaginer qu’il n’y ait pas eu de signaux avant qu’il ne fasse quelque chose comme ça. »
Israël a révélé l’identité de 12 membres de l’UNRWA qui, selon lui, ont « activement participé » à l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre contre le sud d’Israël.
Lors de cette attaque, 3 000 terroristes venus de Gaza et dirigés par le Hamas ont franchi la frontière avec Israël par voie terrestre, aérienne et maritime, pour tuer près de 1 200 personnes et faire 253 otages de tous âges – pour la plupart des civils – sous des tirs de milliers de roquettes dirigés sur des villes israéliennes.
Le mois dernier, les États-Unis et des pays européens ont suspendu leur aide à l’UNRWA suite aux accusations portées par Israël contre des membres de son personnel. Des donateurs tels que la Grande-Bretagne et les États-Unis ont indiqué qu’ils ne reprendraient pas leur soutien tant que l’enquête interne de l’ONU sur ces allégations n’aurait pas rendu ses conclusions. Un rapport préliminaire doit être publié dans les toute prochaines semaines.
Parmi les membres du personnel qui auraient pris part aux attaques figureraient des enseignants qui travaillaient dans les écoles de l’UNRWA.
Gallant a déclaré vendredi dernier que l’UNRWA avait « perdu toute légitimité et ne pouvait plus agir comme organe de l’ONU » et qu’il avait demandé à l’armée israélienne et aux autorités de la Défense de confier la responsabilité de l’acheminement de l’aide à la bande de Gaza à d’autres organisations humanitaires.
Selon Gallant, sur les 13 000 employés de l’UNRWA à Gaza, 12 % au moins seraient affiliés aux organisations terroristes du Hamas et du Jihad islamique palestinien (JIP).
« On sait que 1 468 travailleurs sont actifs au sein du Hamas et du JIP : 185 employés de l’UNRWA sont actifs au sein des branches militaires du Hamas et 51 au sein de la branche militaire du JIP », a-t-il déclaré.