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Nous ne voulons pas de lois qui attisent la haine

La voix spirituelle du Shas promet que le parti n’initiera pas de lois nuisant aux laïcs

Le rabbin David Yosef, membre du Conseil des Sages de la Torah de Shas et fils de feu le rabbin Ovadia Yosef, dit vouloir "calmer les laïcs"

Une capture d'écran du rabbin David Yosef, décembre 2022. (Crédit : Capture d'écran via Twitter utilisée conformément à la clause 27a de la loi sur les droits d'auteur)
Une capture d'écran du rabbin David Yosef, décembre 2022. (Crédit : Capture d'écran via Twitter utilisée conformément à la clause 27a de la loi sur les droits d'auteur)

Un membre important du conseil d’administration spirituel du parti ultra-orthodoxe Shas a déclaré lundi qu’il avait demandé au chef du parti Aryeh Deri de ne plus introduire de projets de loi qui pourraient nuire à la population laïque d’Israël.

Le rabbin David Yosef, membre du Conseil des Sages de la Torah du parti et fils du rabbin Ovadia Yosef, le défunt chef spirituel du Shas, a déclaré qu’il voulait « rassurer les laïcs ».

« Nous n’avons aucune intention de faire passer des lois qui attiseront la haine et diviseront. Nous voulons unir. Nous voulons rassembler les gens. Nous ne cherchons pas à diviser », a déclaré Yosef dans une vidéo partagée par la Douzième chaîne lundi.

« Nous avons donné l’ordre à Deri et à nos députés de ne pas introduire de projets de loi qui restreindraient la population laïque. Nous ne cherchons pas à rapprocher les gens de Dieu par des menaces et des lois », a déclaré le rabbin rémunéré par l’État.

« Ceci n’est ainsi que nous fonctionnons. Nous ne choisirons pas la voie de la coercition », a poursuivi Yosef, évoquant une approche « d’amour et d’amitié, et de rapprochement des gens » qui, selon lui, était celle de son défunt père.

« Nous ne ferons pas la même chose que le gouvernement précédent », a-t-il déclaré, en référence à la coalition sortante, composée principalement de partis laïcs, notamment Yisrael Beytenu. Le chef de ce parti, Avigdor Liberman, se dispute depuis des années avec les partis ultra-orthodoxes à propos des subventions accordées aux institutions de la Torah haredis et du soutien du gouvernement par le biais des fonds publics, de l’absence de l’enseignement de matières fondamentales comme les mathématiques et l’anglais dans les écoles ultra-orthodoxes, des exemptions du service militaire obligatoire pour les étudiants des séminaires et de l’influence religieuse dans la vie civique israélienne.

Cet été, Liberman a provoqué la colère des communautés ultra-orthodoxes lorsque, alors qu’il était ministre des Finances, il a décidé de réduire le budget des garderies subventionnées et supervisées pour les enfants ultra-orthodoxes jusqu’à l’âge de trois ans.

Ces questions ont rallié les électeurs ultra-orthodoxes lors des dernières élections nationales du 1er novembre et ont permis à Shas et au parti Yahadout HaTorah d’obtenir respectivement 11 et 7 sièges. Tous deux feront partie de la nouvelle coalition de Benjamin Netanyahu, composée des partis religieux et d’extrême droite HaTzionout HaDatit, Otzma Yehudit et Noam, en plus de son propre parti de droite, le Likud.

Le député de Yahadout HaTorah, Moshe Gafni, a promis la semaine dernière que son parti ferait tout ce qui est en son pouvoir pour invalider les mesures prises par Liberman pendant son mandat.

Le Premier ministre sortant, Yair Lapid, fait lui aussi campagne depuis longtemps en faveur d’une plus grande intégration des communautés ultra-orthodoxes dans le monde du travail par le biais d’une réduction des subventions de l’État. Il est également partisan de l’introduction d’un programme d’études de base dans les écoles ultra-orthodoxes et de la fin des exemptions générales du service militaire obligatoire pour les étudiants des yeshivot.

Les partis ultra-orthodoxes n’ont pas oublié comment, lorsque Lapid était ministre des Finances entre 2013 et 2014 dans un gouvernement dirigé par le nouveau Premier ministre Benjamin Netanyahu qui n’incluait ni Shas ni Yahadout HaTorah, la Knesset avait voté à cette époque une loi imposant des sanctions pénales aux étudiants ultra-orthodoxes se soustrayant à la conscription militaire. Certaines clauses de cette loi ont été supprimées en 2015 après le retour au gouvernement des partis ultra-orthodoxes.

Ces dernières années, les partis ultra-orthodoxes se sont sentis ciblés par un certain nombre de projets de loi ou de changements qui, selon eux, affectent la vie quotidienne de leurs communautés, comme la taxe sur les boissons sucrées, entrée en vigueur en janvier dernier, une taxe sur la vaisselle jetable ou encore une mesure selon laquelle les compagnies de téléphonie mobile doivent permettre la mobilité du numéro complet sur les lignes dites casher, une mesure que de nombreux rabbins ultra-orthodoxes ont combattue avec véhémence.

De nombreux ultra-orthodoxes utilisent des téléphones dits « casher » – des appareils généralement dépourvus d’accès à Internet, de réseaux sociaux et de la plupart des autres applications, sur les conseils de rabbins. Les numéros de téléphone associés à ces appareils et lignes sont facilement identifiables.

Les factions ultra-orthodoxes du pays se sont également opposées aux partis laïcs et à la population sur la question des activités commerciales et culturelles le jour du Shabbat, ainsi que sur celle des transports publics entre le coucher du soleil le vendredi et le coucher du soleil le samedi soir.

En Israël, les bus et les trains ne circulent pas, en général, dans les villes à majorité juive du vendredi soir au samedi avant le coucher du soleil. Cette pratique est née d’un accord conclu entre la communauté ultra-orthodoxe et le premier Premier ministre israélien, David Ben Gourion, avant la formation de l’État.

Les Israéliens laïcs se plaignent depuis longtemps de leur mobilité réduite pendant le week-end. Les communautés ultra-orthodoxes protestent également depuis longtemps contre les travaux d’infrastructure et d’entretien des routes et des lignes ferroviaires pendant le Shabbat.

Changements importants

Lors d’un discours sombre prononcé la semaine dernière, Lapid a déclaré que le prochain gouvernement dirigé par Netanyahu n’était pas engagé en faveur de la démocratie ou de l’État de droit, et qu’il détruirait le système éducatif israélien, subventionnerait de manière disproportionnée la communauté ultra-orthodoxe, dégraderait l’économie, politiserait l’armée, provoquerait une explosion en Cisjordanie, saperait la réputation internationale d’Israël et nuirait à ses relations avec les États-Unis et la diaspora.

Ces dernières semaines, Netanyahu et sa coalition de 64 sièges à la Knesset, qui en compte 120 au total, ont proposé des changements politiques fondamentaux relatifs à la religion et l’État, l’équilibre entre le politique et le judiciaire ainsi que les droits des minorités.

Le leader du Shas, Aryeh Deri, à la Knesset le 13 décembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/ Flash90)

Selon l’accord de coalition intérimaire conclu entre le Likud et le Shas, Deri sera le prochain ministre de l’Intérieur et ministre de la Santé. Au bout de deux ans environ, Deri remplacera Bezalel Smotrich, président du parti HaTzionout HaDatit, au poste de ministre des Finances. Le président du Shas sera également nommé vice-Premier ministre.

Mais avant que Deri ne puisse réintégrer le cabinet, la Knesset doit adopter une loi autorisant les législateurs condamnés à des peines de prison à devenir ministres. Deri a été condamné à une peine avec sursis après avoir été inculpé pour fraude fiscale au début de l’année, sa deuxième condamnation. La loi existante ne fait pas de différence entre une peine avec sursis et une peine de prison.

Shas et les partis du prochain gouvernement probable d’Israël ont fait pression pour que soit adoptée d’emblée une législation litigieuse qui permettrait à la Knesset de passer outre les décisions de la Cour suprême, afin notamment de permettre à Deri de reprendre un poste au sein du gouvernement.

Outre les postes attribués à Deri, le Likud a accepté de confier au Shas le contrôle des ministères des Affaires religieuses et des Affaires sociales, et deux membres du parti des 11 députés seront également nommés vice-ministres de l’Éducation et de l’Intérieur.

Une audition et un vote de confiance sur le nouveau gouvernement sont prévus pour jeudi matin, mais ils pourraient être reportés au matin du 2 janvier.

Netanyahu a encore quelques obstacles à surmonter avant de prêter serment au gouvernement, notamment la formalisation des accords de coalition avec presque tous ses partenaires, la répartition des postes ministériels entre les membres de son parti, le Likud, et la finalisation de deux projets de loi clés exigés par les partenaires de la coalition comme conditions préalables.

Le futur Premier ministre présumé Benjamin Netanyahu, vu après des discussions de coalition avec le président de Shas, le député Aryeh Deri, et le chef du parti sioniste religieux, le député Bezalel Smotrich, à l’extérieur d’un hôtel à Jérusalem, le 5 décembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le premier de ces projets de loi devrait faire l’objet d’un vote final mardi en début de journée. Il concerne la nomination d’un ministre indépendant au sein du ministère de la Défense, qui aurait des pouvoirs considérables sur les habitants des implantations de Cisjordanie et les Palestiniens, ainsi que la possibilité pour Deri de diriger les deux ministères.

Un deuxième projet de loi – visant à élargir l’autorité politique sur les responsables et la politique de la police, comme l’a exigé le nouveau ministre de la Police d’extrême droite Itamar Ben Gvir d’Otzma Yehudit – devait être soumis aux votes finaux mardi, après avoir été approuvé par une commission où des législateurs de l’opposition et des conseillers juridiques l’ont rejeté, mettant en garde contre une adoption précipitée de ces mesures controversées. Un projet de loi doit passer trois lectures à la Knesset pour devenir une loi.

Selon un reportage de la Treizième chaîne lundi, Deri n’était pas au courant de l’accord conclu entre le Likud et Otzma Yehudit pour faire passer une loi qui supprimerait la clause de la Loi fondamentale quasi-constitutionnelle d’Israël : La Knesset stipulant que toute personne incitant au racisme serait disqualifiée pour se présenter au parlement. Cette même clause avait été introduite par la Knesset en 1985 et avait réussi à empêcher le parti raciste Kach, dirigé par le rabbin extrémiste Meir Kahane, dont Ben Gvir est un disciple, de revenir au Parlement.

Itamar Ben Gvir, chef du parti Otzma Yehudit, prenant la parole lors d’une session de la Knesset pour débattre de son projet de loi sur les règlements de police, le 20 décembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Selon le reportage, le parti Shas est opposé à cette loi ainsi qu’à un accord de coalition distinct entre les partis HaTzionout HaDatit et Likud qui comprend une clause stipulant que le nouveau gouvernement compte modifier les lois sur la discrimination afin de permettre aux propriétaires d’entreprises de refuser leurs services, si ceux-ci vont à l’encontre de leurs croyances religieuses.

L’accord n’a pas encore été officiellement signé et a provoqué un sérieux tollé dans le monde des affaires et de la haute technologie en Israël.

Dimanche, la députée Orit Strouk de HaTzionout HaDatit, qui devrait devenir ministre dans le nouveau gouvernement, a déclenché un tollé en déclarant que les médecins devraient être autorisés à refuser de prodiguer des soins si c’est à l’encontre de leurs convictions religieuses, pour autant qu’un autre médecin soit disposé à fournir le même traitement.

Strouk a tenu ces propos suite à l’accord annoncé par les membres de la nouvelle coalition pour inscrire ce droit dans la législation.

Soutenant Strouk, son collègue, le député de HaTzionout HaDatit, Simcha Rothman, a affirmé que si un hôtel voulait refuser de servir les homosexuels pour des raisons religieuses, il aurait le droit de le faire.

Carrie Keller-Lynn a contribué à cet article.

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