Israël en guerre - Jour 570

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Visite d’une des zones d’Israël les plus gravement touchées par le COVID-19

Alors que la vie revient à la normale pour de nombreux habitants de Beit Shemesh, certains Hassidim de la ville se retrouvent sous quarantaine gouvernementale

Des habitants marchent dans l'enclave hassidique de Ramat Beit Shemesh Bet sous confinement, le 27 avril 2020. (Sam Sokol/Times of Israel)
Des habitants marchent dans l'enclave hassidique de Ramat Beit Shemesh Bet sous confinement, le 27 avril 2020. (Sam Sokol/Times of Israel)

Alors que le gouvernement lève peu à peu les restrictions du quotidien, de plus en plus de voisins dans mon quartier de Beit Shemesh ont commencé à sortir de chez eux et à reprendre ce qui pourrait ressembler à une vie normale.

À Ramat Beit Shemesh Aleph, les magasins rouvrent, les enfants (portant des masques) jouent sur les parkings de leurs bâtiments et la prière publique a repris (bien que des mesures de distanciation sociale aient été mises en place et que les offices se déroulent uniquement à l’extérieur).

Cependant, même si la plupart des habitants de cette ville poussent un soupir de soulagement en pensant que le long cauchemar de l’isolement des foyers touche peut-être à sa fin, dans certains quartiers de la ville, les choses vont dans la direction contraire.

La semaine dernière, de nouvelles données publiées par le ministère de la Santé ont montré que Beit Shemesh, avec sa population d’un peu plus de 120 000 habitants, était l’une des trois villes avec une importante population ultra-orthodoxe qui avait dépassé Tel Aviv, le deuxième centre urbain du pays, au nombre de cas de coronavirus actifs.

Des résidents du quartier mixte orthodoxe moderne-haredi de Ramat Beit Shemesh Aleph, le 27 avril 2020. (Sam Sokol/Times of Israël)

En fait, selon le ministère, les cas ont augmenté d’environ 50 % en une semaine, pour atteindre plus de 320. Les médias ont lié cette augmentation au noyau dur des extrémistes ultra-orthodoxes de la ville, dont beaucoup rejettent l’autorité du gouvernement et refusent de pratiquer la distanciation sociale.

En réponse, le gouvernement a approuvé le bouclage des quartiers de Kirya Haredit et Ramat Beit Shemesh Bet. Ces mesures, qui sont entrées en vigueur dimanche à 6 heures du matin et doivent durer jusqu’à vendredi, ont effectivement isolé les quartiers d’une manière similaire aux restrictions imposées précédemment à la ville ultra-orthodoxe de Bnei Brak, où une interdiction de circuler a été imposée pour empêcher la propagation de la pandémie.

De nombreux membres de la communauté ultra-orthodoxe d’Israël ont tardé à respecter les règles de distanciation sociale et ont d’abord résisté à la fermeture des écoles et des synagogues, ce qui a entraîné des taux de contamination disproportionnés.

Certains membres de communautés extrémistes ont continué à ignorer les règles sanitaires et ont même affronté les forces de sécurité qui tentaient de les faire respecter. Le 14 avril, par exemple, à Kirya Haredit, la police a dû sauver d’une foule en colère un homme qui avait informé les autorités d’un mikvé resté ouvert, en violation de la réglementation gouvernementale (en hébreu).

L’histoire de deux quartiers

Ce n’était pas le cas dans mon propre quartier de Ramat Beit Shemesh Aleph, un quartier mixte de Juifs modernes orthodoxes et Haredi, dont beaucoup sont des immigrants anglophones.

Dans mon quartier, beaucoup ont effectivement mis du temps à saisir pleinement le besoin de distanciation sociale, mais cela tient moins à une résistance à l’autorité qu’à un manque d’informations de base. Comme le chef d’un kollel local (une yeshiva à plein temps pour les hommes mariés) me l’a dit le mois dernier, à part quelques affiches du ministère de la Santé, il n’avait pas l’impression qu’il y avait eu un grand effort de sensibilisation au sein de sa communauté.

Mais cela a fini par changer, et à mesure que le gouvernement améliorait ses efforts de communication, les gens sont devenus de plus en plus stricts dans le respect des règles de distanciation sociale, qui ont été approuvées par de nombreux rabbins locaux.

Des affiches du ministère de la Santé appelant les Haredim à rester chez eux pendant la fête de Pessah, le 31 mars 2020. (Sam Sokol)

Après la fermeture des synagogues fin mars, mes voisins ont commencé à organiser des prières à l’extérieur, sur le parking, en portant des masques et en maintenant deux mètres de distance les uns des autres. Lorsque la prière publique a été totalement interdite, un de mes voisins a trouvé une solution originale, en organisant un minyan [NdT : le quorum de dix hommes nécessaire à la récitation de certains passages de la prière et à la lecture de la Torah] dans lequel il dirigeait les offices depuis son balcon et que nous suivions tous depuis nos propres appartements.

Personne n’a eu à quitter la sécurité de son propre foyer, et nous avons pu respecter toutes les restrictions gouvernementales et rabbiniques sur la prière publique tout en conservant un sens de la communauté. Mon voisin, un Hassid né en Israël dont la mère a grandi dans le quartier ultra-orthodoxe de Williamsburg à New York, avait un rouleau de Torah et lisait la partie hebdomadaire d’une voix assez forte pour que même les gens d’en face puissent l’entendre.

Après Pessah, lorsque la prière publique à l’extérieur des synagogues est redevenue autorisée, ce voisin a commencé à organiser des offices dans le parking, en stricte conformité avec les directives du ministère de la Santé.

Passer le poste de contrôle

Le lundi matin, je me suis rendu à pied jusqu’à Ramat Beit Shemesh Bet pour voir comment le quartier se portait du fait du nouveau confinement. Malgré sa situation, à quelques centaines de mètres seulement de mon propre quartier d’Aleph, entrer dans le Bet, c’était entrer dans un monde différent.

Un policier parle avec un homme ultra-orthodoxe à un point de contrôle à l’entrée de Ramat Beit Shemesh Bet, le 27 avril 2020. (Sam Sokol)

En marchant entre les deux quartiers, j’ai pensé que le confinement était beaucoup moins strict que ce à quoi je m’attendais : devant moi, j’ai remarqué que les gens étaient dehors.

Mais à l’entrée du quartier Bet se trouvait un point de contrôle où deux militaires et deux policiers contrôlaient les voitures et s’assuraient que personne n’entre ou ne sorte sans autorisation. Après avoir passé plusieurs minutes debout sous le soleil brûlant, alors qu’ils vérifiaient mes accréditations de journaliste auprès de leurs supérieurs, j’ai été autorisé à passer et j’ai commencé à descendre la rue Nahar Hayarden, la principale artère du quartier.

La plupart des résidents que j’ai croisés, bien que pas tous, portaient des masques. Beaucoup semblaient pratiquer la distanciation sociale, bien qu’un couple que j’ai croisé n’a mis son masque sur le visage qu’après que j’ai commencé à les prendre en photo.

Un Hassid, se promenant avec sa femme et ses enfants, m’a dit qu’il était contrarié de ne pas pouvoir travailler à cause des restrictions, mais qu’il faisait de son mieux pour s’en sortir.

Rivka Mor Yosef, une résidente de Bet originaire des États-Unis, me l’a dit plus tard lors d’un entretien téléphonique : « Je suis allée me promener hier soir et je dirais que 80 % des gens portaient des masques et gardaient leurs distances. »

« Je suis sous mon porche maintenant et tout le monde porte des masques », a-t-elle précisé.

Un couple ultra-orthodoxe se promène dans le quartier de Ramat Beit Shemesh Bet, le 27 avril 2020. (Sam Sokol)

Alors que le gouvernement a déclaré qu’il enverrait l’armée pour distribuer de la nourriture aux populations à risque dans les zones confinées, Mor Yosef, qui a une fille ayant des besoins spéciaux, a déclaré qu’elle n’avait pas croisé la police ou l’armée dans sa rue.

Hormis les extrémistes, elle dit ne pas en vouloir à nombre de ses voisins pour leur retard à adopter les règles de distanciation sociale : si elle a Internet, beaucoup d’entre eux ne l’ont pas, et les informations circulent lentement parmi les membres de certaines des communautés les plus isolées.

« Ils sont très mal informés ici », dit-elle. « Vous ne pouvez pas en vouloir aux gens de ce quartier. Ils ne reçoivent vraiment pas assez d’informations pour faire face à la situation. »

Compte tenu de la fréquence des affrontements entre les extrémistes du quartier et la police, j’ai été surpris, lors de ma visite, de constater à quel point les rues semblaient calmes. Hormis des affiches sur quelques arrêts de bus se plaignant de la création d’un « ghetto » par le « gouvernement militaire » d’Israël qui a créé un « fléau spirituel », aucun trouble n’était visible.

Mon impression était quelque peu erronée.

En discutant avec l’adjointe au maire Rena Hollander, qui aide à coordonner les efforts de la ville pour fournir de la nourriture et des produits de première nécessité aux résidents des quartiers bouclés, je lui ai fait part de la tranquillité de Bet et elle m’a immédiatement envoyé une vidéo d’un affrontement entre les résidents et les policiers qui, selon elle, s’est produit peu après que j’ai quitté le quartier.

Dans la vidéo, on peut voir une foule de Hassidim affronter des policiers, auxquels ils crient à plusieurs reprises « nazi, nazi ».

Cependant, les extrémistes ne constituent qu’une facette de la réalité. Mme Hollander a ainsi décrit comment les habitants des quartiers en quarantaine collaboraient avec les autorités locales pour « définir » les besoins des gens.

« Le but du bouclage est d’essayer de se concentrer sur ces quartiers et de convaincre les gens d’être plus obéissants aux règles, et de faire en sorte que les familles malades se rendent à l’hôtel de confinement », a-t-elle déclaré.

Jusqu’à présent, dit-elle, 128 résidents de toute la ville ont été envoyés dans les centres de convalescence gérés par le gouvernement.

Et malgré la présence d’extrémistes dans le quartier Bet, leur attitude est loin d’être majoritaire.

Stuart Schnee, un résident américain d’Aleph, a raconté sa visite du quartier dimanche, alors qu’il avait une course à y faire. Il a témoigné d’une scène touchante entre un homme hassid et un soldat de l’armée israélienne.

« Je ne l’aurais pas cru si je ne l’avais pas vu », a-t-il précisé. Un père de famille hassid s’est approché d’un soldat avec ses petits garçons, l’a montré du doigt et leur a dit : « Vous voyez, cette arme ne fera de mal à personne », puis a dit en yiddish : « Dites-lui merci. » « Et les trois petits garçons ont regardé le soldat et lui ont dit merci. Le soldat a souri derrière son masque. »

Par ailleurs, dans une vidéo diffusée dans des groupes WhatsApp locaux, on pouvait voir une famille hassidique installer apparemment un barbecue à l’une des entrées du quartier Bet afin de servir à manger aux soldats qui surveillent un poste de contrôle voisin.

Pour autant que je sache, la majorité des habitants ne considèrent pas la mise en place du confinement comme un appel aux armes. La plupart d’entre eux souhaitent tout simplement traverser cette pandémie du mieux qu’ils peuvent.

« Je ne ressens pas le confinement », m’a dit un jeune Hassid, assis sur son balcon à Bet, en expliquant que, parce que sa sœur avait été diagnostiquée positive au COVID-19, il avait été placé en quarantaine à domicile avant même que les frontières de son quartier ne soient fermées.

« Je suis déjà en isolement », s’est-il plaint.

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