Loi sur la « raisonnabilité » adoptée, actions israéliennes et shekel en baisse
L'adoption de la première loi du paquet de réformes judiciaires augmente la prime de risque du pays; les agences de notation devraient placer Israël sous surveillance étroite - IBI
Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans les technologies pour le Times of Israel.
Les actions israéliennes ont subi de fortes pertes et le shekel s’est affaibli lundi, après qu’une loi largement controversée du paquet de réformes judiciaires a été adoptée par la Knesset et que les efforts antérieurs pour parvenir à un compromis ont échoué.
L’indice de référence TA-125 de la Bourse de Tel Aviv a chuté de 2,3 % et l’indice TA-35 des sociétés de premier ordre a baissé de 2,2 %, tandis que l’indice TA-90 était en baisse de 2,8 % à la clôture du marché à Tel Aviv. L’indice TA des cinq plus grandes banques a chuté de 3,9 % et l’indice TA-assurance et services financiers a baissé de 3,1 %.
Malgré d’importantes manifestations et une opposition publique massive, la Knesset a ratifié lundi une loi qui empêche les tribunaux israéliens d’examiner le critère du « caractère raisonnable » des décisions gouvernementales et ministérielles, la première loi majeure de la refonte judiciaire du gouvernement à être adopté. Le projet de loi a été adopté en troisième et dernière lecture par 64 voix pour et 0 contre, l’ensemble de l’opposition (56 membres) ayant boycotté le vote en signe de protestation.
Le shekel israélien a connu une évolution en dents de scie lundi, gagnant plus de 1 % à 3,58 contre le dollar américain plus tôt dans la journée, avant de s’affaiblir de 1 % pour s’échanger autour de 3,68.
« Jusqu’au dernier moment, les marchés israéliens ont espéré qu’un compromis sur les changements judiciaires prévus pourrait être atteint », a déclaré Rafi Gozlan, économiste en chef de IBI Investment House Ltd. au Times of Israel. « Si, avant le vote, le marché était optimiste quant à la conclusion d’un accord, après l’approbation finale du projet de loi, le marché local évalue maintenant l’augmentation de la prime de risque d’Israël et les dommages qu’elle pourrait causer à l’économie et aux investissements dans le domaine de la technologie. »
Avant le vote, les indices TA-35 et TA-90 ont augmenté respectivement de 4 % et de 2,5 % la semaine dernière, alors que les bourses américaines ont augmenté d’environ 2 % et que les marchés européens ont baissé. Le shekel s’est renforcé d’environ 0,5 % par rapport au billet vert au cours de la même période.

Quelque 200 entreprises du secteur de la high-tech, qui a été au premier plan des manifestations contre la refonte judiciaire au cours des 29 dernières semaines, et de grandes organisations juridiques ont autorisé leurs employés à faire grève lundi, afin de faire pression sur le gouvernement pour qu’il mette un terme à cette initiative législative, qui a incité des centaines de milliers de personnes à manifester pendant plusieurs jours. Parmi les start-ups participantes, on trouve Wix, Wiz, Papaya Global et Lemonade. Un important forum d’entreprises représentant 150 des plus grandes sociétés israéliennes avait également annoncé une grève pour lundi.
La principale préoccupation des milieux d’affaires et de la high-tech est que la refonte judiciaire proposée érodera la démocratie et affaiblira l’équilibre des pouvoirs, ce qui incitera les investisseurs en capital-risque et autres bailleurs de fonds à hésiter à investir leur argent dans le pays, déclenchant ainsi une fuite des fonds.
Près de 70 % des start-ups israéliennes ont déjà pris des mesures pour retirer des fonds et transférer des parties de leurs activités en dehors du pays en raison de l’incertitude créée par les changements judiciaires proposés, selon une enquête publiée cette semaine avant le vote crucial par Start-Up Nation Central, qui suit l’écosystème technologique local.
« Une prime de risque plus élevée signifie qu’il sera plus difficile pour les entreprises israéliennes, en particulier dans le domaine de la high-tech, de lever des fonds, car les investisseurs seront plus prudents pour investir dans l’industrie locale », a déclaré Gozlan.
Les start-ups israéliennes cotées en bourse aux États-Unis
Les entreprises high-tech israéliennes cotées en bourse aux États-Unis ont également été impactées. Plusieurs fonds négociés en bourse qui regroupent des entreprises israéliennes cotées en bourse aux États-Unis ont vu le prix de leurs actions chuter d’environ 1,5 % au cours de la matinée, alors que le reste du marché américain était orienté à la hausse. Parmi les principales sociétés israéliennes cotées à New York figurent Elbit, Wix, monday.com, SolarEdge et NICE Ltd.
« Les actions des entreprises israéliennes peuvent être particulièrement sensibles à l’évolution de la situation politique en Israël », a déclaré Guy Franklin, fondateur de Israeli Mapped in NY, qui suit l’évolution des start-ups israéliennes à New York. « Du fait que l’adoption de la loi suggère un changement dans la législation ou les politiques gouvernementales, les investisseurs réagissent aux implications potentielles pour les entreprises et les perspectives économiques dans le pays. »
Les agences de notation internationales, notamment Standard & Poor’s et Moody’s Investors Service, ont mis en garde ces derniers mois contre une détérioration de la gouvernance d’Israël et l’affaiblissement potentiel du système judiciaire et de la force institutionnelle du pays, et se sont inquiétées de l’aggravation des tensions sociales et politiques internes.
Jusqu’à présent, les agences de notation se sont abstenues d’abaisser les notes de crédit, car le gouvernement israélien, dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, a déclaré qu’il mettrait tout en œuvre pour parvenir à un large accord ou à une forme de consensus avec l’opposition et qu’il ne proposerait pas de législation unilatérale sur la refonte du système judiciaire.
Moody’s a abaissé la perspective de crédit d’Israël de « positive » à « stable » au mois d’avril, citant les bouleversements provoqués par la tentative du gouvernement de réformer radicalement le système judiciaire. En mai, S&P a confirmé la note favorable d’Israël à AA- avec une perspective « stable » sur l’hypothèse de base que « les tensions intérieures élevées seront finalement désamorcées et qu’une certaine forme de consensus sera établie ».
« Israël bénéficie de notes de crédit très favorables en raison de son économie résiliente et diversifiée et de la solidité de ses institutions », a déclaré Gozlan. « Les notes de crédit du pays dépendent du message du gouvernement et de son intention de parvenir à un large accord sur la refonte. »
« Maintenant qu’il y a une méfiance à l’égard des intentions exprimées, nous nous attendons à ce que les agences prennent des mesures, ce qui pourrait signifier qu’elles placent d’abord Israël sous ‘surveillance négative’ avant toute autre action de notation », a-t-il ajouté.
Luke Tress a contribué à cet article.