Le chef de l’ADL dénonce l’anti-sionisme et les menaces qui pèsent sur les haredim
Jonathan Greenblatt a réaffirmé que l'anti-sionisme est de l'antisémitisme, et a accusé le New York Times d'attaquer les Juifs hassidiques

WASHINGTON (JTA) – Dans un important discours de politique générale, le PDG de l’Anti-Defamation League (ADL), Jonathan Greenblatt, a répété son argument selon lequel l’anti-sionisme est de l’antisémitisme, a souligné la menace qui pèse sur les Juifs visiblement orthodoxes et a accusé le New York Times « d’antisémitisme » suite à sa sa couverture des mouvements hassidiques.
Il n’a cependant pas abordé le sujet de l’ancien président Donald Trump et ses partisans extrémistes – un sujet de préoccupation redondant pour l’ADL et Greenblatt ces dernières années.
Le discours de lundi matin, lors du sommet annuel des dirigeants de l’ADL à Washington, a été particulier en ceci qu’il a à peine mentionné ce qui a été pendant des années l’une des inquiétudes principales du groupe, à savoir la menace de l’extrême-droite, stimulée en partie par l’ascension de Trump. Au lieu de cela, Greenblatt, dans des remarques préparées, s’est recentré, en restant focaliser sur le même message qu’il avait déjà fait passer lors du même sommet un an auparavant : l’anti-sionisme est incontestablement de l’antisémitisme.
« Je sais que pour les fanatiques – en particulier ceux qui se définissent comme « anti-sionistes » – le jour de l’Indépendance d’Israël est l’occasion de redoubler d’efforts pour faire en sorte que ce jour soit le dernier jour de l’Indépendance d’Israël », a-t-il déclaré. « Pour souligner ce que j’ai dit lors de cet événement l’année dernière, l’anti-sionisme est de antisémitisme. Point final », a-t-il ajouté.
Son discours de l’année dernière a suscité des critiques de la part de la gauche, qui lui reprochait de marginaliser les membres de la communauté juive qui critiquent Israël et d’assimiler ce secteur à un courant d’extrémisme à l’autre bout de l’échiquier politique, qui a alimenté des attaques meurtrières contre des Juifs.
Bien qu’elle n’ait pas été évoquée dans le discours de Greenblatt, la menace de l’extrême-droite était néanmoins très présente dans l’ordre du jour de la conférence. Une session a été consacrée à la montée en puissance de l’extrême-droite sur les réseaux sociaux et une autre aux liens entre les extrémistes du mouvement conservateur d’aujourd’hui et la John Birch Society, le principal mouvement extrémiste fondé dans la ferveur anticommuniste du milieu du XXe siècle.
La conférence s’achèvera mardi par un rassemblement au Capitole contre l’antisémitisme, organisé en collaboration avec les partenaires traditionnels de l’ADL (minorités, LGBTQ et groupes de défense des droits civiques). Parmi les intervenants figurent Susan Rice, l’ancienne conseillère à la Sécurité nationale qui est aujourd’hui conseillère en politique intérieure de l’administration Biden, ainsi que le gouverneur du Maryland, Wes Moore, le président israélien Isaac Herzog et Reza Pahlavi, le fils aîné du dernier Shah d’Iran, qui s’est positionné en défenseur des liens entre l’Iran et Israël.
At Israel’s 75th Anniversary, we're honored to have @IsaacHerzog’s message of hope at #NLS2023. Thank you for all your tireless work on behalf of the State of Israel and the Jewish people. pic.twitter.com/xgiOsugqtI
— ADL (@ADL) May 1, 2023
Greenblatt a souligné dans son discours que l’antisémitisme ne connaît pas de foyer idéologique unique. Il a noté que l’ADL a documenté le pic alarmant d’attaques antisémites et que plus de la moitié des attaques violentes ont visé des Juifs visiblement orthodoxes.
« Cette année, nous constatons que l’augmentation spectaculaire des agressions antisémites n’est pas due à une idéologie unique qui alimente la violence ou à un groupe qui accepte mieux l’antisémitisme qu’un autre », a-t-il déclaré. « Elle est due au fait que toutes les idéologies se sentent plus à l’aise avec la haine anti-juive. »
Depuis qu’il a pris la tête de l’ADL en 2015, Greenblatt a été sous le feu des critiques des conservateurs pour l’accent mis par l’organisation sur les menaces émergeant de l’extrême-droite, bien que l’organisation se soit toujours concentrée sur l’antisémitisme d’extrême-droite. Lundi, le discours de Greenblatt a porté presque exclusivement sur des thèmes qui ont troublé les conservateurs juifs : la menace perçue pour les Juifs pro-Israël sur les campus, les attaques contre les Juifs visiblement orthodoxes dans le nord-est, et la défense des Juifs haredim, ou ultra-orthodoxes, contre les attaques perçues contre leur mode de vie et leur système scolaire.
Greenblatt a pris à partie le New York Times pour sa série d’articles faisant état de déficiences et de malversations dans les écoles hassidiques de New York.
« Nos frères et sœurs orthodoxes sont constamment menacés », a-t-il déclaré. « Ils ont besoin de la solidarité et du soutien de tous, Juifs et non-Juifs. C’est pourquoi le fait de voir cette communauté pointée du doigt par des institutions d’élite, comme le New York Times, sans doute le journal le plus important du monde, la dépeindre comme une communauté clanique qui utilise son pouvoir pour manipuler les événements, représente une attaque antisémite contre cette communauté. »
Il n’a pas mentionné Trump dans son discours, bien que l’ancien président soit considéré comme le principal candidat à l’investiture républicaine pour la présidentielle de 2024 et qu’il ait intensifié ses attaques contre les « mondialistes » et le milliardaire juif progressiste George Soros, des thèmes qui, selon l’ADL et d’autres groupes, alimentent l’antisémitisme. L’année dernière, Greenblatt a ouvertement critiqué Trump pour avoir dîné avec Kanye West après que le rappeur, qui se fait désormais appeler Ye, s’est lancé dans une série de commentaires antisémites. Nick Fuentes, négationniste et provocateur d’extrême-droite, était également présent à ce dîner.
Greenblatt n’a pas non plus mentionné Ye dans une partie de son discours sur le travail de l’ADL avec les entreprises, bien que l’ADL ait mené une campagne l’année dernière pour inciter Adidas à mettre fin à son partenariat avec Ye. Après avoir mis fin à cette collaboration, Adidas a annoncé un partenariat avec l’ADL.

Greenblatt a commencé son discours en louant Israël à l’occasion de son 75e Yom HaAtsmaout, malgré ce qu’il a reconnu comme étant « la complexité, l’inquiétude, l’anxiété et la préoccupation » quant à l’avenir du pays. Une grande partie de ces inquiétudes, à l’intérieur du pays, s’est concentrée sur le débat concernant les efforts du gouvernement pour radicalement remanier le système judiciaire, ce qui a amené des centaines de milliers d’Israéliens à manifester dans les rues ces derniers mois. Greenblatt a qualifié ces manifestations de « quelque chose de vraiment spécial » et de « triomphe du sionisme ». Il a appelé à trouver un compromis sur la réforme.
Un rapport de l’ADL datant d’il y a deux semaines faisait état d’une autre préoccupation : le fait que le gouvernement israélien comprenne des hommes politiques qui « ont pollué le discours public israélien avec des expressions racistes qui auraient conduit à l’arrêt immédiat de leur carrière politique dans d’autres démocraties ». Le rapport ajoute que « le racisme juif est aussi déplorable que les autres formes de racisme et ne devrait jamais être excusé ni toléré ».
Greenblatt n’a pas mentionné cette préoccupation dans son discours, bien qu’il ait appelé Israël à avoir « une société civile où les non-Juifs jouissent des mêmes droits et remplissent les mêmes responsabilités que leurs voisins juifs ».
« Il y a des défis en Israël en ce moment – et il y aura des défis et des conversations difficiles à venir, mais l’ADL ne faiblira jamais dans son soutien à un État juif démocratique », a déclaré Greenblatt dans son discours. « Israël est un miracle et je ne m’excuserai jamais d’être un fier sioniste. »