Israël en guerre - Jour 435

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Le Premier ministre Benjamin Netanyahu quittant le 10 Downing Street après une réunion avec le Premier ministre britannique Rishi Sunak, à Londres, le 24 mars 2023. (Crédit : AP Photo/Alberto Pezzali)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu quittant le 10 Downing Street après une réunion avec le Premier ministre britannique Rishi Sunak, à Londres, le 24 mars 2023. (Crédit : AP Photo/Alberto Pezzali)
Chronique

Les 100 jours d’un gouvernement en plein chaos et d’une nation au bord du gouffre

Ou comment il aura fallu à peine 3 mois à la coalition de Benjamin Netanyahu pour bouleverser le pays tout entier

Le 37e gouvernement israélien, qui a prêté serment le 29 décembre 2022, fête son 100e jour. Mais ce gouvernement, le sixième dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, n’a pas encore connu de moment de grâce.

Dans les démocraties du monde entier, les gouvernements bénéficient souvent d’une période de grâce de 100 jours au cours de laquelle les électeurs, les critiques, les rivaux et les autres ont tendance à faire preuve de tolérance et de patience le temps qu’ils trouvent leurs marques. Mais cette norme ne s’applique généralement pas aux nations profondément divisées, et certainement pas à celle-ci.

En juin 2021, lorsque Naftali Bennett a prêté serment en tant que Premier ministre, il n’a pas non plus bénéficié du privilège d’une période de grâce de 100 jours. Les loyalistes de Netanyahu l’ont rabroué en séance plénière de la Knesset et lui ont mis des bâtons dans les roues à chaque instant, depuis les 100 premiers jours jusqu’à sa chute politique.

Netanyahu, quant à lui, était considéré comme quelqu’un qui n’avait pas besoin de période de grâce de 100 jours ; il avait été au pouvoir pendant la majeure partie des 15 années précédentes. Il a de nouveaux ministres, mais tout délai de grâce dont ils auraient pu bénéficier s’est évaporé pendant la formation du gouvernement, car Netanyahu a eu du mal à mettre en place sa coalition, bien qu’il ait fait montre d’une grande assurance.

Immédiatement après la prestation de serment du gouvernement, le pays est entré dans un état de bouleversement tel qu’il n’en avait pas connu depuis des dizaines d’années.

Le gouvernement de droite autoproclamé « à part entière » prétendait être un pilier de stabilité, avec une voix unifiée et des objectifs communs ; au lieu de cela, ces voix et ces objectifs sont en train de fracturer la nation.

Une photo des membres du 37e gouvernement d’Israël, dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le 29 décembre 2022. (Crédit : Avi Ohayon/Bureau de presse du gouvernement)

Le mont du Temple et une tentative de changer la façon dont Israël est gouverné

Quelques jours après l’investiture du gouvernement, le 3 janvier, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, s’est rendu sur le mont du Temple, malgré les avertissements répétés de ne pas le faire. Cette visite de 13 minutes et inopinée a eu lieu tôt dans la matinée. Ben Gvir voulait se faire photographier sur le lieu saint – ce qui représentait pour lui une victoire sur les prédictions des opposants qui annonçaient des émeutes généralisées et des implications diplomatiques – mais il ne s’est pas attardé.

Il n’y a pas eu d’émeutes, mais la visite a déclenché une vague de condamnations furieuses dans tout le monde arabe. Les Émirats arabes unis, par exemple, ont annulé leur invitation à la visite de Netanyahu. Il n’a toujours pas reçu d’autre invitation dans ce pays du Golfe.

Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, visitant le mont du Temple, le 3 janvier 2023. (Crédit : Minelet Har Habayit)

Le 4 janvier, le ministre de la Justice, Yariv Levin, a donné une conférence de presse et annoncé son intention de remanier le système judiciaire.

Levin a présenté son plan comme une « réforme » tardive destinée à renforcer la démocratie et a expliqué que dans sa première phase, le gouvernement se concentrerait sur cinq domaines pour « réparer » le système judiciaire : modifier la composition de la commission de sélection des juges ; restreindre la capacité de la Cour à annuler la législation ; instituer une clause dite « dérogatoire », au cas où la Cour invaliderait la législation ; permettre aux ministres de nommer leurs propres conseillers juridiques ; et annuler la notion juridique de « caractère raisonnable » utilisée pour évaluer les décisions du gouvernement.

Quelques heures avant la conférence de presse de Levin, la procureure générale Gali Baharav-Miara avait publié un avis qualifiant « d’extrêmement déraisonnable » la nomination d’Aryeh Deri, chef du Shas, au poste de ministre de la Santé et de l’Intérieur, en raison de ses condamnations pénales antérieures, dont la plus récente pour fraude fiscale en 2022.

Le 5 janvier, la Haute Cour a tenu une audience sur le statut de Deri. Le sous-texte était clair : les juges manifestaient leur opposition aux changements apportés au système judiciaire et montraient qu’ils ne se laisseraient pas intimider par l’annonce de Levin, qui semblait avoir été programmée pour retarder leur décision.

Descendre dans la rue

Le samedi 7 janvier, les organisateurs ont mis sur pied à la hâte la première grande manifestation contre la réforme. Environ 30 000 personnes sont venues manifester sur la place Habima à Tel Aviv. La foule était hétéroclite et certains brandissaient même des drapeaux palestiniens.

Des Israéliens manifestant contre le gouvernement actuel, sur la place Habima de Tel Aviv, le 7 janvier 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

En réponse, Ben Gvir a annoncé qu’il donnerait des instructions à la police pour interdire l’affichage en public d’emblèmes soutenant le terrorisme – selon lui, le drapeau palestinien notamment. Les forces de sécurité ont commencé à poursuivre les manifestants munis de drapeaux.

Le 9 janvier, c’est au tour du député Moshe Gafni (Yahadout HaTorah) de provoquer des remous. Il a suscité la colère de centaines de maires de villes et de villages qui avaient déclaré qu’ils ne financeraient pas le système éducatif haredi – ou ultra-orthodoxe – à partir de leurs caisses (arguant que c’est le budget de l’État qui devrait le financer). Gafni, dans une vague menace, s’est engagé à « se venger » du groupe. Le même jour, Netanyahu a qualifié les manifestations contre les projets de refonte annoncés par Levin « d’incitation rampante » à l’encontre de son gouvernement.

Le lendemain, le 10 janvier, le député Zvika Fogel (Otzma Yehudit), a accusé le chef du parti d’opposition Yesh Atid, Yaïr Lapid, et le chef du parti HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, de trahison et a demandé leur arrestation. Netanyahu a condamné les commentaires de Fogel quelques heures plus tard, non sans avoir d’abord critiqué l’opposition. L’accusation de trahison en Israël est extrêmement grave.

Le 12 janvier, après une nouvelle matinée de manifestations dans tout le pays, auxquelles se sont joints pour la première fois de hauts responsables juridiques dans le cadre du mouvement des Robes noires (« Black Robes »), la présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, a prononcé un discours qui pourrait bien marquer son passage à ce poste.

Esther Hayut a ainsi qualifié la réforme de Levin « d’attaque effrénée » destinée à « écraser le système judiciaire ». Si elle est mise en œuvre, « le 75e anniversaire de l’Indépendance d’Israël restera dans les mémoires comme l’année au cours de laquelle l’identité démocratique du pays aura reçu un coup fatal », a-t-elle affirmé.

La présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, assistant à une conférence à Haïfa, le 12 janvier 2023. (Crédit : Shir Torem/Flash90)

Peu après son discours, Levin a prononcé une allocution télévisée cinglante depuis le ministère de la Justice. La Cour suprême, a-t-il dit, n’est qu’un parti politique qui « se place au-dessus de la Knesset, au-dessus du référendum public », et il a accusé Hayut de prendre parti pour les rivaux politiques de Netanyahu et a affirmé qu’elle qu’elle incitait aux émeutes.

Le lendemain, le 13 janvier, les ministres Yoav Gallant et Bezalel Smotrich, ainsi que le chef d’état-major de l’armée israélienne, Aviv Kohavi, se sont réunis pour discuter du transfert des pouvoirs en Cisjordanie à Bezalel Smotrich, conformément aux accords de coalition.

La réunion ne s’est pas bien passée, Smotrich s’étant opposé à Kohavi. « Il est confus », a écrit – au sujet du chef d’état-major de Tsahal – le ministre des Finances, qui a effectué un bref séjour dans l’armée dans un rôle non combattant.

Le 14 janvier, par un samedi soir particulièrement pluvieux, des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés sur la place Habima à Tel Aviv, ainsi qu’à Haïfa et à Beer Sheva. Selon les estimations, 50 000 à 80 000 manifestants ont participé au rassemblement, la majorité d’entre eux se tenant debout sous une pluie battante, parapluie à la main. Dès lors, il est apparu clairement que les manifestants étaient particulièrement déterminées.

Le 15 janvier, Tally Gotliv (Likud), a demandé à Levin de prendre des mesures pour destituer la présidente de la Cour suprême, Hayut.

Des manifestants israéliens participant à un rassemblement contre le nouveau gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Tel Aviv, le 14 janvier 2023. (Crédit : Ahmad Gharabli/AFP)

Dans les semaines qui ont précédé, Gotliv a également demandé (à maintes reprises) la révocation de la procureure générale Baharav-Miara et, au moins une fois, le limogeage du gouverneur de la Banque centrale d’Israël, Amir Yaron, qui avait exprimé des inquiétudes quant à l’impact économique du remaniement.

Le même jour, le cabinet a approuvé un transfert d’autorité au député d’extrême-droite Avi Maoz, de la faction anti-LGBTQ Noam, du contrôle de l’unité chargée d’approuver et de financer les fournisseurs de programmes externes.

En conséquence, des dizaines de maires de villes ont rédigé une lettre indiquant qu’ils continueraient à financer tous les programmes scolaires externes que Maoz a prévu d’annuler. Un groupe de 160 éducateurs a été constitué, proposant d’enseigner gratuitement ces dits programmes. Un grand nombre de pétitions circulent, émanant de parents, d’enseignants et d’administrateurs d’écoles qui s’opposent à ce que Maoz joue un rôle dans le domaine de l’éducation.

Deri démis de ses fonctions, les protestations s’intensifient

Le 16 janvier, Levin a suggéré que les différentes mises en examen de Netanyahu « ont contribué à faire comprendre au grand public qu’il y a des défaillances dans le système [judiciaire] qui doivent être corrigées ».

Les réseaux sociaux ont été inondés de vidéos, de discours et d’interviews de Netanyahu dans lesquels il promettait de défendre l’indépendance de la Haute Cour, envers et contre tout.

Le même jour, des milliers d’étudiants de tout le pays se sont joints aux manifestations, et le chef de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, le député Simcha Rothman (HaTzionout HaDatit), a présenté un projet de loi visant à transformer les conseillers juridiques en simples nominations politiques.

Le 17 janvier, Levin et Hayut ont tenu leur première réunion, mais aucun accord n’a été trouvé.

Le lendemain, 18 janvier, la Cour suprême a annoncé sa décision d’annuler la nomination de Deri en tant que ministre. Netanyahu et d’autres hauts responsables de la coalition ont effectué des visites au domicile de Deri à Jérusalem, en signe de solidarité.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu quittant le domicile d’Aryeh Deri à Jérusalem, après une décision de la Haute Cour disqualifiant le chef du Shas de ses fonctions, le 18 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

En chemin, le président de la Knesset, Amir Ohana (Likud), ouvertement homosexuel, a dû faire face à des insultes de la part des partisans de Deri.

Le 19 janvier, Netanyahu a empêché ses chauffeurs, qui avaient également conduit les anciens Premiers ministres Yaïr Lapid et Naftali Bennett, de reprendre leur travail, les obligeant à demander une injonction aux tribunaux. Netanyahu a également empêché la conseillère juridique du cabinet du Premier ministre, Shlomit Barnea Pargo, de participer à une réunion du cabinet.

Plus tard dans la journée, Pargo a envoyé une lettre au Premier ministre dans laquelle elle lui ordonnait de retirer Deri de son cabinet, conformément à l’ordonnance de la Haute Cour. Malgré sa réticence, Netanyahu s’est plié à cette demande quelques jours plus tard.

Dans la nuit du 19 au 20 janvier, les soldats de Tsahal et les forces de la police des frontières ont évacué un avant-poste illégal de Cisjordanie connu sous le nom d’Or Chaïm, établi au nom du rabbin Chaïm Drukman, récemment décédé. Smotrich a donné l’ordre d’arrêter l’évacuation. Le ministre de la Défense Gallant l’a ignoré.

Netanyahu soutient Gallant, et Smotrich continue de se plaindre du fait qu’il n’a toujours pas reçu les pouvoirs en Cisjordanie que Netanyahu lui a promis dans le cadre des accords de coalition.

Dans la nuit du samedi 21 janvier, environ 100 000 manifestants se sont rassemblés à l’intersection de la rue Kaplan et de la route Begin à Tel Aviv – la plus grande manifestation à ce jour contre la réforme du système judiciaire.

Des centaines d’autres ont manifesté devant la résidence officielle du président Isaac Herzog à Jérusalem, ainsi qu’à Beer Sheva, Herzliya, Haïfa et dans d’autres lieux. Pour la première fois, Lapid s’est joint au rassemblement de Tel Aviv.

Le 22 janvier, le ministère de la Culture et des Sports, dirigé par le député Miki Zohar (Likud), a ordonné aux municipalités de la périphérie de cesser d’organiser des événements à Shabbat, dans le cadre d’une initiative qui avait été lancée par Chili Tropper, ministre de la Culture et des Sports du gouvernement précédent. En 2021, Tropper avait permis d’élargir les heures d’ouverture des musées et des sites du patrimoine pendant le week-end dans les villes périphériques, offrant aux résidents la possibilité de prendre part à des événements gratuits ou largement subventionnés le vendredi et le samedi – les municipalités ayant le dernier mot sur l’organisation de ces événements en fonction du degré de religiosité de leurs résidents. La décision de Zohar a suscité la colère et Netanyahu a rapidement ordonné qu’elle soit annulée.

Le 23 janvier, Deri a convoqué une réunion de sa faction, le Shas, au cours de laquelle il a mis en garde contre la possibilité pour les fonctionnaires juridiques de faire un coup d’État. Netanyahu a assisté à la réunion et a prononcé un discours de soutien.

« Nous agissons conformément à la loi. Nous ne laisserons pas l’État d’Israël tomber entre les mains d’anarchistes », a déclaré Deri.

Le même jour, les directeurs de toutes les universités israéliennes, y compris les universités plus conservatrices Ariel et Bar Ilan, ont publié une déclaration publique mettant en garde contre la réforme. « Les projets de Levin entraîneront une fuite des cerveaux et un isolement international », ont-ils écrit.

Plus tard dans l’après-midi, Moshe Hazan, professeur de macroéconomie, a démissionné de son poste au sein de la commission monétaire de la Banque d’Israël, composé de six personnes, parce qu’il souhaitait jouer un rôle plus actif dans le mouvement de protestation naissant.

Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, au centre, le ministre de la Défense, Yoav Gallant, à droite, et le chef du COGAT, le général Ghassan Alian, à gauche, tenant une réunion au ministère de la Défense, à Tel Aviv, le 12 janvier 2023. (Autorisation)

Le 24 janvier, Netanyahu a tenté de trouver une solution au désaccord entre Smotrich et Gallant au sujet des pouvoirs promis au ministre délégué de la Défense [Smotrich] en Cisjordanie. Aucun résultat n’a été obtenu.

Ce même jour, le député Gafni a proposé l’idée d’une séparation des sexes dans les parcs nationaux et sur les plages du pays, suscitant l’indignation. Le Likud n’a pas tardé à réagir. « Le statu quo ne sera pas remis en question. »

Des centaines d’enseignants et d’employés du secteur de la technologie ont manifesté dans tout le pays pour protester contre la réforme du système judiciaire. Les employés de la high-tech ont bloqué des routes dans le centre de Tel Aviv, et une organisation représentant les procureurs a déclaré une grève nationale.

Le président Herzog a prononcé un discours lors d’une conférence sur l’éducation et, pour la première fois, a consacré la majeure partie de son allocution au « désaccord difficile » et au fait que les fondements démocratiques, à savoir les droits civils, « sont une chose sacrée ».

Un vent de changement

Le 25 janvier, la bataille contre la réforme a pris un tournant décisif. Une lettre a été publiée, signée par des économistes et des chefs d’entreprise locaux, dont certains avaient travaillé sous le gouvernement de Netanyahu, affirmant que la réforme mettait en danger l’avenir économique d’Israël. Cette lettre a ouvert la voie à une avalanche de lettres, de déclarations et de manifestations similaires dans divers secteurs au cours des semaines suivantes.

Le 26 janvier, Eynat Guez, PDG de Papaya Global, a annoncé que son entreprise allait retirer ses capitaux du pays pour les transférer à l’étranger, où ils seraient plus en sécurité.

La décision de Guez a ouvert la porte à une vague de chefs d’entreprise qui prévoyaient de suivre son exemple. Le PDG de Wiz, Assaf Rappaport, l’a rejointe en annonçant que les investissements futurs prévus (d’une valeur de 300 millions de dollars) ne seraient pas déposés en Israël.

Deux jours plus tard, le 27 janvier, Netanyahu a réuni environ 25 chefs d’entreprise à Tel Aviv pour leur expliquer que sa restructuration judiciaire ne nuirait pas à l’économie, affirmant que le PIB d’Israël serait en fait renforcé en raison d’une moindre « légalisation ». L’identité des personnes rencontrées par Netanyahu à Tel Aviv reste un mystère ; une photo publiée à l’issue de la réunion ne montre que le dos des personnes présentes.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu rencontrant un groupe d’hommes d’affaires au siège de son parti, à Tel Aviv, le 27 janvier 2023. (Crédit : Likud)

Toutefois, les journalistes ont appris par la suite que les dirigeants des banques présents à la réunion avaient averti Netanyahu en des termes très clairs que l’argent quitterait le pays. Peu de temps après, le PDG de la Banque Discount, Uri Levin, a déclaré qu’il se joindrait aux manifestations anti-réforme.

Le même jour, Twitter a suspendu le compte du député Almog Cohen du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit après qu’il y a fait l’éloge d’un raid meurtrier de Tsahal à Jénine au cours de laquelle neuf Palestiniens, dont une sexagénaire, ont été tués lors de violents affrontements entre les troupes israéliennes et des hommes armés palestiniens. « Les combattants de Jénine ont fait du bon travail, continuez à les tuer », a écrit Cohen, précisant par la suite qu’il ne louait que la mort des terroristes, et non celle des civils.

Cette nuit-là, sept Israéliens ont été tués dans un attentat terroriste dans le quartier de Neve Yaakov à Jérusalem. Ben Gvir est arrivé sur les lieux sous les railleries des habitants. L’un d’eux lui a dit : « C’était sous votre mandat ».

Le samedi 28 janvier au matin, Ben Gvir a critiqué Baharav-Miara pour avoir, selon lui, hésité à accorder une demande de mise sous scellés de la maison de la famille du terroriste présumé.

Ce même matin, un autre attentat a eu lieu près de la Cité de David à Jérusalem-Est, juste à l’extérieur des murs de la Vieille Ville, perpétré par un terroriste de 13 ans. Un officier de Tsahal, dont le nom n’a pas été révélé, a été blessé (il est ressorti de l’hôpital plus de cinq semaines après l’attentat).

À la suite de ce Shabbat sanglant, des dizaines de milliers de personnes ont à nouveau manifesté dans tout le pays, dans une multitude de lieux différents, dans la nuit de samedi à dimanche. Elles ont observé une minute de silence à la mémoire des victimes du terrorisme du week-end, avant de poursuivre la manifestation anti-réforme.

Pendant ce temps, les journalistes de la télévision se sont rendus en masse à Neve Yaakov, un quartier juif situé au cœur de Jérusalem-Est, pour couvrir les conséquences de l’attentat, mais ils ont été attaqués et intimidés par certains des habitants, ce qui a été condamné par Kobi Shabtaï, le chef de la police israélienne.

Le 30 janvier, le secrétaire d’État américain Antony Blinken est arrivé en Israël, où il a encouragé Netanyahu à ne poursuivre que les changements judiciaires soutenus par un large consensus public. Il a également rappelé au Premier ministre que les relations entre l’État juif et les États-Unis étaient fondées sur des « valeurs communes ».

Le 31 janvier, Rothman, chef de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, a présenté un projet de loi visant à restreindre le droit des travailleurs syndiqués à lancer des actions de grève.

Quand le président s’en mêle

Le 1er février, le 37e gouvernement d’Israël a demandé à la Cour une prorogation du délai pour procéder à la destruction du hameau bédouin illégal de Khan al-Ahmar qui, selon l’État, a été construit sans permis, comme l’avaient fait les gouvernements précédents dirigés par Naftali Bennett et, avant lui, par Netanyahu.

Pendant ce temps, Ben Gvir a déclaré qu’il interdirait aux prisonniers palestiniens de préparer des pitas fraîches, dans un effort de répression de ce qu’il estime être un luxe inutile et des avantages accordés aux prisonniers.

Le même jour, Levin a déclaré dans une interview qu’en commençant à licencier des juges et en utilisant une commission contrôlée par le gouvernement pour en nommer de nouveaux, il pourrait accélérer le processus de modification de la composition de la Cour en faveur des juges favorisés par l’aile droite, ce qui, selon lui, diversifierait la magistrature.

Le 2 février, Baharav-Miara a publié un avis interdisant à Netanyahu de s’impliquer dans le processus législatif de la réforme du système judiciaire, soulignant un conflit d’intérêts lié à l’inculpation de Netanyahu dans une série d’affaires de corruption toujours en cours devant la Cour.

À LIRE – État d’Israël vs. Netanyahu : détails de l’acte d’accusation du Premier ministre

Plus tard dans la journée, Netanyahu est parti en visite officielle en France – sa première visite dans un pays occidental depuis son retour au pouvoir.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à gauche, et le président français Emmanuel Macron, à droite, avant un dîner de travail à l’Élysée, le 2 février 2023. (Crédit : Ludovic Marin/AFP)

Au cours de la visite, le président français Emmanuel Macron a déclaré à Netanyahu que si Israël poursuivait ses projets de refonte, Paris conclurait que l’État juif n’était plus une démocratie, a rapporté Le Monde.

La visite, qui s’est étendue de jeudi à samedi soir, n’a donné lieu à aucune réalisation diplomatique ou économique claire, la première d’une série de voyages officiels le temps d’un week-end dans les capitales européennes avec des résultats similaires.

Alors que Netanyahu s’est vanté auprès des journalistes israéliens d’avoir rencontré avec succès des chefs d’entreprise français, la presse a rapidement révélé que le Premier ministre avait été critiqué lors du sommet au sujet de la politique de sa coalition.

Pendant que Netanyahu était à Paris, JP Morgan Chase, la plus grande banque d’investissement des États-Unis, a publié un document interne sur les dangers cachés de la réforme du système judiciaire.

Le samedi 4 février, environ 100 000 personnes ont participé à une manifestation de masse à Tel Aviv, et des milliers d’autres se sont jointes à des rassemblements dans le reste du pays.

Le 5 février, des centaines de femmes ont protesté contre la détérioration potentielle de l’égalité des sexes en Israël si la réforme était adoptée.

Dans la soirée, le président Herzog a demandé à la coalition de geler le processus législatif et de s’engager dans une médiation avec l’opposition. Levin a immédiatement rejeté cette proposition, déclarant que le processus législatif se poursuivrait à plein régime, mais que l’opposition était invitée à débattre des mérites des projets de loi à la Knesset à tout moment.

Le 8 février, des milliers de réservistes ont entamé une marche de trois jours depuis Latrun, le site d’une célèbre bataille de 1948 entre la naissante armée d’Israël et la légion arabe de Jordanie, jusqu’à Jérusalem, à une distance d’environ 25 kilomètres. La marche s’est terminée par un grand rassemblement devant la Cour suprême. Alors que les réservistes commençaient leur marche, la ministre de la Diplomatie publique, Galit Distel Atbaryan, les a publiquement accusés d’être financés par l’Allemagne et l’Iran.

Des centaines de réservistes et d’anciens combattants de Tsahal entamant une marche de Latrun à Jérusalem, pour manifester leur opposition au projet de réforme du système judiciaire, le 7 février 2023. (Crédit : Capture d’écran Twitter ; utilisée conformément à l’article 27a de la Loi sur les droits d’auteur)

Si les Iraniens n’y ont guère prêté attention, ces commentaires ont provoqué un petit accrochage avec Berlin, suscitant des demandes d’éclaircissement de la part de l’ambassadeur allemand Stephan Seibert.

Le 9 février, le Shas, parti de la coalition, a annoncé qu’il proposait un projet de loi qui érigerait en infraction pénale, passible d’une peine de six mois de prison ou d’une amende de 10 000 shekels, le fait de s’habiller de façon non conforme à la tsniout – ou règles vestimentaires de la loi juive orthodoxe – au mur Occidental ou d’y prier d’une manière non reconnue par le Grand-Rabbinat – dans une configuration mixte, par exemple. Le projet de loi a suscité de vives critiques et, quelques heures plus tard, Netanyahu a été contraint de publier une vidéo dans laquelle il s’engageait à maintenir le statu quo sur le site sacré.

Dans la soirée, la police a eu recours à la force pour disperser les manifestants qui tenaient un rassemblement aux flambeaux devant la résidence privée du Premier ministre, rue Gaza, à Jérusalem. Vivement irrité par ces scènes, Ben Gvir a convoqué le chef de la police de Jérusalem, Doron Turgeman, afin de le réprimander pour ce qu’il a jugé être une réponse laxiste de la police.

Après que le ministre s’est assuré de rendre publique sa décision de réprimander Turgeman, Shabtaï a publié sa propre déclaration soutenant le chef de la police de Jérusalem et réprimandant Ben Gvir pour avoir essayé de discipliner les policiers alors qu’ils sont encore en action sur le terrain, au lieu d’attendre d’examiner l’affaire de manière plus approfondie.

Une équipe médico-légale de la police israélienne travaillant sur les lieux d’un attentat à la voiture-bélier, à un arrêt de bus à Ramot, à Jérusalem, le 10 février 2023. (Crédit : AP Photo/Mahmoud Illean)

Le 10 février, un terroriste palestinien a foncé avec sa voiture sur un groupe de personnes à un arrêt de bus bondé dans le quartier de Ramot de la capitale, tuant trois personnes, dont deux jeunes frères. L’attentat a soulevé des questions encore plus embarrassantes : Ben Gvir, élu en promettant de rétablir la loi et l’ordre, et le gouvernement, qui avait ridiculisé la réponse de ses prédécesseurs au terrorisme, peuvent-ils réellement assurer la sûreté et la sécurité nationale ?

Sur les lieux de l’attentat, Ben Gvir a été aperçu en train de se quereller avec Shabtaï, quelques heures après leur précédente prise de bec publique.

Le ministre a appelé publiquement au lancement d’une » Opération Bouclier défensif 2″ à Jérusalem-Est, malgré l’absence de toute préparation militaire ou d’approbation par le cabinet d’une vaste offensive semblable aux opérations menées par l’armée israélienne en 2002 dans toute la Cisjordanie pour endiguer le terrorisme palestinien lors de la Seconde Intifada.

Son projet a été rapidement rejeté par le Premier ministre. « Nous n’annonçons pas d’opérations depuis les autoroutes de Jérusalem », a déclaré Netanyahu dans un communiqué destiné à déprécier Ben Gvir.

Le 11 février, alors que plus de 100 000 personnes manifestaient dans tout le pays, bloquant l’autoroute Ayalon à Tel Aviv, 18 juges de la Cour suprême à la retraite ont publié une déclaration rejetant la proposition de réforme de Levin. Une déclaration distincte de 12 anciens chefs du Conseil national de sécurité, dont certains ont travaillé sous les précédents gouvernements Netanyahu, a appelé la coalition et l’opposition à mener des pourparlers de compromis.

Des milliers de manifestants israéliens rassemblés contre le nouveau gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Tel Aviv, le 11 février 2023. (Crédit : Gili Yaari /Flash90)

Le 12 février, le New York Times a publié un article de Thomas Friedman, dans lequel il cite le président américain Joe Biden, qui s’exprime pour la première fois sur la réforme du système judiciaire.

« Il est vraiment important de parvenir à un consensus avant tout changement fondamental afin de s’assurer que la population y adhère et qu’il puisse être viable », a déclaré Biden.

Le même jour, le cabinet de sécurité israélien a autorisé la construction de neuf implantations en Cisjordanie, suscitant la vague habituelle de condamnations de la part de l’Occident. Dans le même temps, Gallant a ordonné l’évacuation d’un avant-poste illégal situé à l’extérieur de l’implantation de Nahliel, en Cisjordanie.

Une femme regardant le discours du président Isaac Herzog sur les changements proposés au système judiciaire, dans une maison du kibboutz Mishmar David, le 12 février 2023. (Crédit : Nati Shohat/Flash90)

Ce soir-là, Herzog a prononcé un discours à la nation dans lequel il a exposé les principes fondamentaux qui, selon lui, pourraient constituer la base d’un compromis entre les partisans et les opposants de la réforme.

Après le discours, le ministre des Communications, Shlomo Karhi (Likud), a appelé à « poursuivre les réformes avec toute la force nécessaire », indiquant qu’il n’y aurait pas de pause.

Le 13 février a été désigné comme « journée de grève nationale » pour les entreprises, les avocats et les écoles, et des rassemblements ont été organisés en divers endroits.

À Jérusalem, la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset a approuvé un projet de loi donnant à la coalition le contrôle de la commission de sélection des juges et interdisant à la Haute Cour d’annuler des Lois fondamentales quasi-constitutionnelles.

La décision d’avancer le premier élément du paquet de réformes à la Knesset en première lecture a été très mal accueillie à l’intérieur même du Parlement. À l’extérieur, les masses de manifestants qui ont inondé Jérusalem se sont rassemblées en signe d’opposition.

Le 14 février, Lapid a rencontré Herzog et a réitéré son appel au gel du processus législatif de la réforme du système judiciaire en faveur de pourparlers afin de trouver un compromis.

Freiner les ardeurs

Le 15 février, le ministère de la Défense a pris des mesures pour déraciner des arbres plantés par un résident d’implantations sur des terres privées appartenant à des Palestiniens près de l’implantation de Shiloh, en Cisjordanie. Smotrich a tenté d’empêcher l’opération, mais en vain. Gallant avait ordonné l’arrachage des arbres et Netanyahu n’est intervenu pour arrêter l’opération qu’une fois qu’elle était déjà terminée.

La députée Otzma Yehudit, Limor Son Har Melech, se tenant devant un bulldozer sur un terrain près de l’implantation de Shiloh en Cisjordanie afin d’arrêter le déracinement des arbres par l’Administration civile du ministère de la Défense, le 15 février 2023. (Crédit : Bureau de Limor Son Har Melech)

Smotrich a admis ce soir-là qu’il n’avait pas le pouvoir d’empêcher une telle opération.

Le chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet aurait averti Ben Gvir que ses actions et son comportement pourraient inciter à de nouvelles violences dans la région.

À Haïfa, des dizaines d’employés du secteur de la high-tech ont manifesté.

Le président de la coalition, Ofir Katz (Likud) a déclaré qu’il ne voyait aucune possibilité de parvenir à un compromis sur la réforme du système judiciaire.

Le 16 février, le président Herzog a demandé à la procureure générale Baharav-Miara d’autoriser la participation de Netanyahu à des pourparlers de compromis concernant la réforme du système judiciaire de son gouvernement, en dépit d’une décision relative à un conflit d’intérêts lui interdisant de le faire. Baharav-Miara a refusé.

Shabtaï a envoyé une lettre à ses officiers expliquant que le droit de manifester est un droit démocratique et que la police doit se comporter de manière professionnelle et prudente avec les manifestants. Le fossé entre Shabtaï et Ben Gvir continue de se creuser.

Un groupe de soldats vétérans ayant participé à la guerre de Yom Kippour et d’autres activistes à côté d’un char qu’ils ont retiré du site commémoratif de Tel Saki, sur le plateau du Golan, qu’ils avaient prévu d’utiliser pour protester contre le projet de réforme du système judiciaire du gouvernement, le 16 février 2023. (Crédit : Michael Giladi/Flash90)

La police a annoncé qu’elle menait une enquête après le vol d’un char militaire endommagé par des bombardements sur un site commémoratif de guerre dans le nord du pays, apparemment par un groupe d’anciens militaires protestant contre la réforme. La droite a accusé les activistes de tenter d’inciter à un coup d’État militaire.

L’ambassadeur américain en Israël, Tom Nides, a déclaré lors d’un podcast qu’il conseillait à Netanyahu de « freiner » sa réforme du système judiciaire.

Le 18 février, plus de 100 000 personnes se sont rassemblées à Tel Aviv, Jérusalem et dans d’autres villes israéliennes. Même de plus petites villes, comme Kfar Saba, ont organisé des manifestations qui ont attiré des dizaines de milliers de personnes. Yoram Cohen, ancien chef du Shin Bet sous le précédent gouvernement Netanyahu, s’est joint aux manifestations dans la capitale, déclarant à la foule qu’Israël risquait de devenir un État non démocratique.

L’ancien chef du Shin Bet, Yoram Cohen, prenant la parole lors d’une manifestation contre le projet judiciaire du gouvernement, à Jérusalem, le 18 février 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

À la fin du rassemblement de Tel Aviv, les manifestants ont à nouveau bloqué l’autoroute Ayalon.

Le 19 février, le président a déclaré qu’il s’était entretenu avec les deux parties du débat sur la réforme et qu’il était possible qu’ils parviennent à un accord dans les jours à venir.

Le même jour, Netanyahu a créé un groupe ministériel chargé de lutter contre l’incitation palestinienne. À sa tête, il a nommé Ben Gvir, lui-même déjà condamné pour incitation contre les Arabes.

Le 20 février, le chef du Shin Bet, Ronen Bar, a averti que les tensions au sein de la société israélienne mettaient en danger la stabilité du pays.

Dans la soirée, la Knesset a procédé à la première lecture du projet de loi visant à remanier la commission de sélection des juges et à donner à la coalition le contrôle des nominations à la Haute Cour, projet qui a été adopté sans mal.

Lapid et Gantz ont déclaré qu’avec l’avancement du projet de loi, il n’y avait plus lieu de discuter d’un compromis. Pour autant, Netanyahu a continué à publiquement proposer des pourparlers à l’opposition, tout en refusant d’interrompre le processus législatif.

Les manifestants, qui s’étaient rassemblés devant les domiciles des députés pour les manifestations anti-réforme du matin, se sont rendus à Jérusalem dans l’après-midi pour se rassembler devant la Knesset, alors que le vote se déroulait à l’intérieur. De nombreuses routes de Jérusalem ont été fermées.

Auparavant, Me Gur Blaï, le conseiller juridique de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset avait prévenu que les nouvelles lois prévues, qui limitent radicalement la portée du contrôle judiciaire, laisseraient sans protection les droits de l’Homme et les droits civils fondamentaux, notamment la liberté d’expression et la liberté de religion.

Des Israéliens protestant contre les plans du gouvernement visant à remanier le système judiciaire devant la Knesset, avec le siège de la Banque centrale d’Israël en arrière-plan, le 20 février 2023. (Crédit : AP/Ohad Zwigenberg)

Alors que le vote s’étirait au-delà de minuit, le député Almog Cohen (Otzma Yehudit) a commencé à diffuser des images en direct à partir de son téléphone.

Sur la vidéo, qui est rapidement devenue virale, on peut entendre Cohen insultant plusieurs députés de l’opposition, notamment le député arabe Ahmad Tibi, Ofer Cassif, le seul député juif de la faction à majorité arabe Hadash-Taal et Merav Ben-Ari, à qui il s’est adressé en faisant des bruits d’animaux et en affirmant qu’il fallait « leur parler dans une langue qu’ils comprennent ».

Almog Cohen, député d’Otzma Yehudit, réagissant pendant une discussion à la Knesset, à Jérusalem, le 22 février 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le président de la Knesset, Amir Ohana, a réagi en interdisant la diffusion en direct d’images du plénum de la Knesset, mais il n’y a aucune sanction officielle.

Le 21 février, Levin a laissé entendre qu’il pourrait bientôt renvoyer la procureure générale. Pour sa part, Baharav-Miara a déclaré qu’elle ne se laisserait pas intimider et qu’elle continuerait à exercer ses fonctions.

Des dizaines d’officiers de l’armée de l’Air ont manifesté devant le domicile du député Yoav Kisch (Likud) – lui-même ancien pilote. Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères Eli Cohen a critiqué la décision de la Banque d’Israël d’augmenter les taux d’intérêt.

Les commentaires de Cohen ont contribué à faire chuter les cours de la Bourse de Tel Aviv, déclenchant une série de tweets en anglais et en hébreu du Premier ministre, dans lesquels il affirmait l’indépendance constante de la Banque centrale. Les critiques se sont demandé si l’on pouvait lui faire confiance, rappelant ses commentaires antérieurs défendant l’indépendance du système judiciaire, aujourd’hui menacé.

Le 21 février, les Nations unies ont également demandé à Israël de suspendre sa réforme, mais peu d’Israéliens en ont tenu compte. Le ministre de la Justice, Levin, a promis que toutes les tentatives visant à interrompre le processus échoueraient.

Quatre cents cinquante anciens employés du Shin Bet ont écrit au ministre de l’Agriculture Avi Dichter (Likud), ancien chef de l’agence de sécurité intérieure, pour lui demander de mettre un terme au blitz législatif de son gouvernement, qui, selon eux, met en péril la démocratie israélienne. Dichter n’a pas donné suite.

Des manifestations au pogrom

Le 22 février, la Knesset a fait passer en lecture préliminaire une nouvelle série de projets de loi visant à annuler ou à limiter les pouvoirs de la Cour suprême.

Parmi les projets de loi proposés, l’un d’eux visait à rendre à Aryeh Deri son poste de ministre en retirant à la Cour le pouvoir de disqualifier les ministres. Ont également été approuvés en lecture préliminaire la clause dite « dérogatoire » à 61 voix, la « loi hametz » permettant aux hôpitaux publics d’interdire l’entrée de produits levés pendant la fête de Pessah, et le projet de loi visant à étendre le pouvoir des tribunaux religieux gérés par le Grand-Rabbinat d’Israël.

Craignant un effondrement de l’économie, Netanyahu a demandé aux députés de la coalition de ne plus commenter publiquement les décisions de la Banque d’Israël.

Le 23 février, la commission des Finances de la Knesset a approuvé la demande de Netanyahu visant à ce que l’État prenne en charge les frais de logement dans deux résidences privées de sa famille, ainsi que 45 000 à 80 000 shekels par an pour l’achat de nouveaux vêtements.

Le même jour, Gallant a signé un accord qui confère à Smotrich des pouvoirs en Cisjordanie, ce qu’il réclamait depuis longtemps.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu serrant la main du ministre des Finances et ministre de la Défense Bezalel Smotrich, deuxième à partir de la droite, et du ministre de la Défense Yoav Gallant, troisième à partir de la droite, après la signature d’un accord transférant l’autorité des Affaires civiles en Cisjordanie à Smotrich. (Crédit : Cabinet du ministre des Finances)

Selon l’accord, la majorité des pouvoirs civils en Cisjordanie devaient être transférés à Smotrich, notamment l’organisme responsable du contrôle et de l’exécution des projets de construction en Cisjordanie. Tsahal devait conserver son droit d’évacuer les nouveaux avant-postes établis illégalement par les résidents d’implantations.

Le 24 février, certains employés de l’agence de renseignement du Mossad ont demandé l’autorisation de participer à des manifestations contre le programme judiciaire.

Netanyahu, dans des remarques que les critiques ont considérées comme indiquant sa déconnexion par rapport à ce qui se passait dans les rues, a rejeté les manifestants comme étant des anti-vax et les mêmes personnes qui s’étaient rassemblées contre l’accord d’extraction de gaz naturel de l’État.

Plus tard, des soldats de réserve de Tsahal représentant un large éventail de grades et d’unités, jusqu’au général de brigade, ont déclaré qu’ils refuseraient de servir si les projets de loi relatifs à la réforme du système judiciaire étaient adoptés. « Nous avons accepté de servir dans un État démocratique, pas dans une dictature », ont-ils déclaré.

Le 25 février, environ 300 000 personnes sont venues manifester, dont environ 160 000 dans la seule ville de Tel Aviv. Parmi les manifestants se trouvaient quelque 500 femmes vêtues de la tenue de la « Servante écarlate », qui est devenue depuis lors une figure emblématique.

Des manifestantes contre la refonte judiciaire du gouvernement, habillées en « servantes », sur la place Dizengoff, à Tel Aviv, le 25 février 2023. (Crédit : Zohar Tal)

L’ancien chef de cabinet de Netanyahu (jusqu’en 2019) et proche du Premier ministre, Yoav Horovitz, était également présent à Tel Aviv.

À la fin du rassemblement, les manifestants ont à nouveau bloqué l’autoroute Ayalon, et certains ont allumé des feux de joie sur l’artère vidée de ses occupants.

Le journal britannique The Financial Times a publié un éditorial affirmant que « le remaniement aura de graves conséquences pour Israël, le Moyen Orient et l’Occident ».

Les frères Hallel, à gauche, et Yagel Yaniv, tués lors d’une attaque terroriste dans la ville de Huwara, en Cisjordanie, le 26 février 2023. (Autorisation)

Le 26 février au matin, des terroristes ont ouvert le feu sur une voiture israélienne qui traversait la ville palestinienne de Huwara, en Cisjordanie, tuant les deux jeunes frères Hallel et Yagel Yaniv.

L’attentat s’est produit alors que des responsables israéliens avaient conclu des accords avec l’Autorité palestinienne (AP) à Aqaba, en Jordanie, sur la réaffirmation des Accords d’Oslo et l’engagement de cesser l’approbation de nouvelles implantations de peuplement pendant quatre mois.

Des voitures et des maisons incendiées par des résidents d’implantations dans la ville de Huwara, en Cisjordanie, le 26 février 2023. (Crédit : Twitter)

Ce soir-là, des centaines d’Israéliens sont entrés dans la ville palestinienne et dans d’autres villages de la région, attaquant les gens et mettant le feu à 15 maisons et à des dizaines de véhicules, lors d’un incident que le chef du Commandement du Centre de Tsahal, le général de division Yehuda Fuchs a qualifié plus tard de pogrom. L’armée a été critiquée pour avoir mis plusieurs heures à rétablir l’ordre et pour ne pas avoir tenu compte des renseignements sur les projets des résidents d’implantations. L’évènement a été condamné dans le monde entier.

Plusieurs dizaines de soldats de réserve et de commandants du département de recherche de l’administration des renseignements militaires ont déclaré qu’ils cesseraient leur service si les réformes judiciaires se concrétisaient.

Le 27 février, le parti Otzma Yehudit, invoquant la politique laxiste du gouvernement à l’égard de la Cisjordanie, a décidé de boycotter une séance de la Knesset au cours de laquelle Netanyahu devait s’exprimer. Le vice-ministre Avi Maoz a démissionné de son poste en signe de protestation contre le manque de pouvoir qui lui était conféré.

Le même jour, des résidents d’implantations ont été accusés d’avoir tenté de se s’en prendre à des soldats de Tsahal à Huwara et de leur avoir jeté des pierres.

Le député Zvika Fogel (Otzma Yehudit), un ancien général de brigade de l’armée israélienne, a apporté son soutien sans ambiguïté aux extrémistes ultra-nationalistes qui s’en sont pris à des civils palestiniens, qualifiant le déchaînement à Huwara de « très positif ». « Une Huwara fermée et brûlée – voilà ce que je veux voir », a-t-il déclaré à la radio de l’armée, prédisant que cela aurait un effet dissuasif majeur. D’autres membres du parti ont également salué l’attaque.

La résistance et le siège du salon de coiffure

Le mercredi 1er mars a été déclaré « Journée nationale de perturbations » par les organisateurs de la manifestation et s’est avérée être l’une des journées les plus spectaculaires depuis l’annonce de la réforme. Des manifestations et des fermetures de routes ont eu lieu dans tout le pays, y compris devant des établissements scolaires.

Mais cette fois, la réponse de la police a été différente : des tactiques plus agressives ont été utilisées, telles que l’usage de grenades incapacitantes. Le chef de la police de Tel Aviv, Amichaï Eshed, avait quitté le pays pour quelques jours et son adjoint, David Filo, le remplaçait. Alors que la police tentait de contrôler les foules de manifestants, Ben Gvir et Shabtaï se sont présentés au quartier général de la police à Tel Aviv. Pour certains, les tactiques agressives de la police ressemblaient à une tentative d’impressionner le ministre d’extrême-droite.

Des secouristes soignant un homme blessé après le déploiement de la police montée et l’utilisation de grenades incapacitantes pour disperser des manifestants qui bloquent une route principale pour protester contre le projet de refonte du système judiciaire du gouvernement, à Tel Aviv, en Israël, le 1er mars 2023. (Crédit : Oded Balilty/AP)

La police a affirmé que des manifestants avaient, entre autres objets, jeté des pierres sur les policiers, mais des images de la scène n’ont montré aucune agression de ce type. Un manifestant a eu l’oreille gravement endommagée par l’explosion d’une grenade incapacitante, tandis que quelques journalistes et quelques civils ont été légèrement blessés.

Le ministre des Finances et ministre délégué de la Défense Bezalel Smotrich s’exprimant lors d’une conférence organisée par The Marker, le 1er mars 2023. (Crédit : Capture d’écran Twitter ; utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

Le même jour, Smotrich a été interviewé lors d’une conférence. Il a été interrogé sur les appels de membres du gouvernement à brûler la ville palestinienne de Huwara. « Je pense que la ville de Huwara doit être anéantie. Je pense que l’État d’Israël devrait le faire », a-t-il déclaré, ajoutant toutefois que cette tâche ne devrait pas être accomplie par des citoyens cherchant à se faire justice eux-mêmes.

Ses commentaires ont suscité l’indignation dans tout le pays et ont ensuite eu des répercussions dans le monde entier, faisant rapidement de Smotrich une personne non grata à l’échelle internationale.

Des Israéliens manifestant devant un salon de coiffure où se trouvait Sara Netanyahu, l’épouse du Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Tel Aviv, le 1er mars 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

Les manifestations de la journée se sont terminées par ce qui allait s’avérer être un événement décisif. À la tombée de la nuit, la nouvelle que Sara Netanyahu, l’épouse du Premier ministre, se faisait coiffer dans un salon de la chic place Kikar Hamedina, en plein cœur des manifestations de Tel Aviv, s’est répandue dans les groupes WhatsApp des manifestants. Rapidement, le salon a été encerclé par une foule d’au moins 1 000 personnes, et d’autres se sont mis en route pour les rejoindre.

La police a envoyé des forces spéciales, notamment des officiers de la garde montée, pour extraire Netanyahu du salon de coiffure. Coincée à l’intérieur, l’épouse du Premier ministre s’est entretenue au téléphone avec Ben Gvir et sa femme Ayala pour coordonner son extraction, une opération qui s’est finalement déroulée dans le calme, malgré les affirmations ultérieures de Netanyahu et de ses alliés selon lesquelles la vie de sa femme avait été menacée.

Le 3 mars, des condamnations du monde entier ont continué à s’abattre sur Smotrich pour ses commentaires sur Huwara, notamment de la part des Émirats arabes unis, de la Jordanie et même de Washington. Des dizaines d’organisations juives ont publié un appel pour empêcher Smotrich de monter sur scène lors d’une conférence sur les obligations d’Israël qu’il devait tenir à Washington.

Des manifestants marchant le long de l’autoroute Ayalon à Tel Aviv, le 4 mars 2023. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)

Dans la nuit du samedi 4 mars, des centaines de manifestations ont été organisées dans tout Israël. Les manifestants ont bloqué l’autoroute Ayalon.

Le dimanche 5 mars, la commission ministérielle des Lois a accepté d’avancer un projet de loi qui permettrait aux politiciens, y compris Netanyahu, de financer leur défense grâce à des dons offerts par des particuliers. Cette décision a été prise en dépit de l’opposition de la procureure générale.

Ce jour-là, le chef d’état-major de Tsahal, Halevi, a également averti Netanyahu que le nombre de réservistes refusant de servir augmentait, ce qui menaçait l’état de préparation opérationnelle de Tsahal.

Le 6 mars, jour de la fête juive de Pourim, 200 médecins militaires ont annoncé qu’ils refuseraient de se porter volontaires pour le service de réserve.

Ces médecins ont rejoint certains des réservistes les plus réputés de l’armée qui refusaient ouvertement de se présenter au service : les pilotes de chasse de l’unité 68, des centaines de membres des opérations spéciales de l’unité d’élite 8200 des services de renseignement de Tsahal, un groupe de l’unité 669 de recherche et de sauvetage par hélicoptère, et d’autres encore.

Alors que la question prenait de l’ampleur, le ministre de la Défense, Gallant, s’est élevé contre le phénomène des refus, tout en soulignant que « ceux qui dénigrent les soldats de Tsahal, qu’ils soient de droite ou de gauche, n’ont pas leur place dans le service public ».

Le 8 mars, Michael Sarel, économiste en chef du Kohelet Policy Forum, a averti que les réformes pourraient causer de graves dommages à l’économie. Cette déclaration était un aveu choquant de la part du directeur d’un groupe de réflexion conservateur qui s’était fortement impliqué dans le projet de réforme du gouvernement.

Dans la soirée, des milliers de femmes vêtues de rouge ont célébré la Journée internationale de la femme en formant des chaînes humaines sous la bannière « Tracer une ligne rouge ». Des manifestations similaires ont eu lieu dans plusieurs villes du pays.

L’entrée des bureaux du Kohelet Policy Forum qui a été bloquée par des manifestants opposés à la refonte du système judiciaire prévue par le gouvernement israélien, à Jérusalem, le 9 mars 2023. (Crédit : Flash90)

Les groupes de protestation ont déclaré le 9 mars « Journée de résistance » contre la réforme. La journée a commencé avec des activistes qui ont bloqué les portes des bureaux du Kohelet Policy Forum à Jérusalem avec du fil barbelé et des sacs de sable.

Dans la matinée, diverses manifestations ont été organisées sur l’autoroute côtière israélienne, les campus universitaires et les principaux carrefours. Dans la baie de Haïfa, des activistes ont mis en place une flottille, bloquant l’entrée du port.

Des Israéliens sur des bateaux protestant contre la réforme du système judiciaire prévue par le gouvernement, en mer au large de Haïfa, dans le nord d’Israël, le 9 mars 2023. (Crédit : Shir Torem/Flash90)

Des centaines de manifestants se sont rassemblés dans leurs voitures à l’aéroport international Ben Gurion, dans le but d’empêcher Netanyahu de se rendre à Rome pour une visite d’État. Afin de tromper les manifestants, un hélicoptère leurre a décollé de l’hôpital Hadassah Ein Kerem à Jérusalem, tandis que le Premier ministre se rendait à l’aéroport à bord d’un autre hélicoptère.

Avant son départ, Netanyahu a rencontré le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, qui avait décidé d’écourter sa visite en raison des manifestations de masse.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu assis avec le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, et d’autres responsables israéliens et américains, à l’aéroport Ben Gurion, le 9 mars 2023. (Autorisation)

Austin a atterri à l’aéroport, a rencontré Netanyahu et d’autres représentants du gouvernement dans les bureaux voisins de l’entreprise Israel Aerospace Industries, puis est reparti rapidement, comme il le ferait s’il se rendait dans un pays dangereux.

Netanyahu s’est envolé pour Rome alors que les rues d’Israël étaient le théâtre de manifestations de masse et de fermetures de routes, les manifestants affrontant la police qui avait déployé des canons à eau et des officiers de la garde montées dispersant les foules dans tout le pays.

Le même jour, le chef de l’armée de l’Air israélienne, Tomer Bar, a décidé de licencier Gilad Peled, un pilote de réserve accusé d’avoir encouragé les réservistes actifs à cesser de se porter volontaires.

Yaïr Netanyahu, le fils du Premier ministre, a accusé les principaux responsables de la police et le ministère public d’être de connivence avec les manifestants. « La police et les procureurs sont ceux qui procèdent en réalité aux fermetures de routes tous les quelques jours … ce sont eux les vrais responsables du chaos qui règne ici », a-t-il écrit sur les réseaux sociaux.

Herzog s’est de nouveau adressé à la nation lors d’une allocution télévisée. « Je ne peux pas regarder ma nation se déchirer sous mes yeux. Ce qui se passe ici est une tragédie », a-t-il déclaré, ajoutant que la réforme du système judiciaire en l’état devait « disparaître, et vite ».

Le président Isaac Herzog prononçant un discours à la nation au sujet de la réforme du système judiciaire du gouvernement, le 9 mars 2023. (Crédit : GPO)

Le même soir, Ben Gvir et Shabtaï ont annoncé qu’ils avaient choisi de démettre Eshed de son poste de chef de la police de Tel Aviv en raison de son « laxisme » à l’égard des manifestants.

Le chef de la police du district de Tel Aviv, Amichaï Eshed, s’adressant aux médias sur les lieux d’un attentat terroriste rue Dizengoff, dans le centre de Tel Aviv, le 9 mars 2023. (Crédit : Erik Marmor/Flash90)

Une heure plus tard, Eshed a dû continuer à assumer ses fonctions se précipitant du lieu d’une manifestation à la scène d’un attentat terroriste rue Dizengoff, à Tel Aviv.

Or Eshkar, 32 ans, victime d’une fusillade terroriste, à Tel Aviv, le 9 mars 2023. (Autorisation)

Les journalistes ont assisté à l’annonce de l’attentat au Premier ministre. Ils l’ont vu tenter de garder un visage impassible alors qu’il était assis dans une synagogue de Rome et qu’il écoutait les dirigeants de la communauté italienne le réprimander pour le paquet de reformes soutenus par son gouvernement.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu apprenant l’attaque terroriste à Tel Aviv alors qu’il se trouve dans une synagogue de Rome, le 9 mars 2023. (Crédit : Amos Ben-Gershom/GPO)

Aux alentours de minuit, des centaines de manifestants anti-gouvernement se sont rassemblés devant le domicile d’Eshed à Kfar Saba en signe de soutien.

Le 10 mars, la procureure générale Baharav-Miara a publié une déclaration bloquant le renvoi d’Eshed, dans l’attente d’un examen plus approfondi.

Son licenciement n’aura pas été le seul à être gelé. Au sein de l’armée de l’Air, Bar est revenu sur sa décision de licencier Peled, après s’être assuré que le pilote de réserve n’avait pas coordonné un refus de servir parmi d’autres réservistes.

Vendredi, des manifestations ont eu lieu devant la maison de Gallant à Amikam, dans le nord d’Israël, entre autres. Les personnes rassemblées, parmi lesquelles d’anciens soldats de l’unité d’élite Shayetet 13, autrefois dirigée par Gallant, avaient identifié le ministre comme une cible sur laquelle il était possible d’exercer des pressions directes et fructueuses.

Ce jour-là, le quotidien Yedioth Ahronoth a cité les propos de Halevi, le chef d’état-major de l’armée israélienne. « Une dictature sûre vaut mieux qu’une anarchie sans protection ». Deux jours plus tard, il a publié une mise au point dans laquelle il est revenu sur ses propos.

À Rome, des Israéliens et des Juifs italiens ont organisé une manifestation contre le Premier ministre, alors en visite officielle. Tout au long de son séjour, et lors de réunions d’information avec des journalistes israéliens, le Premier ministre a affirmé que des agents étrangers finançaient les manifestations contre la réforme judiciaire, faisant ainsi écho aux déclarations controversées de son fils Yaïr sur les réseaux sociaux.

Le samedi 11 mars, les membres de l’unité Shayetet 13 ont téléchargé une vidéo sur les réseaux sociaux les montrant en train de protester contre Gallant alors qu’il quittait la plage après avoir nagé et vaquait à sa routine matinale – les compagnons de l’armée sont restés devant son domicile jusqu’à la fin de l’après-midi.

Samedi soir, Shabtaï a admis à la télévision qu’il avait commis une erreur en renvoyant Eshed, et a déclaré que cette mesure avait été suspendue.

Cette nuit-là, des manifestations de masse ont à nouveau eu lieu dans le créneau traditionnel du samedi soir. De nombreuses routes ont été bloquées dans tout le pays, et les manifestants ont dû faire face aux gaz lacrymogènes et à la répression policière.

Le dimanche 12 mars, Ben Gvir a déclaré lors de la réunion hebdomadaire du cabinet que le gouvernement devait décider du sort de la procureure générale – une menace à peine voilée de la renvoyer.

À Washington, Smotrich s’est présenté devant une salle de partisans d’Israel Bonds et, dans un anglais avec un fort accent israélien, s’est excusé pour ses propos sur Huwara. Mais les effets durables de ces premiers commentaires ont été mis à nu lors de son voyage, les refus des fonctionnaires américains de rencontrer Smotrich mettant en évidence son isolement. Même des groupes juifs ont refusé de le rencontrer, certains l’ayant ouvertement rabroué.

La directrice-générale de Truah, Jill Jacobs, prenant la parole lors d’une manifestation contre le ministre des Finances Bezalel Smotrich devant le Grand Hyatt Hotel, à Washington, le 12 mars 2023. (Crédit : Jacob Magid/Times of Israel)

Le 13 mars, la Knesset a avancé un projet de loi qui empêcherait la Haute Cour de justice d’avoir le pouvoir de suspendre le Premier ministre de ses fonctions. Le projet de loi limite les cas dans lesquels un Premier ministre peut être démis de ses fonctions à ceux où il fait preuve d’un manque d’aptitude physique ou mentale, une décision qui doit être ratifiée par les trois quarts des ministres du cabinet et 90 des 120 membres de la Knesset.

Le 14 mars, les députés ont fait avancer le projet de loi controversé portant sur la clause dite « dérogatoire » lors de la première des trois lectures. Cette loi permettrait au Parlement d’annuler les décisions de la Cour suprême avec une majorité simple de 61 députés.

La Knesset a également approuvé des amendements abrogeant certaines parties de la Loi sur le Désengagement qui interdisaient aux résidents d’implantations l’accès à certaines parties du nord de la Cisjordanie, ce qui leur permettait potentiellement d’y rétablir des avant-postes illégaux évacués.

Le 15 mars, Smotrich a annoncé qu’il écourtait son voyage aux États-Unis pour retourner en Israël, afin de jouer un rôle actif dans les négociations sur ce que son bureau a appelé la « réforme de la gouvernance ».

Le soir même, Herzog a présenté son projet très attendu de la réforme du système judiciaire. Baptisé « Cadre du peuple », le plan a été largement accepté par l’opposition, mais rejeté d’emblée par la coalition, dont les députés ont affirmé qu’il ne faisait que « perpétuer le statu quo ».

Jours de tonnerre

Le 16 mars a été déclaré « Journée d’escalade de la résistance » contre la réforme du système judiciaire. La journée a commencé par une manifestation coordonnée par le groupe de protestation des anciens combattants « Frères d’armes », qui a installé un ersatz de « bureau de recrutement » de Tsahal dans le centre de la ville ultra-orthodoxe de Bnei Brak.

Ce geste provocateur a mis en évidence l’un des moteurs des efforts du gouvernement pour protéger la législation contre l’ingérence de la Haute Cour : les partis ultra-orthodoxes cherchant à obtenir une loi permettant aux membres de la communauté haredi de se soustraire au service militaire obligatoire, dont les versions antérieures avaient été invalidées.

Des manifestants bloquant une autoroute lors d’une protestation contre les plans du gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu visant à réformer le système judiciaire, à Tel Aviv, en Israël, le 16 mars 2023. (Crédit : AP/Ohad Zwigenberg)

Le député David Bitan a appelé ses collègues du Likud à mettre fin à la réforme du système judiciaire en faveur d’un dialogue avec l’opposition. Simultanément, d’importants groupes de manifestants ont bloqué les principales routes et carrefours du pays.

Le ministre de l’Économie, Nir Barkat, a accusé les manifestants d’avoir jeté une pierre sur une salle de conférence où il participait à un événement à Kfar Saba.

Pendant ce temps, Netanyahu était à Berlin pour une visite d’État, où il a été accueilli, comme à Rome, par des manifestations.

Le 17 mars, Yaïr Netanyahu a comparé cette fois les manifestants aux paramilitaires nazis Sturmabteilung, également connus sous le nom de « Chemises brunes ».

Le samedi 18 mars, des dizaines de personnes ont manifesté à côté d’une synagogue du moshav Kfar Uriah, où Ben Gvir et sa famille séjournaient pour le week-end. La manifestation a donné lieu à un affrontement entre les manifestants, la police et les habitants de la petite ville.

Des fumigènes lancés contre les manifestants venus pour protester contre le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir à Kfar Uriah, le 18 mars 2023. (Crédit : Capture d’écran ; utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur)

Une fois de plus, les foules se sont mobilisées samedi soir dans tout le pays. Les manifestants ont bloqué l’autoroute Ayalon.

Le 19 mars, Netanyahu a ordonné au chef de la police, Shabtaï, d’empêcher les manifestants de bloquer les routes. Il a également demandé au chef d’état-major de Tsahal de s’occuper du nombre croissant de réservistes qui refusent ou menacent de refuser le service militaire.

Ce jour-là, un nouveau groupe de pilotes s’est joint à ceux qui ont déclaré qu’ils cesseraient de se porter volontaires aux entraînements.

Dans le même temps, le processus législatif s’est poursuivi à la Knesset et les manifestants ont harcelé les députés de la coalition, notamment lors d’un événement organisé par le Likud à Raanana, auquel participaient les députés Boaz Bismuth (Likud), ancien rédacteur en chef d’Israel Hayom, et Galit Distel Atbaryan.

Le président américain Joe Biden a appelé Netanyahu. Les deux hommes ont discuté de la réforme du système judiciaire. Selon un communiqué de la Maison Blanche, Biden a demandé à Netanyahu de s’efforcer de trouver un large consensus pour sa réforme.

Le 20 mars, le député Simcha Rothman, président de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, a présenté des modifications à un projet de loi visant à assouplir la proposition de restructuration de la commission de sélection des juges.

Le président de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset, député Simcha Rothman, dirige une audience de la commission, le 20 mars 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le nouveau plan de Rothman donnerait au gouvernement le contrôle des deux premiers sièges à ouvrir à la Haute Cour à chaque mandat d’un gouvernement (plutôt que toutes les nominations à la Haute Cour comme dans le projet précédent), une grande influence sur les nominations ultérieures à la Haute Cour, et (comme dans le projet précédent) le droit de choisir le président de la Haute Cour, et le contrôle sur les nominations des juges dans le reste du système judiciaire. Largement critiquée par l’opposition, la commission Rothman a commencé à préparer le projet de loi amendé pour qu’il soit soumis à la Knesset pour un deuxième et un troisième vote avant de devenir une loi.

Gallant a déclaré en privé à Netanyahu qu’il lui serait difficile de rester à son poste si le gouvernement poursuivait son blitz législatif. Il a mis en garde le Premier ministre contre les conséquences dangereuses pour la sécurité du refus des réservistes de servir dans Tsahal.

Le gouvernement français et la Maison Blanche ont réprimandé Smotrich pour avoir déclaré que « le peuple palestinien n’existe pas », lors d’une cérémonie privée à la mémoire d’un militant de droite du Likud à Paris. Le gouvernement français a déclaré qu’aucun fonctionnaire n’avait rencontré Smotrich au cours de ce voyage d’une journée.

Le chef du parti HaTzionout HaDatit Bezalel Smotrich s’exprimant lors d’un service commémoratif pour Jacques Kupfer, militant de droite du Likud et membre du conseil d’administration de l’Agence juive, qui est décédé après une longue bataille contre le cancer en 2021, à Paris, le 19 mars 2023. (Crédit : Capture d’écran via Ynet, utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur)

Smotrich avait prononcé ses remarques derrière un podium affichant une image sioniste révisionniste du « Grand Israël » – comprenant l’Israël actuel, la Cisjordanie, Gaza et l’ensemble de la Jordanie. Cette image a été vivement condamnée par la Jordanie, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, l’Égypte et d’autres pays.

Le 21 mars, la commission d’éthique de la Knesset a sanctionné la députée Tally Gotliv pour ses commentaires antérieurs dans lesquels elle rendait la présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, responsable d’un attentat terroriste meurtrier à Jérusalem qui a causé la mort de deux enfants et blessé un autre jeune.  Elle a été interdite de parole à la Knesset pendant trois jours.

Le député David Amsalem (Likud) a menacé Shabtaï, lui disant qu’à l’avenir, il pourrait faire l’objet d’une enquête pour son comportement lors des manifestations.

La Knesset a définitivement approuvé l’abrogation d’une partie de la Loi sur le Désengagement, une décision qui a suscité la condamnation et l’étonnement à Washington et ailleurs.

Des personnes marchant près du château d’eau sur les ruines de Homesh, le 27 août 2019. (Crédit : Hillel Meir/Flash90)

Dans son sillage, la députée Limor Son Har Melech a appelé à l’établissement de nouvelles implantations dans le nord de la Cisjordanie, désormais ouvert.

La députée Orit Strouk (HaTzionout HaDatit) a déclaré dans une interview que la prochaine étape était un retour à Gaza, même au prix de vies humaines. Netanyahu a publié une mise au point indiquant que de nouvelles implantations ne seraient pas établies dans le nord de la Cisjordanie.

Dans l’après-midi, les dirigeants du groupe de protestation « Frères d’armes » ont convoqué une conférence de presse au cours de laquelle ils ont averti que si un seul élément du plan de réforme judiciaire devenait loi, eux et beaucoup d’autres cesseraient de se porter volontaires pour le service de réserve.

Cette nuit-là, une législation qui protégerait le Premier ministre si ce dernier devait être récusé sur ordre du tribunal a été approuvée en deuxième et troisième lecture à la Knesset.

Le 22 mars, le Département d’État américain, irrité par la modification de la Loi sur le Désengagement par le gouvernement israélien, a convoqué l’ambassadeur d’Israël aux États-Unis, Mike Herzog, pour une réunion imprévue.

Le ministre du Logement et chef de Yahadout HaTorah, Yitzchak Goldknopf, a été chassé de la scène par des manifestants qui ont interrompu son intervention lors d’une conférence à Tel Aviv. Lors d’un événement organisé par l’industrie cinématographique à Kfar Saba, des dizaines de manifestants ont empêché le ministre de la Culture et des Sports, Miki Zohar, d’assister à l’événement.

Le 23 mars a été déclaré « Journée de paralysie« . Aux premières heures de la journée, des centaines de militants ont manifesté devant le domicile du député Aryeh Deri à Jérusalem. Aux côtés des militants, de jeunes hommes haredim ont dansé en rond.

Les employés de l’entreprise publique israélienne de défense Rafael Advanced Systems ont manifesté dans le nord du pays, tandis qu’un recours a été déposé à la Haute Cour visant à bloquer la nouvelle loi destinée à protéger Netanyahu d’une démission forcée.

Des manifestants ont encerclé le ministre de l’Agriculture Avi Dichter alors qu’il quittait une conférence près de l’aéroport. Une manifestante a été arrêtée après que son drapeau a heurté Dichter, qui n’a pas été blessé. La ministre des Transports, Miri Regev (Likud), a demandé que les pilotes qui refusent de se porter volontaires pour le service de réserve soient jugés par un tribunal.

Dans le nord du pays, la police a arrêté l’une des principales cheffes de fil du mouvement de protestation, Shikma Bressler. Tout au long de la journée, les militants ont bloqué des routes dans tout le pays, y compris l’autoroute Ayalon.

Shikma Bressler, leader de la manifestation, arrêtée par la police lors de manifestations sur la Route 4, le 23 mars 2023. (Autorisation)

En début de soirée, les manifestants anti-gouvernement ont entamé une marche prévue dans la ville de Bnei Brak.

Alors que certains ont lancé des pétards en direction des manifestants majoritairement laïcs, d’autres habitants ont répondu aux appels à ne pas se laisser entraîner dans la bagarre et ont accueilli les manifestants avec des chants et des collations.

Les résidents offrant des collations et de l’eau aux manifestants venus protester contre la refonte judiciaire, à Bnei Brak, le 23 mars 2023. (Crédit : Haïm Uzan)

Les manifestations de la journée ont été renforcées par les informations qui se sont accumulées tout au long de l’après-midi, selon lesquelles Gallant tiendrait une conférence de presse appelant le gouvernement à suspendre son projet de loi sur la réforme du système judiciaire.

Netanyahu a convoqué Gallant pour une réunion et l’a pressé de renoncer à sa déclaration.

Au lieu de Gallant, Netanyahu s’est présenté devant les caméras, expliquant au public qu’après l’adoption d’une loi qui le protégerait d’une décision de justice l’obligeant à se récuser, il jouerait désormais un rôle plus actif dans la crise de la réforme du système judiciaire.

Dans son discours, Netanyahu a déclaré que le blitz législatif se poursuivrait la semaine suivante, à son retour d’une visite d’État au Royaume-Uni, et qu’il était déterminé à faire passer les changements malgré les protestations. Les manifestants ont été furieux de l’attitude provocatrice du Premier ministre

Dans la soirée, le député Simcha Rothman a assisté à une réunion au domicile d’un dirigeant du secteur technologique à Ramat HaSharon. Des centaines de manifestants, mis au courant, se sont rassemblés à l’extérieur, bloquant la sortie de Rothman et nécessitant une horde de policiers pour l’extraire.

Le 24 mars, Netanyahu est arrivé à Londres, directement de l’aéroport pour rencontrer le son homologue britannique Rishi Sunak. Des centaines de manifestants l’attendaient.

Des manifestants devant le 10 Downing Street, alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahu rencontre son homologue britannique Rishi Sunak, à Londres, le 24 mars 2023. (Crédit : Amy Spiro/Times of Israel)

Netanyahu a été reçu au 10 Downing Street sans fioriture ni cérémonie et sans conférence de presse conjointe avec Sunak.

Au sujet de la refonte judiciaire, son homologue britannique a rappelé au Premier ministre israélien l’importance du respect des « valeurs démocratiques ».

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, rencontrant son homologue britannique Rishi Sunak, au 10 Downing Street, à Londres, le 24 mars 2023. (Crédit : Avi Ohayon/GPO)

Plus tard dans la journée, la procureure générale Baharav-Miara a publié une déclaration indiquant que, bien que Netanyahu ait prétendu être protégé contre la récusation, il lui était néanmoins interdit de s’impliquer dans le processus législatif concernant la réforme du système judiciaire en raison d’un conflit d’intérêts lié à son procès pour corruption en cours.

« Votre déclaration d’hier soir et toute autre action de votre part qui violerait cet accord sont totalement illégales », a-t-elle souligné dans une lettre publique.

La procureure générale Gali Baharav-Miara participant à une conférence à l’université de Haïfa, le 15 décembre 2022. (Crédit : Shir Torem/Flash90)

Yaïr Netanyahu a cette fois affirmé sur Twitter que le Département d’État américain finançait le mouvement de protestation contre le gouvernement de son père. Lors de rencontres avec des journalistes israéliens à Londres, Netanyahu a pris ses distances avec les commentaires de son fils, qui ont suscité une nouvelle colère à Washington.

Le samedi 25 mars, une grande manifestation a eu lieu devant le domicile de Gallant au moshav Amikam. Ce soir-là, Gallant a enfin eu l’occasion de s’exprimer devant les télévisions, abordant ce qu’il a appelé les dangers pour la sécurité causés par le processus de réforme, en grande partie dus aux divisions au sein de l’armée, mais que le gouvernement avait ignorés. « Les clivages croissants au sein de notre société pénètrent au sein de Tsahal et des agences de sécurité nationales. Ce qui représente une menace claire, immédiate et tangible pour la sécurité de l’État », a-t-il averti. Il a appelé à l’arrêt du processus judiciaire au profit du dialogue.

Ses commentaires ont été critiqués dans les cercles de droite. Ben Gvir a imploré Netanyahu de limoger immédiatement Gallant.

Gallant s’est exprimé alors que de nouvelles manifestations étaient organisées dans tout le pays.

Pendant ce temps, à Londres, des Israéliens et des communautés juives locales ont manifesté en face de l’hôtel Savoy, où se trouvaient Netanyahu et son épouse.

Une pancarte indiquant « Démocratie » ornée de la Déclaration d’Indépendance d’Israël lors d’une manifestation devant l’hôtel Savoy où résidait le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Londres, le 24 mars 2023. (Crédit : Amy Spiro/Times of Israel)

Le 26 mars, une manifestation contre Ben Gvir a eu lieu dans sa ville natale de Kiryat Arba.

Au sein de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, Rothman a empêché les députés de l’opposition de prendre la parole au début d’un débat sur la législation relative à la commission de sélection des juges.

Plusieurs manifestations ont eu lieu dans tout le pays. Des milliers de personnes se sont rassemblées devant la maison de la ministre des Renseignements, Gila Gamliel (Likud). Les manifestants ont bloqué l’autoroute Ayalon. Le chanteur israélien Shlomo Artzi a refusé de recevoir le prestigieux Prix Israël, déclarant que le moment n’est pas propice, le pays étant si déchiré.

Le soir même, Netanyahu a annoncé qu’il avait limogé Gallant de son poste de ministre de la Défense parce qu’il avait demandé l’arrêt de la réforme du système judiciaire.

Les Israéliens opposés à la réforme judiciaire du Premier ministre Benjamin Netanyahu devant la Knesset après le renvoi du ministre de la Défense par le Premier ministre, à Jérusalem, le 27 mars 2023. (Crédit : AP Photo/ Mahmoud Illean)

La nouvelle du licenciement de Gallant a poussé les foules à descendre spontanément dans les rues – beaucoup d’entre elles se sont dirigées vers la rue Kaplan à Tel Aviv, et d’autres vers le domicile de Netanyahu à Jérusalem et la Knesset.

Selon les estimations, la seule ville de Tel Aviv a accueilli 120 000 personnes, et d’innombrables manifestations ont eu lieu dans tout le pays.

Des Israéliens opposés au plan de réforme du système judiciaire du Premier ministre Benjamin Netanyahu allumant des feux de joie et bloquant une autoroute lors d’une manifestation quelques instants après que le dirigeant israélien a limogé son ministre de la Défense, à Tel Aviv, en Israël, le 26 mars 2023. (Crédit : AP Photo/Ohad Zwigenberg)

L’autoroute Ayalon est restée fermée à la circulation jusqu’à 5h le lendemain matin.

Le président de la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset, Yuli Edelstein (Likud), a déclaré qu’il réunissait sa commission et qu’il inviterait Gallant à soulever les questions de sécurité mentionnées dans son discours à la nation samedi soir.

La grève, la protestation en faveur de la réforme et la suspension du processus législatif

Le lendemain, le 27 mars, le chef du puissant syndicat Histadrout et d’autres syndicats ont déclaré une grève générale, bloquant en partie l’aéroport, les institutions académiques, les centres commerciaux et les hôtels.

Les appels à une pause dans l’application du processus législatif ont semblé atteindre un point de basculement, le chef du Shas, Deri, se joignant au chœur pour réclamer un temps d’arrêt. Boaz Ben Zur, un membre clé de l’équipe de défense juridique de Netanyahu, a informé le Premier ministre qu’il ne continuerait pas à le représenter dans l’Affaire
4 000 s’il ne mettait pas fin à son projet de refonte judiciaire.

Ben Gvir a menacé de démissionner si Netanyahu cédait. Les deux hommes se sont rencontrés et ont convenu que le Premier ministre créerait une garde nationale directement sous le contrôle de Ben Gvir en échange du soutien du ministre à la suspension du processus législatif.

Néanmoins, le vote au sein de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice s’est poursuivi en vue de préparer la législation sur la sélection des juges qui doit être présentée à la Knesset pour une deuxième et une troisième lecture. Plus de 100 000 manifestants se sont rassemblés devant la Knesset.

Des Israéliens de droite lors d’un rassemblement en soutien à la réforme du système judiciaire du gouvernement, à Jérusalem, le 27 mars 2023. (Crédit : Erik Marmor/Flash90)

Dans la soirée, une manifestation de droite en faveur de la réforme du système judiciaire s’est tenue à Jérusalem, la première du genre. Selon les estimations, 30 000 personnes y ont participé.

A 20h, Netanyahu a annoncé qu’il mettait en pause le processus législatif pendant au moins un mois, jusqu’à la session d’été de la Knesset, qui débutera le 1er mai. Il a toutefois indiqué que la législation ne serait pas gelée de façon permanente et a suggéré que l’opposition et la coalition entament des négociations à la résidence présidentielle.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’adresse à la nation, le 27 mars 2023. (Crédit : Capture d’écran GPO)

Le lendemain, 28 mars, le ministre de la Justice, Yariv Levin, a assuré à ses partisans que la législation serait avancée lors de la prochaine session de la Knesset et qu’il avait l’intention, avec le Likud, « d’organiser des manifestations dans tout Israël pour montrer ce que veut la majorité de l’opinion publique ».

Malgré l’annonce de Netanyahu de la mise en pause de la législation, le projet de loi visant à donner à la coalition le contrôle des nominations judiciaires a été soumis à la Knesset pour les derniers votes, ce qui lui permet d’être promulgué avec un préavis minimal à une date ultérieure.

Le président américain Biden a exhorté Netanyahu à « renoncer » à son projet de loi sur la réforme judiciaire, se disant « très préoccupé » par la santé de la démocratie israélienne et avertissant qu’Israël « ne peut pas continuer sur cette voie ».

« Il faut espérer que le Premier ministre agira de manière à trouver un véritable compromis, mais cela reste à voir », a déclaré Biden à la presse, en insistant sur le mot « véritable ». Biden a également répondu par un « non » à la question de savoir s’il inviterait Netanyahu à la Maison Blanche. « Pas à court terme », a-t-il ajouté.

Le président américain Joe Biden s’adressant à la presse à l’aéroport international de Raleigh-Durham, à Morrisville, en Caroline du Nord, le 28 mars 2023. (Crédit : Jim Watson/AFP)

Le 30 mars, une autre manifestation en faveur de la réforme a eu lieu à Tel Aviv. Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées à Kikar Habima, avant de marcher jusqu’à l’autoroute Ayalon et de bloquer l’artère.

Des hauts fonctionnaires impliqués dans les négociations menées sous l’égide de Herzog en vue de parvenir à un compromis sur la législation relative à la réforme du système judiciaire auraient déclaré que les pourparlers étaient déjà dans l’impasse

Escalade de la violence sur plusieurs fronts

Le 1er avril, la police a abattu un Bédouin dans la Vieille Ville de Jérusalem qui, selon elle, s’était emparé de l’arme d’un agent.

Cette nuit-là, les manifestations hebdomadaires contre la réforme ont repris dans tout le pays. Rue Kaplan à Tel Aviv, 165 000 personnes ont manifesté, tandis que 120 000 autres sont descendues dans les rues du pays, selon les estimations, dont 40 000 à Haïfa, 40 000 à Kfar Saba et 20 000 à Jérusalem.

Un officier de la garde montée a été filmé en train de frapper une jeune femme avec une cravache. La police a assuré qu’elle avait nargué et frappé le cheval, ce qu’elle a catégoriquement nié.

Un agent de la garde montée frappant une jeune femme lors d’une manifestation contre la réforme du système judiciaire, à Tel Aviv, le 1er avril 2023. (Crédit : Capture d’écran Twitter ; utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

Après une discussion animée lors de la réunion hebdomadaire du cabinet le 2 avril, les ministres ont voté en faveur de la formation de la garde nationale de Ben Gvir, potentiellement sous son commandement direct, ainsi que d’une réduction importante du budget de tous les ministères pour la financer.

Un agent de sécurité de l’hôpital Laniado, dans le centre d’Israël, a confisqué des biscuits qui n’étaient pas « Casher LePessah » à une femme enceinte qui s’était présentée à l’hôpital, quelques jours avant le début de la fête, alors que les hôpitaux du pays se préparent à instaurer la « loi hametz ».

Le gouvernement a licencié son envoyée bénévole chargée de la lutte contre l’antisémitisme, Noa Tishby, pour avoir critiqué cette réforme, tandis que le chef du Shin Bet, Ronen Bar, a publiquement averti que les dissensions sociétales sur cette question « pourraient conduire à un désastre ».

Les ambassadeurs de Bahreïn et des Émirats arabes unis n’ont pas participé à un dîner d’iftar organisé par le ministère des Affaires étrangères à l’intention des diplomates des pays musulmans en poste en Israël et des dirigeants musulmans locaux. L’envoyé de la Jordanie était également absent. La Turquie et l’Égypte étaient présentes, de même qu’Abderrahim Beyyoudh, chef du bureau de liaison du Maroc en Israël.

Le 3 avril, le chef du Shas, Deri, a déclaré que le gouvernement se serait effondré s’il avait tenté de faire passer sa loi sur la réforme du système judiciaire comme prévu la semaine précédente. Il a néanmoins prévenu que si les négociations en vue d’une réforme largement acceptée échouaient, le gouvernement adopterait ses projets de loi de manière unilatérale.

Le gouverneur de la Banque d’Israël, Amir Yaron, a prévenu que le remaniement judiciaire nuirait gravement à l’économie. Dans son scénario pessimiste, il a déclaré que l’impact potentiel de la réforme pourrait se traduire par une perte annuelle de 14 milliards de dollars pour le PIB au cours des trois prochaines années.

Une interview télévisée datant d’il y a deux semaines a fait surface, dans laquelle le ministre de la Justice, Yariv Levin, a admis qu’un élément clé de sa législation sur le remaniement aurait conduit à une situation inacceptable dans un pays démocratique, dans laquelle la coalition exercerait un contrôle sur les trois branches du gouvernement. Il a estimé que la législation amendée, qui donne à la coalition un contrôle quasi-total, mais non total, des nominations à la Haute Cour, résolvait le problème.

Dans la nuit du 4 au 5 avril, de violents affrontements ont éclaté entre des émeutiers palestiniens et la police à l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, au sommet du mont du Temple. La police a déclaré qu’elle était entrée dans la mosquée pour déloger des « agitateurs » qui s’étaient barricadés à l’intérieur avec des pétards, des gourdins et des pierres. Les autorités ont déclaré que 350 personnes avaient été arrêtées lors de ces troubles.

La police israélienne frappant des émeutiers palestiniens à l’intérieur de la mosquée al-Aqsa de Jérusalem dans la nuit du 5 avril. (Crédit : Capture d’écran Twitter, utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur le droit d’auteur)

Une salve de roquettes a été lancée sur les villes israéliennes voisines depuis Gaza tôt le 5 avril, et l’armée de l’Air israélienne a riposté contre des cibles du Hamas dans l’enclave.

La police a arrêté plusieurs personnes près du mont du Temple avec des agneaux ou des chèvres qu’elles étaient soupçonnées d’avoir l’intention de sacrifier sur le site pour la fête de Pessah.

Le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a critiqué un média haredi, Behadrei Haredim, pour avoir publié une caricature de lui sous la forme d’un cochon comptant de l’argent. « C’est ainsi que les antisémites ont dessiné les Juifs pendant des générations », a déploré Lapid sur Twitter.

Une caricature dépeignant le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, sous la forme d’un cochon en train de compter de l’argent qui a été publiée sur le site d’information haredi Behadrei Haredim, au mois d’avril 2023. (Crédit : Capture d’écran Twitter ; utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur)

D’autres affrontements ont eu lieu à Al-Aqsa dans la nuit du 5 au 6 avril, ainsi que des émeutes relativement mineures à Gaza et dans certaines communautés arabes en Israël.

En plein repas de Pessah dans l’après-midi du 6 avril, 34 roquettes ont été tirées sur Israël depuis le Sud-Liban, soit le barrage le plus important depuis la Seconde Guerre du Liban en 2006. La plupart ont été interceptées par le système de défense antiaérienne du Dôme de Fer. Au moins trois personnes ont été blessées et plusieurs bâtiments ont été endommagés.

Des soldats israéliens marchant à côté d’une banque endommagée par une roquette interceptée tirée depuis le Liban et qui a atterri à Shlomi – la succursale était fermée pour Pessah – dans le nord d’Israël, près de la frontière libanaise, le 6 avril 2023. (Crédit : Ariel Schalit/AP)

Israël a accusé les membres du groupe terroriste palestinien du Hamas, basées au Liban, d’être à l’origine de l’attaque, et des sources officielles israéliennes ont déclaré qu’elle n’aurait pas été menée sans l’accord du groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah. Cette salve est survenue quelques heures après que le Hezbollah a déclaré qu’il soutiendrait « toutes les mesures » que les groupes palestiniens pourraient prendre contre Israël après les deux nuits d’affrontements à la mosquée Al-Aqsa.

Alors que le cabinet de sécurité discutait de la manière de réagir, Netanyahu a déclaré qu’aucun débat interne en cours dans la société israélienne n’empêcherait pas le pays de répondre fermement et de manière significative à l’escalade de la violence, faisant ainsi référence à la crise nationale provoquée par la réforme du système judiciaire. « Nos ennemis apprendront à nouveau qu’en temps de guerre, les citoyens israéliens sont solidaires et unis, et qu’ils soutiennent les actions de Tsahal et du reste des forces de sécurité pour protéger notre pays et nos citoyens », a-t-il déclaré.

Israël a lancé des frappes aériennes dans la Bande de Gaza cette nuit-là, touchant une série de sites appartenant au groupe terroriste du Hamas, alors que ce dernier tirait des roquettes sur le sud d’Israël.

Un homme inspectant les dégâts causés à sa maison par une roquette, suite à des frappes aériennes israéliennes à Al Qulaylah, en périphérie de Tyr, au sud de la capitale libanaise Beyrouth, le 7 avril 2023. (Crédit : Mahmoud Zayyat/AFP)

Tôt le 7 avril, Israël a également mené des frappes au Liban, ciblant des « infrastructures terroristes appartenant au Hamas » dans le sud du pays, où le Hamas a une forte présence dans les camps de réfugiés palestiniens. Une maison de Sderot a été touchée par l’un des 44 projectiles lancés depuis Gaza.

Alors qu’un calme relatif est revenu aux frontières nord et sud, une attaque terroriste meurtrière a eu lieu en Cisjordanie, dans laquelle deux jeunes sœurs ont été tuées par balle et leur mère grièvement blessée par un tireur palestinien alors qu’elles circulaient en voiture dans la vallée du Jourdain.

Soldats sur les lieux d’un attentat terroriste meurtrier en Cisjordanie, près de l’implantation de Hamra, le 7 avril 2023. (Crédit : Michael Giladi/Flash90)

Tsahal a ordonné le rappel des réservistes de l’armée de l’Air, y compris des pilotes de chasse, et le chef de la police, Shabtaï, a demandé aux Israéliens titulaires d’un permis de port d’arme de porter leur arme sur eux. Les membres de la coalition d’extrême-droite, dont les ministres Smotrich et Ben Gvir, ont réclamé des mesures plus strictes pour endiguer la vague de terreur, s’en prenant à leur propre gouvernement et à l’opposition. Sur les lieux de l’attentat, Netanyahu et Gallant ont promis que le tueur serait retrouvé. Dans ses remarques, Netanyahu a fait référence à Gallant en tant que ministre de la Défense, après l’avoir largement ménagé pendant les 12 jours qui ont suivi l’annonce de son limogeage.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré à son homologue iranien Ebrahim Raissi lors d’un appel téléphonique que « le monde islamique devrait être uni contre les attaques d’Israël en Palestine » – un changement apparent pour Erdogan, qui avait mené une politique au cours de l’année écoulée qui a vu la Turquie resserrer ses liens avec Israël.

Plus tard dans la nuit, un touriste italien a été tué et sept autres personnes ont été blessées lors d’un attentat terroriste à la voiture-bélier sur la promenade de Tel Aviv. Craignant une nouvelle escalade, Netanyahu a ordonné le rappel de tous les réservistes de la police des frontières.

Le 8 avril 2023 a marqué les 100 jours de la coalition dirigée par Benjamin Netanyahu.

L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.

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